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13 juin 2016 13:32
Ils sont tous là. En ce jeudi après-midi, proches, amis et collègues de Patricia Verrière, 41 ans, attendent l’arrivée du cortège funèbre devant l’église du Sacré Cœur à Beau-Bassin. Les visages sont crispés, les yeux larmoyants, et plusieurs tiennent entre les mains des bouquets pour embellir le cercueil de celle qui a apporté un rayon de soleil dans leur vie à un moment ou un autre et qui a été sauvagement tuée par son ex-compagnon Vidish Jogannah, âgé de 22 ans, le vendredi 3 juin (voir hors-texte).
À 14 heures, le cortège arrive. Un jeune homme s’en approche, les larmes aux yeux. C’est le fils de la quadragénaire qui pleure sa mère partie tragiquement. L’église se remplit rapidement et à 14h30, les funérailles commencent au son des cantiques. Les cris de détresse et de douleur des proches de Patricia, dont sa sœur et son fils, résonnent dans l’église. Les témoignages sont poignants. À l’instar de celui de Robert, le beau-frère de Patricia, qui brosse un joli portrait de la jeune femme : «Tu étais une femme avec une personnalité flamboyante, une femme impliquée dans son travail, une femme qui aimait son pays… Tu nous manqueras terriblement.»
Une heure plus tard, les proches de Patricia s’alignent devant la porte de l’église pour recevoir les sympathies de ceux présents. Et ils continuent d’évoquer celle qui leur manquera à jamais. Jeannine, la mère de la jeune femme, bien qu’effondrée, préfère se concentrer sur les merveilleux souvenirs laissés par sa fille. «Elle aimait l’île Maurice, elle aimait tellement les gens. She trusted too much people, she had a big heart, she thought that others have the same heart as her’s. Elle laisse un grand vide dans nos coeurs. On laisse la police faire son enquête», nous confie-t-elle, tristement. Françoise, la sœur de la victime, garde d’elle l’image d’«unefemme exceptionnelle qui respirait la joie de vivre.Elle nous manquera terriblement».
Jeanloup Capiron, gérant du pub No Stress, à Péreybère, est également présent. Entre Patricia et lui, c’était une belle histoire d’amitié. Quand il a appris la terrible nouvelle, il n’en a pas cru ses oreilles. Comment «une femme souriante, débordante d’énergie et serviable»comme elle avait-elle pu finir ainsi ? Difficile à croire. Il avait fait la connaissance de Patricia quand celle-ci était venue dans son pub en tant que cliente. «Après, elle avait pris un restaurant à côté et suite à quelques difficultés au niveau des affaires, je lui ai proposé le poste de manager dans mon établissement», nous raconte Jeanloup Capiron.
Durant les quatre mois qui ont suivi, «elle a été une employée qui se démenait au travail, elle a fait du bon boulot». C’est là qu’elle a fait la connaissance de Vidish Jogannah qui travaillait comme videur au pub. «Il avait l’air calme et sournois. Il ne parlait pas beaucoup. Je ne le cernais pas vraiment. Il a arrêté de travailler en même temps que Patricia qui ne voulait pas mêler vie professionnelle et personnelle.»Jeanloup Capiron a perdu de vue son amie, mais cette dernière l’avait récemment contacté pour avoir le numéro de son avocat car «Vidish l’avait frappée».
Pour Jeanloup Capiron, Patricia était une femme qui croquait la vie à pleines dents et qui gardait le sourire, bien qu’elle n’ait pas eu une vie facile. «Elle aimait tellement Maurice qu’elle a décidé de regagner son pays natal après une trentaine d’années au Canada.» Selon Jeanloup Capiron, elle voulait maintenant se stabiliser. Hélas, elle est tombée sur le mauvais numéro.
Arrêté peu après la découverte du corps de Patricia Verrière, Vidish Jogannah n’a pas tardé à avouer son meurtre. Il s’est, dit-il, rendu chez la victime vers 14h30, le vendredi 3 juin, dans le but de discuter. Mais, selon lui, une violente dispute a éclaté alors qu’ils étaient devant le bloc d’appartement, il l’a poussée et elle s’est cognée la tête contre le portail. Il l’aurait alors portée jusqu’à son appartement où il l’aurait étranglée et bâillonnée avant de cacher le corps sous le lit. Ce sont les amis de la victime qui ont fait la découverte macabre dans la soirée du lendemain. Ils s’étaient rendus chez elle pour donner à manger à son chien. L’autopsie a attribué le décès à une strangulation. Vidish Jogannah a comparu en cour de Mapou le lundi 6 juin et a été renvoyé en cellule policière jusqu’au lundi 13 juin.
Elle ne retient pas des bons souvenirs de Vidish Jogannah. Diana Raphaël, 23 ans, a fait la connaissance du jeune homme il y a trois ans. «Je l’ai rencontré en 2013 à l’hôtel où on travaillait tous deux comme serveurs. On est tombés amoureux et on a décidé de vivre ensemble chez mes parents. On s’est mariés en 2014 après que je suis tombée enceinte. Quand je l’ai connu, il semblait être une personne tranquille, mais par la suite, il est devenu très violent, surtout après mon accouchement. Il me battait beaucoup. À chaque fois que je lui parlais, il me frappait. Je l’ai finalement quitté. Il a insisté pour que je retourne avec lui, mais j’ai refusé. Je ne m’attendais pas à ce qu’il agisse de la sorte», confie cette habitante de Triolet.
Elle avait appris récemment que son ex entretenait une relation avec Patricia Verrière. Quand Diana a appris que Vidish l’avait tuée, elle a eu peur pour son fils de 2 ans qui était sous la responsabilité de celui-ci. «J’avais peur pour mon enfant. Je n’arrêtais pas de pleurer. Je suis triste pour celle qui a perdu la vie et je sais que cela aurait pu être moi», confie Diana. Elle ne souhaite aujourd’hui qu’une chose : offrir un meilleur avenir à son fils. «Il est très attaché à son père car il vivait à peine avec moi. Je compte vraiment m’occuper de lui maintenant qu’il est sous ma responsabilité.»
Sabine Azémia
Ils veulent comprendre ce qui s’est réellement passé, mais n’y arrivent pas. Jeetun et Sadana Jogannah, des habitants de Gokhoola, sont complètement abasourdis depuis l’arrestation de leur fils Vidish aux petites heures du matin du dimanche 5 juin. Le jeune homme de 22 ans dormait lorsque les policiers sont venus procéder à son arrestation pour l’assassinat de sa concubine Patricia Verrière, 41 ans.
«Pa kone kinn pass dan latet mo garson. Nu finn gagn enn sok terib kan nu finn apran seki finn arive. Ziska ler nu pa krwar ki linn touy sa madam la parski zot ti bien kontan zot kamarad», confie Jeetun. L’homme raconte que son fils a vécu avec Patricia Verrière à Péreybère pendant six mois. Mais il y a un mois, il est rentré à la maison. Taciturne de nature, il s’était davantage renfermé sur lui-même.
«Il était allé vivre avec elle peu de temps après leur rencontre. À l’époque, il travaillait comme barman et serveur dans un hôtel. C’était en janvier. La dame a aussi dormi chez nous à deux reprises. Notre fils ne nous a rien dit sur la raison de cette séparation lorsqu’il est revenu à la maison. D’ailleurs, il ne raconte jamais rien. Il est très réservé», souligne Jeetun.
Cet ancien employé d’hôtel explique que son état de santé s’est dégradé depuis l’arrestation de son fils. Son épouse aussi est souffrante. «Je suis diabétique et sous dialyse. J’ai aussi des problèmes de vue. Mon épouse marche avec beaucoup de difficultés car elle a un problème à la colonne vertébrale. Comme un malheur n’arrive jamais seul, l’épouse de Vidish, qui est d’origine rodriguaise, est venue reprendre leur fils de 2 ans, qui vivait avec nous et mon autre fils qui est policier, depuis qu’il a six mois.»La vie de cette famille est à jamais bouleversée.
Jean Marie Gangaram
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