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18 mai 2015 14:28
Dimanche 10 mai, 16h55. Le paisible après-midi de Nazir Aubeeluck est troublé quand il apprend qu’une violente dispute a éclaté chez sa sœur Rasida. C’est une voisine qui a dit à sa fille que la sexagénaire était une nouvelle fois rouée de coups par son époux Azad Rujbally, 65 ans. Nazir et d’autres membres de la famille se précipitent sur place pour découvrir la femme de 61 ans dans une mare de sang. «Elle était à demi-consciente. Elle était complètement trempée. Il semble que mon beau-frère l’a aspergée de glaçons et d’eau froide», explique Nazir, un habitant de Caroline, tout comme sa sœur.
Azad se trouve alors dans la rue. Avertis par des voisins, des policiers de la région arrivent sur les lieux et procèdent à l’arrestation de l’époux de la blessée. Pendant ce temps, Nazir et les siens transportent d’urgence Rasida à l’hôpital de Flacq. «Elle était à bout de souffle et n’arrivait plus à parler. Elle a toutefois réussi à nous faire comprendre que son époux l’avait, une fois de plus, tabassée parce qu’elle avait refusé de vendre l’un de ses terrains comme il l’avait exigé», raconte Nazir.
Tandis que la voiture qui l’emmène à l’hôpital arrive à Ecroignard, Rasida Aubeeluck rend son dernier souffle dans les bras de sa sœur Naima. À l’hôpital, le personnel soignant ne peut que constater son décès. Une autopsie est pratiquée peu après. La sexagénaire a succombé à un arrêt cardiaque, selon le rapport du médecin légiste. Les funérailles de la victime ont eu lieu le lendemain.
Ce même jour, Azad Rujbally comparaît devant le tribunal de Flacq où une accusation provisoire de non-assistance à personne en danger est logée contre lui. L’homme, qui serait bien connu des services de police pour avoir été arrêté et condamné pour divers cas de vol et autres délits, est ensuite reconduit en cellule, car la police a objecté à sa remise en liberté sous caution.
Calvaire
Pendant ce temps, les proches de Rasida pleurent le départ tragique de celle qui illustre le visage de ces femmes battues qui restent aux côtés de leurs époux malgré les nombreuses violences conjugales qu’elles subissent et qui, pour certaines, finissent par y laisser la vie. Le calvaire de Rasida, à en croire ses proches, ne datait pas d’hier. Cela faisait des années que cette maman d’un fils handicapé de 21 ans était victime des coups de son mari.
Azad Rujbally a déjà été arrêté et condamné pour vol et d’autres délits.
Tout a commencé après leur mariage religieux (nikah) en 1993. Azad, originaire d’un village du Sud, avait déjà contracté le nikah auparavant avec une autre femme et a deux fils de ce mariage. «Au début, Rasida nous parlait des violences dont elle était victime. Puis, elle a cessé de le faire, car elle avait peur du qu’en-dira-t-on. Elle a consigné plusieurs plaintes à la police pour dénoncer son mari. Mais elle les retirait, car son époux arrivait toujours à la convaincre de lui pardonner et disait qu’il allait changer de vie», se souvient Nazir, amer.
Tout le monde, poursuit-il, demandait à Rasida de quitter son mari et lui disait que ça allait mal finir un jour. Mais elle refusait de le faire. Par amour pour lui et pour le bien-être de son fils. «Elle disait que son fils, Taamir, qui souffre d’un handicap moteur sévère et est alité depuis sa naissance, allait souffrir davantage de cette séparation.»
Selon Nazir, son beau-frère se disputait toujours avec son épouse concernant les terrains familiaux que celle-ci avait reçus en héritage et qu’il voulait vendre. «Ma sœur a trois terrains, un de 84 perches, un autre de 12 perches et un dernier de 15 perches sur lequel est construit leur maison à la rue Descombes, Caroline. Azad voulait se marier civilement à ma sœur pour avoir la mainmise sur ses biens. Cependant, elle a toujours refusé. Voilà pourquoi elle était souvent battue.»
L’homme était d’autant plus violent, à en croire Nazir, qu’il se droguerait. «Il avait de mauvaises fréquentations qu’il ramenait souvent chez lui et avec lesquelles il se droguait, parfois même sous son toit, en prenant les médicaments de son fils. Azad les revendait aussi à d’autres drogués pour se faire de l’argent. Il n’hésitait pas non plus à récolter de l’argent illégalement aux abords des lieux de culte, en présentant le certificat médical de son fils. Quand ma sœur lui reprochait tout cela, elle prenait des coups», souligne Nazir, remonté.
Il affirme aussi que son beau-frère a été arrêté et condamné à plusieurs reprises dans des affaires de vol, de drogue et d’agression. Cette fois, c’est pour non-assistance à personne en danger. Et toute la famille de Rasida espère qu’il paiera pour tout le mal qu’il lui a fait ainsi que pour sa mort. Car pour elle, il ne fait aucun doute qu’il est à l’origine de la mort de cet être cher, qui leur a été enlevé brutalement.
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