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5 octobre 2025 13:10
Aux petites heures du matin, Mark Yeung Shi Yin, propriétaire de Marks Aquarium, est retrouvé mort dans sa résidence, ligoté, poignardé et partiellement carbonisé après un incendie criminel. Un de ses fils, un mineur présent sur les lieux au moment des faits, réussit à s’échapper. La police procède à l’arrestation de son grand frère dans cette affaire. Il est soupçonné d’être impliqué dans ce meurtre horrible. Trois autres personnes, dont un mineur, sont également en détention. Pascal Barry, un des suspects, avoue sa participation. Le mobile serait lié à un conflit d’héritage et d’argent. Le drame choque toute l’île car le défunt était très connu. Récit.
Il y a des nuits qui marquent à jamais. La nuit où Mark Yeung Shi Yin, 74 ans, un patriote, un ancien professeur de chimie, un pionnier respecté dans le domaine de l’importation de poissons exotiques et autres matériels pour les aquariums, a été ligoté, poignardé et brûlé vif dans sa propre maison de Baie-du-Tombeau est de celles qui brisent quelque chose au plus profond de nous. Ce n’est pas un banal fait divers. Il s’agit d’un autre meurtre d’une cruauté sans nom, d’un drame qui glace le sang : un père assassiné, sa maison incendiée, son corps carbonisé… et, insoutenable vérité, un fils aîné accusé d’avoir planifié l’horreur. Cette affaire fait d’ailleurs le buzz depuis le jeudi 2 octobre.
Aux petites heures du matin ce jour-là, des intrus pénètrent au 35, avenue des Roses. Mark et son fils mineur de 16 ans sont ligotés. Le jeune parvient à se libérer, à courir chercher de l’aide. Mais quand les secours arrivent, il est trop tard : son père est retrouvé sans vie, son cou tranché, son corps livré aux flammes. L’autopsie révèle qu’il a succombé à une stab wound over the neck. Un vieil homme poignardé avant d’être réduit en cendres. Et derrière ce massacre, l’enquête dévoile l’impensable : le propre fils de la victime, Chris Allan Yeung Shi Ying, 42 ans, aurait loué une voiture, recruté des complices, planifié le drame. Ses aveux aux enquêteurs glacent le sang : «Mo ti ansam ek zot, me mo pa finn rant dan lakaz.»
Comme si rester dehors effaçait pour lui la trahison d’avoir livré son père à ses bourreaux ce matin-là. Avec lui, une bande improbable : un jeune de 18 ans, un mineur de 16 ans et un homme de 23 ans. Ce cambriolage ayant, semble-t-il, mal tourné aurait pour toile de fond une affaire d’argent pour un héritage. Un père sacrifié par un fils qui aurait des addictions. À Baie-du-Tombeau, c’est la consternation. Des pleurs, de la colère, un sentiment d’abandon. Brian Ng, conseiller du village, lance un cri d’alarme : «Ce drame n’est pas un hasard. Baie-du-Tombeau est abandonné. Le poste de police manque cruellement d’effectifs. Chaque fois qu’on appelle, il faut attendre des renforts d’ailleurs. Entre-temps, nos problèmes s’accumulent.»
Comment ne pas voir, dit-il, dans ce crime atroce le reflet d’une société où la loi et l’ordre s’effritent, où la police est dépassée, où l’insécurité s’installe jusque dans nos foyers ? Il en profite pour attirer l’attention des autorités. «Je lance un appel au commissaire de police pour revoir l’effectif au poste de police de Baie-du-Tombeau. Je viens d’avoir une rencontre avec la police de la localité, le 26 septembre. Ceux présents ont sollicité mon aide. Ils ont soulevé le manque d’effectif. J’ai déjà abordé le sujet avec le député Kaviraj Rookny. Il m’apporte son soutien. Il m’a fait comprendre qu’il va adresser un Parliamentary Question à ce sujet au Parlement ce mardi à la reprise des travaux», précise le jeune homme qui est également vice-président du conseil de district de Pamplemousses.
«Horrible»
Sulakshna Ranjeet, aspirante en politique et proche de Mark, est également très bouleversée par ce terrible drame. «C’est un choc terrible. Toute vie a son importance. Mais que Mark ait connu une fin aussi horrible et que son propre fils soit impliqué, c’est révoltant», regrette la jeune femme. Elle rappelle que Mark n’était pas seulement un entrepreneur, mais un esprit brillant, un patriote. Jusqu’à ses derniers jours, il rêvait d’une île plus sûre, d’un État fort : «Maurice vit aujourd’hui ce que Singapour a connu dans les années 70. Lee Kuan Yew a choisi la fermeté et des lois strictes. C’est pour cela qu’encore aujourd’hui, un père singapourien peut dormir tranquille quand sa fille de 13 ans sort seule à minuit.»
Sulakshna ne mâche pas ses mots après le crime odieux contre son ami : «La drogue détruit nos familles. La violence gangrène notre jeunesse. Il faut des lois strictes. Il faut frapper fort. Je suis pour la réintroduction de la peine de mort.» Les circonstances entourant la fin atroce de Mark Yeung Shi Yin ne sont pas seulement celles de quelques individus, dit-elle. Il est aussi le miroir effrayant de nos faiblesses collectives. Un père sacrifié par son fils pour de l’argent. Un village qui crie à l’aide face à une police sous-équipée. Une jeunesse happée par la drogue, par la violence, par la facilité. Ce drame nous hurle une vérité insupportable. Maurice est en train de perdre son âme, avance Sulakshna, déterminée à tout changer avec ses convictions en politique.
L’affaire Yeung Shi Yin est un véritable électrochoc pour sa famille et son entourage ainsi que tous ceux qui le connaissaient bien. Difficile de se contenter de pleurer Mark et de tourner la page. Ce crime doit marquer un avant et un après, martèle pour sa part Brian Ng. Parce que si un travailleur infatigable peut finir ainsi, que vaut la sécurité du citoyen ordinaire, se demande le vice-président du conseil de district de Pamplemousses. Il lance un pressant appel aux autorités pour que les villages ne soient pas abandonnés. Au cas contraire, le prochain drame n’est qu’une question de temps, dit-il. «L’assassinat de Mark Yeung Shi Yin n’est pas seulement un crime. Nous devons crier haut et fort que trop, c’est trop», confie le jeune homme.
La veillée funèbre en l’honneur de Mark Yeung Shi Yin a eu lieu vendredi et les funérailles samedi. Il repose désormais au cimetière de Bois-Marchand.
Le fils aîné avoue être le commanditaire
Le jeudi 2 octobre, Baie-du-Tombeau s’est réveillé dans l’horreur. Yeung How Fat Yeung Shi Yin, 74 ans, plus connu comme Mark, propriétaire de Marks Aquarium, a été retrouvé mort à son domicile. Rapidement, la police a déployé plusieurs unités sur le terrain. Caméras de surveillance passées au crible, voisinage interrogé, informations croisées avec le système Safe City : les enquêteurs ont multiplié les pistes.
Très vite, une révélation fracassante : une Hyundai grise, liée au drame, avait été louée par Chris Allan Yeung Shi Ying, le fils aîné de la victime. L’agence de location a confirmé un accord, signé de sa main. Une opération éclair a été montée et Chris Allan Yeung Shi Ying a été arrêté à Beau-Plan, avant d’être confié aux enquêteurs de la Major Crime Investigation Team. Les arrestations se sont alors enchaînées. Wayne Jean Pascal Barry, 18 ans, voisin de la victime, puis, un ado de 16 ans, ont été interpellés à Baie-du-Tombeau.
Le lendemain, la police a mis la main sur un quatrième suspect : Dylan Aimé, 23 ans, originaire de Bambous. Lors de son interrogatoire, Chris Allan Yeung Shi Ying a fini par avouer. C’est lui qui a planifié le cambriolage de la maison de son père, avec l’aide de sa bande. Mais il jure qu’il n’est jamais entré à l’intérieur, restant dans la voiture avec un complice. Selon lui, ce n’était qu’un «vol qui a mal tourné». La police est sur la piste d’un cinquième suspect.
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