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Parent malgré un handicap : Mon enfant, ma bataille

26 mars 2014

Après avoir connu des moments difficiles à cause du handicap d’Aslam, la petite famille vit aujourd’hui des jours heureux.

Devenir maman et papa est, pour de nombreuses personnes, l’aboutissement d’une vie. Mettre au monde un enfant, l’aimer et l’élever est un bonheur indescriptible. Pourtant, ce rôle n’est pas toujours facile. Il l’est encore moins quand on a une jambe de moins, des yeux qui ne peuvent pas voir ou encore un sens de l’ouïe qui ne fonctionne pas. Quelle que soit sa nature, être parent lorsqu’on vit avec un handicap est un parcours difficile. Mais avoir un enfant et fonder une famille sont un besoin fondamental pour eux, comme ça l’est pour d’autres.


Aslam Chauvin, 25 ans, ne regrette absolument pas sa vie d’avant. Bien qu’il ait perdu l’usage de ses deux mains après un terrible accident il y a quelques années, qu’il ait été dans le coma et enduré une vingtaine d’opérations, il est aujourd’hui le plus heureux des hommes. Il y a 18 mois, il est devenu papa pour la première fois.


Si certaines personnes vivant avec un handicap font face à de nombreuses interrogations sur leur capacité à prendre soin d’un enfant, Aslam a, pour sa part, accueilli cette nouvelle avec une immense joie. La venue de la petite Sarah l’a révélé à lui-même. «Aujourd’hui, je me considère comme quelqu’un de tout à fait normal. Au début, je souffrais énormément de mon handicap, mais être le papa de Sarah m’a fait voir la vie sous un autre angle. Je me concentre sur l’essentiel, c’est-à-dire ma famille», dit-il.


Bien sûr, les ravages de l’accident et les séquelles des nombreuses interventions chirurgicales sont encore visibles. Ses deux mains, notamment, n’ont toujours pas retrouvé leur mobilité. Mais l’arrivée de son enfant a fait naître en lui l’envie de se battre jusqu’au bout.


Se libérer et s’épanouir


Aslam revient de loin, il le sait. Après les six mois d’hospitalisation qu’avait nécessité son état suite à son accident, il s’était retrouvé avec deux bras immobiles. Sa vie avait basculé. Avec ce handicap, il s’était recroquevillé sur lui-même, il évitait de sortir. Les rares fois qu’il le faisait, raconte-t-il, il ne sortait pas sans mettre des gants pour cacher ses bras.

Le regard de ceux qui l’entourent avait immédiatement changé, sauf celui de Tasleem qui deviendra, quelques mois plus tard, son épouse. Sarah ne tarde pas à pointer le bout de son nez, permettant à Aslam de se libérer et de s’épanouir. «J’ai trouvé un travail qui me permet de subvenir aux besoins de ma famille. Je m’occupe de la maison et de Sarah aussi», confie-t-il.

L’arrivée de sa petite fille a été, pour Aslam, comme une seconde naissance. Malgré son handicap, il prend son rôle de papa très à cœur. Avec sa petite fille, il est un véritable papa gâteau. Il lui donne le bain, prépare ses repas, lui fait faire la sieste. Père et fille sont très proches : «Elle est tout le temps en train de me chercher. Dès que je rentre du travail, elle court vers la porte et ne me lâche plus. Dans la nuit, quand elle se réveille, c’est toujours moi qu’elle demande.»

 

Être un bon parent s’apprend au fil des jours, que l’on soit un parent valide ou pas. Tout donner à son enfant bien qu’elle ne dispose pas de toutes ses capacités physiques, c’est le quotidien de Marie-Sylvie Hyppolite depuis 2007. Âgée de 39 ans à l’époque, et maman de trois enfants, elle a été amputée de son pied droit à la suite d’une blessure qui s’était infectée à cause de son diabète.


Quand elle évoque cette partie de sa vie, elle ne peut retenir les larmes qui lui montent aux yeux. Non pas à cause de la douleur atroce de sa blessure, de la souffrance qu’a engendrée son amputation et des cinq mois qu’elle a passés clouée sur son lit d’hôpital. Ces larmes ruissellent sur son visage à chaque fois qu’elle pense à Melissa, Sébastien et Cathy qui ont dû faire face au handicap de leur mère et au décès de leur père quelques mois plus tard. «Mes enfants étaient encore des ados et les deux aînés ont été contraints d’arrêter l’école pour pouvoir subvenir à leurs besoins. Ils étaient seuls et livrés à eux-mêmes», explique-t-elle.  


Perdre sa mobilité alors qu’elle était une femme très active qui s’occupait de tout et de tout le monde, cela a été très dur pour Marie-Sylvie, l’aînée d’une fratrie de huit enfants. Sa vie avait, dit-elle, complètement basculé : «Je ne pouvais plus m’occuper de moi-même et encore moins de mes enfants. On me donnait le bain, on m’habillait, sans compter que j’ai développé des complications cardiaques. J’avais tellement honte d’être dans cet état que j’ai fait deux tentatives de suicide. Je ne voulais plus vivre parce que j’avais l’impression d’être un fardeau pour mes proches.»


Les jours qui ont suivi son retour à la maison, se souvient-elle, ont été très durs. Outre le traitement douloureux auquel elle devait se plier, la famille, qui se retrouvait sans aucune ressource financière, avait du mal à joindre les deux bouts : «Une fois, nous sommes allés dormir en buvant de l’eau pour calmer notre faim. Nous avons tous dormi ensemble cette nuit-là et j’ai serré très fort mes enfants contre moi. Je leur ai promis que, malgré mon état, j’allais tout faire pour m’occuper d’eux.»

 

D’une force incroyable, Marie-Sylvie se remet debout petit à petit grâce à une prothèse avec laquelle elle réapprend à marcher, bien que celle-ci lui fasse très mal. Depuis, elle a repris son rôle de maman au sein de la famille. Certes, le quotidien, à cause de son handicap, demande une certaine organisation. Mais Marie-Sylvie a su trouver, au fil du temps, son mode de fonctionnement.


À la maison, elle fait le ménage, la couture, la cuisine, s’occupe de Melissa et Sébastien, qui vivent toujours avec elle, et de son petit-fils Noah qui, dit-elle, est la lumière de la famille. «Avec mes enfants, nous sommes très proches. Aujourd’hui, le fait de souffrir d’un handicap ne m’empêche pas d’être une bonne mère. Au contraire, je vois la vie différemment. Mes enfants ont tellement fait pour moi quand j’étais dans le besoin que je ne peux pas rester les bras croisés», confie-t-elle.

 

Mais les choses ne sont pas aussi simples. Vivant dans une situation très modeste, Marie-Sylvie s’est vu refuser la pension qu’elle touchait de la Sécurité sociale. Sans aucune source de revenus depuis plus d’un an, cette maman se retrouve, une nouvelle fois, dans l’impasse : «Je ne comprends pas ce qui se passe. J’ai demandé des explications, mais je n’ai eu aucune réponse.»


Motivée par l’amour de ses enfants, elle ne baisse pas les bras et espère très vite que la situation s’arrangera. En attendant, Marie-Sylvie continue son combat. Elle s’est d’ailleurs engagée dans la lutte contre le diabète auprès de l’association APSA, un geste important qui lui tient à cœur : «Je pense que c’est un signe de Dieu. Il m’a mise à l’épreuve et aujourd’hui, c’est à mon tour de venir en aide aux autres.» Comme portée par l’amour de ses enfants…

 

Parole de pro

Hema Conhyedoss consultante en «wellbeing»  
«Il ne faut pas cacher son handicap à son enfant car il peut tout accepter»

 

L’handicap et la parentalité sont-ils compatibles ?

Quelqu’un qui souffre d’un handicap, mais qui dispose de toutes ses facultés peut tout à fait être parent et fonder une famille. Si cette personne est consciente qu’elle s’apprête à devenir parent, à être responsable d’un enfant qu’elle devra grandir et gérer, il n’y a pas de problème. Souffrir d’un handicap n’empêche en rien le désir et le droit de devenir parent.



Cet état physique a-t-il une répercussion sur le rôle de parent ?

Dans tous les cas, être parent demande un travail psychologique sur soi. Ce travail est encore plus important quand il s’agit d’une personne souffrant d’un handicap. Il faut d’abord que le futur parent accepte son handicap et ses limites physiques. Il faut qu’il soit conscient qu’il y aura des choses qu’il pourra faire et d’autres pas. Ce n’est qu’une fois cette différence acceptée qu’il pourra guider une autre personne qui se trouve dans les mêmes conditions.



Comment expliquer son handicap à son enfant ?

Il ne faut pas cacher son handicap à son enfant car il peut tout accepter. Il sait reconnaître la faiblesse humaine et il ressent toutes les émotions. Et bien sûr, le dialogue est extrêmement important. Il est essentiel de développer une communication avec son enfant, de lui parler de son handicap, de l’expliquer pourquoi on est comme ça. C’est ce qui l’aidera à grandir sereinement.

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