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18 janvier 2016 02:17
Le brasdroit complètement plâtré, la partie inférieure du corps cachée sous un drap, Mathieu fait peine à voir. Ce mercredi 13 janvier, une petite foule constituée de parents et d’amis se presse autour de son lit à l’hôpital de Flacq. Ils sont tous là pour prendre de ses nouvelles et le soutenir. Mathieu Vigoureux, âgé de 28 ans, leur en est reconnaissant et essaie de faire bonne figure. Mais c’est difficile. Très difficile.
Il y a quelques jours, il a dû subir l’amputation de son pied droit, à partir du tibia, en plus de ses autres blessures, dont de sérieuses fractures au bras droit. Sa fiancée, Courtney Patient, souffre, elles, de plusieurs fractures à la jambe droite. Ils étaient à moto quand une voiture les a heurtés et jetés violemment à terre. Le chauffeur ne s’est pas arrêté. C’était le 2 janvier, vers 19h15, à Grande-Retraite.
Onze jours plus tard, ce même mercredi, le jeune habitant de Pont-Praslin a appris avec soulagement que celui qui a bien failli les tuer, Courtney et lui, a été arrêté. Au réveil, ce jour-là, un agent de police est venu lui annoncer la nouvelle. Le chauffard présumé est un policier. Âgé de 26 ans et habitant Réduit, il est affecté au poste de Sodnac. Il a été appréhendé par ses collègues le mardi 12 janvier.
Ce mercredi a décidément été une journée riche en émotions pour Mathieu Vigoureux. Il a aussi eu le bonheur de revoir sa fiancée après dix jours de séparation. Aidée du personnel soignant, Courtney a tenu à venir le voir pour lui remonter un peu le moral même si elle-même est au plus mal depuis l’accident.
Les deux jeunes gens sont traumatisés et marqués à vie par ce terrible événement. Mathieu est surtout très en colère contre le policier accusé dans cette affaire. «Ma fiancée et moi avons failli mourir par sa faute. Ma vie est complètement brisé. Mon existence ne sera plus jamais la même. Et celle de Courtney non plus.»
Il devra désormais continuer son existence avec un seul pied, apprendre à vivre avec ce handicap. «On dit que le temps panse les blessures mais la mienne restera à jamais béante», lance-t-il. Et dire, dit-il, qu’il a tout fait pour éviter la collision avec la voiture. En vain.
En ce deuxième jour de l’année, Mathieu était invité à dîner avec Courtney chez sa marraine, à Bramsthan. Le couple a quitté Pont-Praslin vers 19 heures. «L’accident s’est produit à Grande-Retraite dans une grande descente. Je roulais normalement lorsque, tout à coup, je me suis retrouvé face à une voiture qui en doublait une autre», raconte le jeune homme.
Une fraction de seconde plus tard, c’est le drame. «En voyant la voiture foncer sur nous, je me suis rabattu complètement à gauche de la route et j’ai fait de mon mieux pour éviter le choc frontal mais la voiture nous a quand même renversés. Le conducteur ne s’est pas arrêté. Celui qui conduisait la voiture qu’il était en train de doubler ne s’est pas arrêté non plus», explique Mathieu qui fait des petits boulots pour gagner sa vie.
Terrassé par la douleur, il peine à se relever. «Mon pied droit était complètement écrasé et je ne pouvais pas bouger mon épaule droite. Ma fiancée était également blessée à la jambe droite. Je hurlais de douleur. Quand Courtney a vu des phares se rapprocher, elle a appelé à l’aide et un véhicule s’est arrêté. La police et l’ambulance sont arrivées par la suite. Les souvenirs de ces moments-là sont assez flous dans ma tête car je souffrais trop le martyre», précise Mathieu.
Outre l’amputation de son pied droit, le jeune homme a subi une délicate intervention chirurgicale à l’épaule, au bras et à la main droites : «Ena plak, feray ek vis partou. Mo pa mem kone si mo pou kapav servi mo lame kouma avan. Kouma mo pou travay aster. Mo ti pe fer mason, pint ou mason ros. Mo pa mem kone kan mo pou sorti lopital. Bann dokter pe dir fode mo ple sek avan.»
Mathieu est persuadé que cet accident aurait pu être évité : «celui qui conduisait cette voiture n’aurait pas dû doubler dans une montée et en plus à un endroit où il y a une ligne blanche. Et pourquoi n’a-t-il pas freiné lorsqu’il nous a vus ? On portait des gilets réfléchissants, il n’a pas pu ne pas nous voir.»
Courtney parle également des circonstances de cet accident avec beaucoup de colère. «Ce qu’a fait ce chauffeur est impardonnable. Il ne s’est même pas arrêté pour constater les dégâts. Il a préféré prendre la fuite alors qu’il connaît bien les lois et les conséquences lorsqu’on ne les respecte pas. Des témoins ont heureusement pu relever son numéro d’immatriculation. Je les remercie beaucoup.»
Après la collision, Courtney a fait preuve de beaucoup de courage. Elle s’est redressée tant bien que mal malgré sa jambe fracturée en plusieurs morceaux pour appeler à l’aide. «Mathieu était à côté de moi et c’était terrible de le voir souffrir ainsi. J’avais la jambe complètement de travers mais j’ai dû prendre mon courage à deux mains, malgré l’intense douleur, pour essayer de me relever», relate-t-elle.
C’est dans un véhicule de la police qu’elle a été emmenée à l’hôpital ce soir-là alors que Mathieu a été transporté dans une ambulance car il avait perdu beaucoup de sang. «Je suis très triste pour lui. C’est terrible ce qui lui arrive, surtout à quelques mois de notre mariage», s’insurge cette jeune fille originaire de Poste-de-Flacq.
Courtney et Mathieu vivent ensemble depuis le 1er juin 2015, avec l’accord de leurs parents respectifs. Ils avaient plein de projets ensemble, dont le plus grand était, dans un premier temps, de se marier civilement le 14 mai, le jour où la jeune fille aura 16 ans. Mais cet accident est venu mettre tous leurs projets et rêves entre parenthèse. Courtney devra rester alitée pendant au moins six mois, le temps que sa jambe aille mieux. Mathieu devra garder le lit encore plus longtemps et ensuite se livrer à un rude apprentissage de la vie sans un pied et avec un bras dont il n’est pas sûr qu’il pourra fonctionner comme avant. Un long calvaire se dessine devant ces deux jeunes qui rêvaient d’une vie de bonheur…
Magen Ramasawmy a retrouvé la liberté le jeudi 14 janvier, deux jours après son arrestation. Il a fourni une caution de Rs 8 630 et signé une reconnaissance de dette de Rs 15 000 devant le tribunal de Flacq. Il avait été arrêté deux jours plus tôt. Ce jeune homme de 26 ans, habitant Réduit, devra se rendre au poste de police de Moka chaque samedi selon les conditions de sa remise en liberté sous caution. Le soir de l’accident, ce policier affecté au poste de police de Sodnac conduisait la voiture qui a fauché Mathieu et Courtney. Selon la police, la voiture appartient à un habitant de Trou-d’Eau-Douce. Magen Ramasawmy se refuse à tout commentaire, selon son homme de loi, Me Siven Tirvassen. L’avocat souligne même que son client a demandé à la police que le contenu de sa déposition ne soit pas divulgué ou commenté dans la presse. Me Tirvassen indique que le jeune homme fait l’objet d’une charge provisoire d’«involontary wounds & blows». Il précise que Magen Ramasawmy «s’est sauvé»le soir de l’accident car «il avait peur».
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