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24 août 2016 02:56
Allongée sur son lit à l’hôpital Jeetoo, Ameera Kerdally souffre le martyre. Durant les derniers jours, elle a subi deux interventions chirurgicales et est placée sous perfusion. À ses côtés, celui qu’elle a épousé religieusement il y a peu multiplie les attentions à son égard. Abdool Hafiz Haujee fait de son mieux pour soutenir sa femme dans ce moment difficile qu’il vit aussi très mal. «Elle aurait dû être chez nous et en bonne santé», soupire-t-il, triste et révolté. «Nous n’avons jamais voulu nous débarrasser de notre enfant. Au contraire. On voulait devenir parents et construire une famille ensemble.»
Abdool Hafiz Haujee accuse un gynécologue d’avoir prescrit une dizaine de comprimés abortifs à sa femme Ameera. Ce, allègue-t-il, dans le seul but de pouvoir ensuite faire un curetage à la jeune femme dans une clinique privée contre une somme de Rs 40 000.
Selon Ameera, tout a commencé le 4 août. «J’avais du retard concernant mes règles et je suis allée voir mon gynécologue. Il m’a donné rendez-vous le jour suivant pour des tests et j’ai eu les résultats le lendemain. Il m’a alors annoncé que j’étais enceinte de cinq semaines», explique Ameera qui s’attendait, dit-elle, à cette nouvelle. «J’étais très excitée car mon époux et moi voulions avoir un bébé. J’ai un fils de 3 ans d’un précédent mariage. Mais Abdool, lui, n’a pas d’enfant. Son rêve est de fonder une famille avec moi.»
Sur place, raconte la jeune femme, le medecin lui aurait fait une injection. «Il m’a dit que c’était pour empêcher une fausse couche. Pou ranforsi mo lerin.»Le gynécologue lui aurait aussi prescrit des pilules : «Je ne savais pas que c’était des pilules abortives. Il m’a précisé que je trouverais ces médicaments chez un pharmacien à Sainte-Croix.»Son époux s’est chargé d’aller acheter les pilules le lendemain. «Je n’avais jamais entendu parler de ces pilules avant cela. Et je ne connaissais pas les conséquences qu’elles pouvaient avoir sur une femme enceinte», soutient Abdool Hafiz Haujee.
Ameera, poursuit-il, a commencé à éprouver d’atroces douleurs dans la nuit du 6 août. «Lundi, elle a commencé à cracher du sang. Je l’ai emmenée chez le gynécologue qui lui a fait une échographie. Nous avons eu un choc lorsqu’il nous a appris que le fœtus était devenu un caillot de sang et qu’il fallait faire un curetage d’urgence dans une clinique pour la somme de Rs 40 000. Je lui ai dit qu’on n’avait pas cette somme et de nous donner un certificat pour qu’on aille à l’hôpital. Mais il a refusé, arguant que ma femme n’aurait pas les soins nécessaireslà-bas.»
C’est à ce moment-là que le couple aurait eu des doutes sur le gynécologue. «On a commencé à se poser des questions sur l’injection et les pilules. C’est à travers notre entourage qu’on a su que c’était des pilules abortives. Pour avoir des preuves que le médecin nous avait tendu un piège, nous sommes allés à son cabinet munis d’une caméra cachée.»
Sur la vidéo, on voit Ameera dire au médecin :«Je ne suis jamais venue vous voir pour un avortement.»Le gynécologue reste silencieux avant de répondre : «On doit faire un nouveau test sanguin. On attend trois jours avant de voir la marche à suivre.»Ameera, elle, insiste sur son état de santé. «Je vais très mal docteur, il me faut un papier pour aller à l’hôpital.»Mais le gynécologue continue d’insister pour que sa patiente attende quelques jours. Ensuite, il lui lance «akoz ou la tet monn donn ou sa, monn anvi ed ou», se référant ainsi aux problèmes psychiatriques dont souffre sa patiente.
Au final, c’est la police de Plaine-Verte qui a conduit la jeune femme à l’hôpital Jeetoo dans la nuit du 11 août. Une enquête a aussi été ouverte. «La licence de ce médecin doit être révoquée. On va le poursuivre pour obtenir réparation car il a abusé de la naïveté de mon épouse. Depuis le 4 août, j’ai dépensé beaucoup d’argent chez ce gynécologue», avance Abdool Hafiz Haujee qui conclut tristement : «Il a brisé mon rêve de devenir père.»
Nous avons essayé d’avoir la version du gynécologue sans succès. Il nous a donné rendez-vous vendredi à son cabinet mais était absent à notre arrivée. Depuis, il n’a plus répondu à nos appels.
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