Publicité
30 mars 2015 15:54
Son geste désespéré a surpris tout le monde. L’avocat Bala Padiachy, 47 ans, s’est suicidé en s’immolant par le feu dans sa villa de Flic-en-Flac. C’est la femme de ménage qui a découvert le corps en prenant son service, le mardi 24 mars. Ce jour-là, l’employée de maison constate que la porte de la cuisine de son patron est ouverte. Puis, c’est le choc. Elle voit un homme allongé au sol au fond du garage. En approchant, elle reconnaît Bala Padiachy. Il porte des blessures au visage et sur le corps. Paniquée, elle alerte la police qui arrive sur place rapidement.
Dans un premier temps, les enquêteurs pensent avoir un nouveau crime sur les bras, en raison d’un morceau de tissu légèrement attaché à la bouche de l’homme de loi. Toutefois, la forte odeur qui plane dans l’air leur fait privilégier une autre explication. Tout semble en effet indiquer que l’avocat s’est aspergé d’essence avant de craquer une allumette. L’autopsie confirmera cette thèse en attribuant la cause du décès à une asphyxie provoquée par la fumée.
Les funérailles de Bala Padiachy ont eu lieu mercredi au cimetière Bigarra, à Curepipe, et ses proches ont organisé plusieurs cérémonies de prières les jours suivants. Très affectés, les membres de la famille ne souhaitent pas commenter cet acte de désespoir. En 2012, une première tentative de suicide de l’avocat les avait déjà accablés. Sa mort, aujourd’hui, les fait s’emmurer dans le silence.
La nouvelle a aussi provoqué une onde de choc chez ses confrères et ses anciens partenaires en politique. Tous gardent en tête l’image d’un gentleman calme, discret et courtois. L’avocat Maxime Sauzier, qui l’a côtoyé pendant 19 ans, raconte qu’il était très intelligent et cultivé. «Il était aussi généreux, toujours à l’écoute et toujours disponible pour donner de bons conseils», ajoute-t-il. Le jeudi 19 mars, Bala Padiachy avait plaisanté avec son mentor. «On était adversaires dans une affaire qui passait devant un juge en chambre. On s’est vus peu après et on a bien rigolé. He looked well ce jour-là. C’est absolument horrible ce qui lui est arrivé. Je suis dévasté», dit Maxime Sauzier.
Bala Padiachy a également fait de la politique avant de prendre ses distances. Membre du Mouvement militant mauricien, il a été maire de Beau-Bassin/Rose-Hill de 2002 à 2003. Franco Quirin, ancien maire mauve des villes sœurs, garde un très bon souvenir de sa collaboration avec lui : «J’étais président de la commission des sports lorsqu’il était maire. Il était très méticuleux dans son travail. Il était toujours à l’écoute et savait se faire respecter. Et en tant qu’avocat, il aidé beaucoup de gens dans le besoin.»
Deven Nagalingum fait également l’éloge de Bala Padiachy. «À l’époque où j’étais maire de Beau-Bassin/Rose-Hill, je l’avais nommé responsable du planning car c’était un bosseur. Il apportait toujours des solutions très vite. Je me souviens aussi qu’un jour, je lui ai montré la photo de mon berger allemand. Il a tellement aimé ce chien que je le lui ai offert.»
Dans sa carrière d’avocat, Bala Padiachy a travaillé sur plusieurs grosses affaires qui ont fait sa renommée. Parmi les plus médiatisées, il y a celle des haut-parleurs de la mosquée Hidayat-E-Islam à Quatre-Bornes, où il représentait la mairie de la ville. Il était également le défenseur de Jayraj Sookur dans l’affaire Stacey Henrisson.
Cependant, le ténor du barreau avait perdu le fil de sa vie depuis quelque temps. Personne n’ignorait que Bala Padiachy était très malheureux en amour. En 2012, après son divorce, il a sombré dans l’alcool. La méticulosité de l’homme de loi a alors cédé la place à la désinvolture. Ne se présentant pas en cour dans certains cas, négligeant certains dossiers, l’avocat a commencé à perdre des clients. Puis il a tenté l’irréparable en ingurgitant des comprimés.
Néanmoins, il semblait avoir remonté la pente. Il avait refait sa vie avec une Italienne prénommée Emmanuella. Mais cette dernière est repartie vivre dans son pays il y a quelques mois. Depuis, Bala Padiachy vivait seul dans sa grande villa. Son entourage explique qu’il souffrait plus que jamais de dépression. Il était arrivé au point de non-retour. Et sa détresse a pris le dessus.
Jean Marie Gangaram & Amy Kamanah-Murday
Publicité