«ll a été assassiné.» Les proches de Yoan Spanu, un Réunionnais d’origine mauricienne âgé de 32 ans, en sont convaincus. Il a été retrouvé pendu dans la salle de douche à la maison d’arrêt de Saint-Pierre, à La Réunion, aux petites heures du mercredi 7 novembre. Et l’autopsie pratiquée par deux médecins légistes de l’institut médico-légal de La Réunion a conclu à un décès par suicide. Thèse à laquelle ses parents, Gilles et Isabelle, et son frère Anthony, rencontrés à Albion n’ont jamais cru car il avait fait de troublantes révélations devant le tribunal quelques heures avant sa mort. C’est la raison pour laquelle ils ont eu recours à une contre-autopsie, le mercredi 14 novembre. Celle-ci, pratiquée par le Dr Satish Boolell, assisté d’un médecin légiste venu d’Australie, a conclu à un assassinat.
Incarcéré depuis le 1er novembre à la maison d’arrêt de Saint-Pierre, à La Réunion, après une bagarre avec un colocataire qu’il soupçonnait de vol, Yoan Spanu était poursuivi pour tentative de meurtre. Mais lors de sa comparution devant les juges des libertés et de la détention de Saint-Pierre, le 6 novembre, il avait lancé un appel aux magistrats : «Si vous ne me libérez pas immédiatement, je vais mourir.» Et d’ajouter : «Je ne suis ni suicidaire, ni drogué, mais je vais mourir dans les prochains jours.» Ayant reçu des menaces, il avait aussi confié à sa mère, Isabelle, que ses codétenus «vont me droguer, me pendre et faire passer ma mort pour un suicide».
Cela faisait également plusieurs jours qu’il ne mangeait pas de peur d’être empoisonné. Cependant, le juge n’ayant pas prêté attention à ses avertissements, il a été renvoyé dans la même cellule, qu’il partageait avec «une dizaine de détenus très dangereux», confie son père Gilles. C’est ainsi qu’il a été retrouvé mort moins de 12 heures plus tard. «Il aimait la vie. Il était amoureux et prévoyait de se fiancer en décembre. Un homme amoureux ne commet pas un acte pareil», indiquent ses proches.
Réagissant aux conclusions de la contre-autopsie pratiquée, le parquet de Saint-Pierre, loin de sembler convaincu, a émis un communiqué dans lequel il indique que «dans le cadre de l’enquête pour recherche des causes de la mort ouverte par le parquet de Saint-Pierre, et toujours en cours, l’autopsie réalisée par deux médecins légistes de l’institut médico-légal de La Réunion a conclu sans équivoque à un décès par suicide ; aucune trace suspecte d’intervention d’un tiers et aucune violence sexuelle n’ont été relevées ; par précaution, des analyses toxicologiques ont été requises, dont les résultats ne sont pas encore connus». Le communiqué stipule aussi qu’«à l’issue des opérations médico-légales, le corps a été restitué à la famille, qui n’a formulé aucune demande de contre-expertise. À ce stade, la famille n’a adressé aucun document aux enquêteurs ou au parquet. En tout état de cause, tout élément nouveau et pertinent sera examiné avec la plus grande attention, dans l’objectif commun de parvenir à la manifestation totale de la vérité».
À cela, la famille Spanu répond que les instances réunionnaises ne l’a jamais sollicitée pour des précisions depuis que les conclusions de la contre-autopsie ont été rendues publiques. Soupçonnant les autorités françaises de vouloir étouffer l’affaire, Gilles Spanu indique : «Je compte confier l’enquête à qui de droit. S’il le faut, je solliciterai même les instances internationales. Car je souhaite qu’il y ait un combat juste et que la vérité éclate au grand jour.» Le corps de Yoan Spanu ayant été rapatrié à Maurice, ses funérailles ont eu lieu le vendredi 16 novembre.