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Agressions sexuelles en milieu carcéral

7 juillet 2015

Le commissaire des prisons, Jean Bruneau, nous en dit plus sur le sujet.

On en parle très peu, voire pas du tout, sauf que les agressions sexuelles en milieu carcéral est un sujet qui ne peut être évité. Il y a souvent des rumeurs en ce sens mais souvent, cela ne va pas plus loin. Toujours est-il que ce serait bel et bien la réalité dans les prisons. D’ailleurs, ce sujet particulièrement tabou est abordé dans la dernière newsletter du directeur des poursuites publiques (DPP). Dans ce document, il est mentionné que la sodomie, souvent sans consentement, est un fait courant dans les centres pénitentiaires et que les cas ont été rapportés à plusieurs reprises par les autorités concernées à la police.

 

Viol, sodomie, agression sexuelle… Si nous sommes nombreux à penser que ces termes veulent tous dire à peu près la même chose, il est important de les distinguer clairement l’un de l’autre avant de poursuivre. Car la loi mauricienne les catégorise. Alors que le viol, condamnable à une peine de prison allant jusqu’à cinq ans, n’est pas défini exactement dans la législation mauricienne, la sodomie, punie par un emprisonnement pouvant aller de 10 à 40 ans, est considérée, souligne le DPP, comme «le seul acte de pénétration perpétré sur un homme qui serait, aux yeux de la loi mauricienne, condamnable». L’agression sexuelle, elle, est définie comme un geste à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, commis par un individu sans le consentement de la personne visée.

 

Cela étant dit, derrière les murs de la prison, indique une source anonyme, les abus sexuels seraient fréquents mais peu rapportés, les victimes ayant peur des représailles. Si tel est le cas, les responsables des prisons sont-ils au courant du nombre de cas commis au cours de ces dernières années ? «Il se pourrait qu’il y ait des relations sexuelles avec ou sans consentement entre détenus comme cela existe dans toutes les prisons du monde.  Mais nous ne pouvons agir que quand un cas est rapporté», avance le commissaire des prisons, Jean Bruneau. Ainsi, selon ce dernier, un seul cas de sodomie a été officiellement rapporté depuis qu’il a pris les commandes des services pénitentiaires en décembre 2010. Par contre, quelques cas d’agressions sexuelles ont été signalés mais «la police, après enquête, a déduit qu’il n’y avait pas eu de sodomie», ajoute-t-il.

 

Une fois que le cas est rapporté, le responsable de l’institution, puisqu’il ne peut en être autrement, déclenche une procédure bien rodée : «Après une brève enquête interne, il informe aussitôt la police, s’étant assuré au préalable que toutes les pièces à conviction sont préservées. Le temps que la police débarque, notre personnel médical fournit les premiers soins à la victime.  Le présumé agresseur est mis en garde à vue jusqu’à son interrogation et son examen par la police et le médecin légiste», explique Jean Bruneau.

 

Surpopulation

 

À partir de là, l’une des priorités des responsables des prisons est de s’assurer que la victime reçoive un traitement médical approprié, que ce soit à la prison ou à l’hôpital, et un suivi psychologique. Le détenu est aussi encadré par les officiers du département bien-être de la prison, les ONG et un psychologue. «Il est aussi pris en charge par l’association Befrienders qui le conseille au cas où il aurait des idées de suicide», souligne le commissaire des prisons alors que l’agresseur présumé est placé seul dans une cellule et ses mouvements surveillés.

 

Puisque les responsables de la prison peuvent agir uniquement lorsqu’un cas est officiellement rapporté, la prévention se résume à quelques mesures de précaution. «Les détenus sont sensibilisés aux risques qu’ils encourent en se livrant à de telles pratiques», déclare le commissaire des prisons.

 

Le fait de placer plusieurs détenus dans une même cellule n’encourage-t-il pas cette pratique ? «En raison de la surpopulation en milieu carcéral, les détenus étaient gardés en cellule par groupe de trois au minimum, en fonction de l’espace disponible. La nouvelle politique est d’avoir un détenu par cellule tout en encourageant l’utilisation des dortoirs», explique Jean Bruneau. Si tel est le cas, ces dortoirs seront-ils mieux surveillés pour prévenir les cas de sodomie et aussi d’agression sexuelle tout court, sachant que cette dernière n’est pas punie par la loi quand la victime est un homme ? La question reste posée.

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