Publicité
2 février 2015 04:58
Votre papa ou votre maman vient de vous envoyer une demande d’ami sur Facebook ? Ah, dilemme ! Que faire ? Nombreux sont ceux qui se sont déjà retrouvés confrontés à ce genre de situation. Car si, à un moment donné, la majorité des abonnés sur Facebook se composait d’adolescents et de jeunes adultes, aujourd’hui, la donne a changé. Au cours de ces dernières années, nos «vieux» se sont aussi mis à l’ère du 2.0. Résultat des courses ? Sur Facebook, on retrouve nos parents, nos tantes et nos oncles. Pour les adultes et ceux qui sont sur la même longueur d’onde que leurs aînés, ça ne pose aucun problème d’être amis avec eux. Mais pour les adolescents, c’est un peu plus compliqué.
Derrière son ordinateur, l’adolescent arrive à exprimer ses sentiments, ses émotions. Il partage ses idées et celles des autres. Il met en scène sa vie en postant des photos de lui qui le mettent en valeur, parle de ses expériences, de ses rencontres, publie des vidéos et des chansons qui lui donnent l’air cool. Dans ce monde virtuel, il arrive à s’affirmer. Les likes et les comments sont comme des baromètres qui lui permettent de mesurer sa cote de popularité auprès des autres. Il y a l’amour, l’amitié aussi. Sur Facebook, il se lâche. On y trouve des photos où il pose de manière suggestive, des clichés de ses sorties et de ses beuveries. Souvent aussi, il déprime et il pousse des coups de gueule.
Lorsqu’on demande à Tessa, 18 ans, si avoir un lien virtuel entre parent et enfant est une bonne idée, elle répond par un non catégorique. Beaucoup de jeunes ne voudraient pas que leurs parents apprennent, sur Internet, qu’ils ont un copain ou une copine, par exemple. Pour Tessa, avec ses parents comme amis sur Facebook, elle ne serait plus vraiment libre. Heureusement, dit-elle, ses parents n’y sont pas, mais ses oncles si ! Et pour elle, pas question d’être amie avec eux en ligne : «Déjà sans Facebook, ils trouvent le moyen de critiquer tout ce qu’on fait, je n’ose même pas imaginer ce qui se passera s’ils étaient sur mon profil. Je pense que Facebook ne ferait qu’empirer la situation.» Loin de vouloir leur cacher des choses – puisqu’ils en savent déjà beaucoup sans Facebook, dit-elle –, c’est plutôt le besoin de préserver un peu de son intimité qui domine : «À un moment donné, on ne veut pas tout partager avec ses parents.»
En effet, les adolescents ne veulent pas de leurs parents dans leur monde virtuel. Tout simplement parce qu’ils auraient l’impression d’être surveillés en permanence, ce qui les empêcherait de s’exprimer librement. Pour beaucoup de ces jeunes, Facebook est une sorte de jardin secret qu’ils veulent partager avec seulement les amis de leur âge, ils ne voudraient donc pas que leurs parents s’y incrustent. D’autres, bien qu’ils n’aient rien à cacher, ne veulent tout simplement pas que leurs parents connaissent leurs moindres faits et gestes. D’autre part, cette «surveillance» pour les très jeunes utilisateurs de Facebook, qui est interdit aux moins de 13 ans, peut être une bonne chose pour mieux les encadrer. Accompagner et guider son enfant dans son apprentissage du réseau social est nécessaire mais peut se faire sans qu’on soit sur la liste d’amis de son enfant sur le réseau social.
Complicité
Vishal, 24 ans, aime beaucoup le fait d’avoir ses parents comme amis sur Facebook. Ils ont toujours, souligne-t-il, eu une relation très ouverte et complice. Bien qu’il pense que le fossé générationnel peut être un sérieux problème pour certaines personnes, il croit aussi que cela peut faire plaisir aux parents de voir que leur enfant est bien intégré et populaire sur le réseau social : «On poste souvent des photos de nos amis, de nos réussites et je crois que ça peut leur plaire de voir qu’on est épanouis.» Pour le jeune homme, avoir ses parents sur sa liste d’amis, c’est même cool.
Kevin, 26 ans, partage le même avis, d’autant que, pour lui, Facebook est loin d’être un journal intime. «Je peux comprendre que les enfants aient besoin d’un espace privé, mais Facebook est tout ce qu’il y a de plus public. Moi, je pense qu’en se connectant avec les parents, on peut montrer de la transparence, de l’ouverture et de la confiance. Je pense que ça peut faciliter le dialogue entre parents et enfants.» Cependant, souligne le jeune homme, la confiance devrait être partagée et les parents ne devraient pas faire de l’espionnage : «Facebook, selon moi, doit être considéré comme un moyen de maintenir la discipline plutôt que d’essayer de contrôler.»
Et lorsqu’on s’entend bien avec ses parents, pourquoi ne pas être ami avec eux sur Facebook ? A priori, il n’y a pas de raison. Alvina a longtemps hésité avant d’accepter la demande d’ami de sa maman. Finalement, elle a fini par accepter et cela se passe plutôt bien : «Elle like et commente mes photos, mes posts mais rien qui m’embarrasse.» Si elle avait des doutes sur les répercussions que ses activités sur la Toile pourraient avoir sur sa relation avec sa maman, il faut dire qu’elle prend de nombreuses précautions pour qu’il n’y ait pas de débordements sur sa page : «J’efface tous les posts qui pourraient l’inquiéter ou ne pas lui plaire. Nous ne sommes pas de la même génération et il y a des choses qu’elle ne pourrait pas comprendre, même si ce n’est que pour rigoler.»
Par contre, Melissa, 25 ans, elle, ne veut absolument pas en entendre parler. «Avoir ses tantes sur son profil et courir le risque qu’elles répètent tout à ma mère, c’est déjà suffisant.» Du coup, pas question de créer un compte pour sa maman sur le réseau social si populaire. «Elle me le demande souvent et comme elle ne connaît pas grand-chose à tout ça, c’est moi qui doit lui créer son compte. Je trouve une excuse à chaque fois pour ne pas le faire», avoue la jeune femme. Même si elle est une adulte, elle pense que Facebook est un endroit où les jeunes peuvent se lâcher loin de l’autorité parentale. Pour elle, hors de question d’avoir une maman qui commente et qui like ses status et ses photos. «Je suis enfant unique et ma maman a toujours eu tendance à me surprotéger. Facebook est le seul endroit où je peux encore m’affirmer.» Toutefois, on ne peut en vouloir aux parents d’avoir envie de protéger leurs enfants. Facebook, bien qu’il soit un bel outil, a, comme toutes choses, de nombreuses faiblesses.
Le saviez-vous ?
Avis aux parents ! Si vous avez décidé d’être ami avec votre enfant sur Facebook afin de garder un œil sur ses pratiques en ligne, sachez que vous n’êtes pas seuls. En effet, selon une étude réalisée par Lab42, une agence d’études de marché, 92 % des parents sont amis avec leurs enfants ! Selon eux, ce besoin d’être sur le réseau social est principalement motivé par l’envie de protéger leurs enfants. Cependant, précisent les conclusions de cette étude, les parents n’ont pas vraiment besoin d’être connectés puisque 72 % d’entre eux connaissent déjà les mots de passe de leurs enfants. Comme quoi, s’ils veulent vraiment…
Si vous, parents, souhaitez faire partie de la liste d’amis de votre ado, cela peut se faire en un clic. Mais attention, certaines précautions sont à prendre. Voici quelques points à garder en mémoire…
● De 10 à 14 ans : accompagner
De manière générale, les réseaux sociaux sont déconseillés à ceux âgés de moins de 13 ans. Cependant, ces derniers sont nombreux à avoir un compte sur Facebook. Ainsi, explique le psychothérapeute Jean-Charles Nayebi, le rôle du parent est d’accompagner son enfant dans son apprentissage du monde 2.0 et de surveiller de temps à autre ses activités en ligne. Jusqu’à 14 ans, souligne le spécialiste, le parent se doit d’expliquer à son ado les dangers que peut contenir Facebook. Le parent peut alors repérer de loin si son enfant est lié à un groupe inapproprié pour son âge, par exemple. «Il est important de lui rappeler aussi de faire attention à ne pas dénigrer ses professeurs ou répandre des rumeurs sur ses camarades», souligne-t-il.
● De 14 à 18 ans : observer
Puisque, comme explique Jean-Charles Nayebi, l’adolescent qui grandit «devient de plus en plus apte à exercer un jugement propre», les parents doivent prendre de la distance par rapport à leur présence sur le profil de leurs enfants. L’ado commencera à vivre ses propres expériences et le parent se doit alors d’observer de loin, mais pas plus. «Il est possible de commenter, en adoptant un discours adapté à l’image social du jeune. Il n’est pas recommandé de jouer à papa ou maman sur les réseaux. Et surtout, il faut rester à l’écart de la vie amoureuse ou intime de ses enfants en public», explique le psychothérapeute.
● Après 18 ans : laisser faire
Selon les spécialistes en psychologie, il existe trois bonnes raisons de ne pas être ami avec ses enfants sur Facebook. Un : c’est une perte de temps. Deux : une perte de crédibilité. Trois : une perte de confiance. Les parents doivent lâcher prise, car le fait d’être surveillé par ses parents sur les réseaux sociaux peut conduire l’enfant à s’autocensurer de peur de faire face à leurs reproches. Cependant, cela peut aussi être salutaire, selon Jean-Charles Nayebi : «Il ne faut pas oublier que les réseaux sociaux relèvent de la place publique et non de la sphère privée. Les enfants encadrés par leurs parents ont moins de risques de désagréments que les autres.»
● Quelques conseils
Jacques Henno, spécialiste des nouvelles technologies et auteur de Facebook & vos enfants, a établi une petite liste des «do & don’t» pour les parents :
• Ne pas écrire sur le mur de l’enfant.
• Ne pas interagir et commenter les photos.
• Pas d’intervention intempestive même en cas de mauvais commentaire. Les adultes règlent les problèmes en dehors de Facebook.
• Les parents ne sont pas les amis, mais les accompagnateurs.
Publicité
Publicité
Publicité