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19 avril 2016 17:50
Croire en l’avenir. Croire en cette institution qu’est la famille. Pendant longtemps, ils n’ont pas su ce que cela voulait dire, n’ont pas osé espérer connaître cette joie, se sentir à leur place, chez eux et avoir foi en ceux qui les entourent. Mais depuis l’année dernière, leur existence a changé. Akshay, Atish, Floren et Grégory, qui ont atteint la majorité, savourent une nouvelle vie aux côtés de Michael et Roxane Ramsamy qui représentent les parents avec qui ils n’ont jamais vécu.
En cet après-midi, Floren et Atish rentrent de leur stage dans un hôtel. Dès qu’ils ouvrent le portail, les chiens Spotty et Mercure les accueillent en sautillant. Les deux jeunes rejoignent ensuite les autres membres de la famille. Floren, qui apprend le métier de cuisinier, a prévu de préparer un gâteau. Dans la cuisine, tout le monde s’affaire et l’ambiance est chaleureuse. Les discussions et les blagues vont bon train, donnant l’impression que les occupants de cette maison se connaissent depuis toujours.
Pourtant, ce n’est que depuis août 2015 que les quatre garçons ont découvert la vie familiale dans cette maison d’accueil pas comme les autres, située à Beau-Bassin. Vivre avec des parents et des frères, prendre le petit déjeuner ensemble, discuter, se chamailler, s’écouter, rentrer, après une journée à l’école ou au travail, à la maison et être entouré des siens... C’est aujourd’hui la vie que mènent Akshay, Atish, Floren et Grégory grâce à la main que leur a tendue Gilbert Lebreux, responsable de l’association L’Etoile du Berger qui vient en aide aux enfants vulnérables et en difficulté.
Petits, les quatre garçons sont placés dans des centres par la Child Development Unitet vivent séparés de leur famille. Akshay et Atish grandissent à SOS Village et Floren et Grégory au Foyer Père Laval. Comme le veut la règle, ils doivent quitter ces institutions à 18 ans pour voler de leurs propres ailes. Cependant, ils n’ont nulle part où aller. Lorsque Gilbert Lebreux leur propose d’aller vivre dans une maison avec deux adultes qui auront le rôle de parents, ils n’hésitent pas. Floren, qui avait essayé de rejoindre sa famille biologique, préfère intégrer cette maison. «De 3 à 15 ans, j’ai vécu en foyer, puis je suis retourné vivre avec ma famille biologique. Mais je n’arrivais pas à m’adapter. Lorsque Gilbert m’a proposé de venir vivre ici, j’ai accepté sans savoir ce qui m’attendait. Il est comme un ange gardien pour nous et je savais que ça ne pouvait qu’être bien», dit-il.
Akshay, 19 ans, connaît Gilbert Lebreux depuis qu’il est enfant. «Il est comme un père pour moi», avoue-t-il. Comme beaucoup d’autres, il s’est aussi demandé où il pourrait aller vivre une fois hors de SOS Village. Heureusement, Gilbert Lebreux lui avait gardé une place dans la maison. «C’était la meilleure chose qui pouvait m’arriver. Aujourd’hui, je vais bien. Je suis en Form Vet je compte étudier le design après l’école.»
Redonner à ces jeunes confiance en l’avenir et préparer leur entrée dans la société active et la vie adulte, cela fait aussi partie des objectifs de cette maison qui accueille des jeunes de 18 à 24 ans. Pour arriver à voler de leurs propres ailes, les jeunes apprennent à gérer un budget, économiser, épargner dans un plan de logement pour avoir leur propre maison un jour. «Certains sont orphelins, d’autres ont perdu tout contact avec leur famille ou n’ont pas réussi à réintégrer celle-ci après des années de séparation. On ne peut pas les lâcher comme ça dans la société. L’objectif est de leur offrir un foyer avec tout ce que cela implique. La première chose, ce sont des parents qui sont là pour leur inculquer des valeurs, leur apprendre le respect, la discipline, les écouter, les accompagner, les guider vers un futur où ils seront des adultes autonomes, indépendants et responsables», souligne Gilbert Lebreux.
Lorsque ses partenaires et lui décident de mettre sur pied cette maison d’accueil, ils doivent trouver le couple qui sera pour ces jeunes des parents, mais aussi des accompagnateurs. Deux noms s’imposent :Michael et Roxane Ramsamy, engagés dans le social. Face à cette proposition, le jeune couple est emballé et décide de tout quitter pour se lancer dans cette nouvelle aventure. Il faut dire qu’outre leur engagement dans le social, Michael a une histoire qui rappelle celle des quatre garçons. «J’ai vécu dans un foyer jusqu’à l’âge de 18 ans et là je me suis retrouvé à la rue. Je sais ce que c’est que de ne pas avoir de maison, de parents, d’être seul sur la route. Mais aujourd’hui encore, c’est la réalité de 90 % des jeunes qui quittent ces centres. Pour moi, c’est l’occasion d’aider ces jeunes qui connaissent le même parcours que celui que j’ai pu avoir.»
Le couple et les quatre garçons ont appris à comprendre l’histoire de chacun, créer un lien, établir la confiance, définir les règles de la maison et apprendre à vivre ensemble. Roxane y met un point d’honneur. «Ils jouissent d’une certaine liberté, mais avec des limites. Ils doivent nous informer quand ils sortent et nous dire où ils se rendent. À la maison, tout le monde met la main à la pâte. Ils nettoient leur chambre et participent à la vie de la maison.»
Grégory, ancien résident du Foyer Père Laval, est conscient de l’opportunité qui lui a été donnée. «J’approchais mes 18 ans et je me demandais ce que je pourrais bien faire, où je pourrais aller. C’était un stress. Ma maman est décédée et je n’ai aucun contact avec les autres membres de ma famille. Pour moi, c’était impossible d’aller là-bas.Lorsque Gilbert m’a parlé de cette maison, je me suis dit que c’était un cadeau.»
Lorsque Michael écoute ces jeunes parler avec espoir et confiance, il ne peut s’empêcher d’être ému et de penser à ce qu’il a été à leur âge. «Je traînais les rues, dormais dehors, vivais de petits boulots. Puis un jour, j’ai décidé de prendre mon courage à deux mains et de donner un sens à ma vie. Quelque part, à travers l’aide que je leur apporte aujourd’hui, je rattrape mon passé et je peux leur transmettre mon expérience et mes valeurs», explique-t-il.
Depuis qu’il a croisé le chemin de Michael et Roxane, Grégory découvre une nouvelle vie : «Comme dans toutes les familles, il y a des hauts et des bas, mais nous sommes en famille et on se sent bien dans notre maison.»En dernière année au collège, il se surprend à faire des projets. Il veut devenir chimiste et être indépendant. Avoir sa propre maison et une famille, sa famille...
Il compte une vingtaine d’années comme volontaire à SOS Village. C’est fort de son expérience que Gilbert Lebreux consacre aujourd’hui sa retraite à l’association L’Étoile du Berger qui gère trois sheltersdédiés aux enfants à partir de l’âge de 3 ans. Avec la maison d’accueil de Beau-Bassin qui a ouvert ses portes il y a quelques mois, l’ONG continue de renforcer son engagement d’offrir un cadre familial aux enfants et jeunes qui n’en ont pas.
Avec déjà quatre résidents, la maison de Beau-Bassin accueillera bientôt deux nouveaux résidents qui rejoindront la famille de Michael et Roxane. Pour arriver à subvenir aux besoins des résidents et faire tourner la maison, l’association compte sur les contributions CSR. Il est parfois difficile de boucler les fins de mois, d’où l’appel de Gilbert Lebreux : «Nous avons besoin d’aide, de sponsors pour pouvoir mener à bien notre mission. Nous avons mis un numéro de compte à la disposition des donateurs. MCB : 000440626102.» L’année prochaine, l’association compte ouvrir une autre half-way home dédiée, cette fois, aux jeunes filles.
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