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Par Yvonne Stephen
15 décembre 2015 13:09
Des femmes qui se mobilisent pour leurs quartiers. Une action d’espoir ?
Oui. Nous sommes une association regroupant plusieurs femmes de la circonscription n°3 (Port-Louis Maritime/Port-Louis-Est), qui comprend des quartiers tels que Roche-Bois et Plaine-Verte. Ces femmes représentent toutes les cultures, il y a des hindoues, des musulmanes, des catholiques... À mon avis, c’est une première. Nous avons décidé de travailler ensemble parce que dans ces régions, et certainement partout dans l’île, il y a des fléaux tels que l’alcool et la drogue qui touchent nos enfants. Nous œuvrons pour qu’ils ne tombent pas dans le piège d’une de ces addictions. Notre prochaine activité est d’offrir la magie de Noël à des enfants défavorisés. Nous pensons que c’est important d’aider, mais aussi de permettre aux enfants de rêver.
Femme Liberater n’a donc rien à voir avec les femmes ?
Si, bien sûr. Elles sont les chevilles ouvrières de l’association. Et puis, nous valorisons les femmes et nous tentons de les promouvoir. Nous organisons des activités pour elles. Des séances de Zumba, par exemple. Mais nous nous concentrons surtout sur les enfants parce que c’est la priorité.
Pourquoi ces enfants sont-ils la priorité ?
C’est la priorité maximale. Nous devons œuvrer pour qu’ils continuent leurs études, aient une formation et puissent trouver du travail. Notre but, c’est d’encadrer les enfants et adolescents pour les aider à avancer, pour qu’ils ne tombent pas dans la drogue. L’encadrement des enfants est essentiel. Il ne s’agit pas de les aider quelques minutes, il faut s’assurer que tout soit fait pour qu’ils puissent s’en sortir. Il faut veiller à ce que tout aille bien chez eux, qu’ils aient le soutien nécessaire et les moyens de s’épanouir. Alors nous les suivons et nous organisons différentes activités pendant les vacances et du soutien scolaire le reste de l’année. C’est un début.
Les enfants des quartiers défavorisés de votre circonscription sont-ils plus vulnérables ?
Sans encadrement, oui.
Les femmes et les enfants de ces localités subissent-ils des violences au sein de leur foyer ?
Nous n’avons pas rencontré ce problème jusqu’à l’heure. Les femmes à qui nous nous adressons sont très ouvertes. Elles nous le diraient.
Vous en êtes certaine ?
Oui. Il y a une relation privilégiée qui se tisse.
La ministre de l’Égalité des genres et du Développement de l’enfant, Aurore Perraud, a annoncé qu’un durcissement des lois est envisageable en ce qui concerne la violence domestique. Est-ce une solution ?
C’est important si ça peut aider réellement les femmes et les enfants qui souffrent.
Rita Venkatasawmy, fondatrice et directrice du Centre d’éducation et de développement pour les enfants mauriciens (CEDEM), est la nouvelle Ombudsperson for Children. Que pensez-vous de cette nomination ?
C’est the right person at the right place. J’ai toujours admiré cette femme, son engagement. J’ai suivi ses différentes actions. Je suis sûre que si elle est appelée à nous aider, elle le fera.
Quel est le profil des femmes qui s’engagent dans votre association ?
Des femmes actives au sein de leurs quartiers. Elles sont femmes au foyer, secrétaires médicales, employées dans les ressources humaines, dans les centres sociaux ou œuvrent déjà dans des ONG.
Les autres associations – et il y en a pas mal dans cette région – n’arrivent pas à relever les défis que vous vous êtes fixés...
Chaque association a son domaine d’activité et sa bonne volonté. Les régions dont nous nous occupons demandent un peu plus d’attention.
Vous parlez des faubourgs de Port-Louis…
Pendant longtemps, ces régions-là ont été considérées comme liées à la drogue, comme un concentré de tous les fléaux possibles. Quand on disait à quelqu’un «J’habite à Roche-Bois», la personne pensait trafic de substances illicites et insécurité. Si on disait qu’on habitait à Plaine-Verte, les gens imaginaient une femme enfermée chez elle et qui ne travaillait pas. Les choses changent. D’ailleurs, les réunions de l’association sont nocturnes : toutes les femmes sont présentes et elles ne sont pas en danger.
Mais selon certaines personnes, il y a quand même une part de vérité…
Cette réalité date de plusieurs années. J’habite Roche-Bois et l’environnement a vraiment évolué. Les habitants veulent progresser et ils s’en donnent les moyens.
Vous êtes membre du Muvman Liberater (ML) et conseillère municipale de Port-Louis… Est-ce que le fait d’appartenir à un parti membre de l’alliance au pouvoir facilite les choses ?
Pas vraiment ! Nous ne souhaitons pas que ce mouvement soit politisé. C’est une initiative citoyenne de la part de femmes de la localité. Le but n’est pas d’être une antenne d’un parti. Nous voulons aider et avoir comme membres des personnes de tous les bords politiques. Nous ne voulons pas que, demain, on dise que nous sommes des protégées.
Comment s’opère le financement ?
Les membres contribuent tous les mois. Nous recherchons des sponsors pour certains de nos événements. Mais le plus souvent, ce sont les membres qui participent en apportant des choses à boire ou à manger. Pour notre journée de Noël, ce sont les membres qui ont financé l’achat des cadeaux pour les enfants. Être proche du gouvernement ne nous sert donc à rien.
Anil Gayan, également membre du ML, a menacé d’initier une commission d’enquête sur les ONG, leur financement, leur fonctionnement et leurs agissements. Qu’en pensez-vous ?
Je préfère m’abstenir de tout commentaire.
Shalina Maumoondee a 29 ans et est originaire de Rose-Hill. Elle habite Roche-Bois depuis son mariage et travaille dans les ressources humaines pour une société de fret. Elle est membre de l’associationFemme Liberater, mais aussi celle qui a permis que ce mouvement de femmes se structure et s’enregistre auprès du Registrar of Associations. Lors des élections générales de 2014, elle s’est engagée auprès du Muvman Liberater parce que c’était «un parti sans antécédents et qui évolue». Élue conseillère municipale à Port-Louis cette année, elle fait de la politique pour concrétiser une de ses ambitions : faire du social et aider les jeunes.
Quelle actualité locale a retenu votre attention ?
Le Mauricien à Daech qui fait des vidéos pour lancer un appel aux musulmans de Maurice. Ça m’a donné froid dans le dos. Je me demande si toute cette vague de haine va atteindre Maurice. Et quel impact ce message aura sur les gens autour de nous.
Et sur le plan international ?
Tout ce qui se passe autour du terrorisme après les attentats en France. Je regarde France 24tous les soirs. J’ai vu un reportage qui explique comment certaines personnes sont stressées, ne veulent plus sortir de chez elles. J’ai des amis qui sont en France et je me demande comment les gens continuent à vivre avec cette peur.
Que lisez-vous actuellement ?
A child called «It» de Dave Pelzer. Il s’agit d’une biographie qui raconte l’enfance martyrisée de l’auteur. Sa maman qui était alcoolique lui faisait subir des violences. C’est un livre très émouvant.
Femme Liberater se penche actuellement sur le grand événement de la fin de l’année. Le Noël de Rêve pour les enfants issus de milieux défavorisés le 22 décembre. Au programme : un spectacle inspiré des personnages de Walt Disney, des danses, des poèmes et des chants de Noël.
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