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30 mai 2017 12:58
Son visage en dit long sur sa souffrance. Assis dans un coin sur sa terrasse, les jambes cachées sous un plaid, Vishal est perdu dans ses pensées. Il semble impassible au va-et-vient des proches présents pour une séance de prière (servis trwa zour) en ce mercredi 24 juin après-midi. La veille, ce chauffeur d’autobus a retrouvé la liberté après avoir fourni une caution et signé une reconnaissance de dette. Il fait l’objet d’une accusation provisoire d’homicide involontaire après la mort de sa fille Astha, 6 ans, dans un accident de la route, le dimanche 21 mai. Père et fille se trouvaient à moto quand le drame s’est produit à quelques mètres de la demeure familiale.
Vishal raconte qu’il venait de rentrer du travail ce jour-là lorsque sa fille lui a demandé de l’emmener faire une virée à moto. «Ma fille et moi étions très complices. Je ne pouvais rien lui refuser. On a mis nos casques. Elle s’est mise devant moi, les mains sur le guidon de la Yamaha 50. Mes mains étaient sur les siennes. Je précise que c’est bien moi qui pilotais la moto. Je regrette qu’elle soit morte dans cet accident», confie cet homme de 36 ans, les larmes aux yeux.
L’accident s’est produit sur le chemin du retour. «Nous étions à 300 mètres environ de la maison. Il y a eu un bruit dans le moteur. Puis, la moto a perdu l’équilibre et a heurté la rampe. Je suis tombé dans un caniveau et ma fille sur l’asphalte. Des amis qui lavaient leurs voitures près d’un canal sont venus à notre secours. J’ai insisté pour qu’on emmène d’abord ma fille à l’hôpital car elle s’était blessée à la tête.»
C’est le père de Vishal qui transporte la petite Astha à l’hôpital de Flacq. «Mon père m’a dit qu’elle n’arrêtait pas de se plaindre car elle souffrait de ses nombreuses blessures. Elle criait et nous cherchait, mon épouse et moi, avant de perdre connaissance.» À l’hôpital, son décès est hélas constaté. Ses funérailles ont eu lieu le lendemain et son père a pu y assister sous escorte policière car il était sous le coup d’une arrestation pour homicide involontaire. Il avait auparavant reçu des soins à l’hôpital pour des blessures à la cheville et au genou gauche, entre autres.
Mais la vraie blessure, celle qui saigne atrocement, c’est celle qui fend son cœur à chaque seconde : «Ce n’est pas la première fois que ma fille se met devant moi sur la moto. On le fait presque tous les jours lorsque je rentre du travail. Et nous mettions toujours nos casques. Ce jour-là, je roulais à peine à 20 km/h. Nous étions sur une ligne droite. Je ne comprends toujours pas comment ce drame a pu se produire.»
Astha laisse aussi derrière elle sa mère Neelam et son frère aîné qui a 10 ans, eux aussi effondrés. En 12 ans de vie commune, Vishal et Neelam ont toujours œuvré pour le bien-être de leurs enfants. «Mo ti pe travay dir pou zot. Mo ti bien pros ek mo tifi. Toulezour nou lev ansam. Mo ti oblize donn li so bizou avan al travay ek kan mo retourn lakaz mo ti bizin fer li fer enn letour. Mo regret seki finn arive. Dimounn pe koz enn ta koze san kone dan ki soufrans mo ete», confie Vishal.
Certains disent qu’il avait pris la route ce jour-là sous l’influence de l’alcool. Ce que Vishal nie catégoriquement : «Je venais à peine de rentrer d’une dure journée. Je conduis un autobus individuel plusieurs fois la semaine sur le trajet Port-Louis-Sébastopol. J’étais terriblement fatigué. Je suis sorti à nouveau à moto pour ne pas déplaire à ma fille. Je demande aux gens d’arrêter de faire des commentaires désagréables. Notre famille est déjà dans une grande souffrance.»
Le personnel hospitalier lui avait prélevé du sang lors de l’admission pour déterminer s’il avait bu de l’alcool car la police n’avait pu lui faire le breath test. Les enquêteurs attendent un rapport du Forensic Scientific Laboratory pour être fixés à ce sujet.
Tout laisse croire qu’il rentrait chez lui au moment du drame. Le van que conduisait Cédric Farrell, un habitant de Cassis, a fini sa course contre les handrails non loin du pont de Grande-Rivière, en direction de Port-Louis, le dimanche 21 mai. Selon le rapport d’autopsie, le jeune homme de 28 ans est mort après avoir aspiré le contenu de son estomac. Pour sa famille, c’est sans doute une énième crise d’asthme qui a causé cela. «Mon fils travaillait à son compte. Il louait un minibus pour faire des courses. Il devait en effectuer une à 9 heures à Pointe-aux-Sables. Je pense qu’il rentrait à la maison lorsqu’il a eu une crise. Il était asthmatique. Il n’a pas succombé à ses blessures après l’accident comme le disent certaines personnes. Je pense qu’il a fait la collision en voulant s’arrêter lorsqu’il a fait sa crise», souligne sa mère Claudia. La victime laisse derrière elle une veuve et un fils d’un an et demi.
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