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Vivre avec l’hémophilie au quotidien : un parcours du combattant

22 avril 2014

Asraf Caunhye, le président de l’Haemophilia Association of Mauritius, lors du lancement de la campagne de sensibilisation à ce mal.

C’est un mal qui s’est installé dans leur vie bien malgré eux. Une centaine de Mauriciens vivent au quotidien avec l’hémophilie. Une maladie héréditaire qui se caractérise par la non-coagulation du sang chez ceux qui en souffrent. Ils ont donc des saignements continus et persistants à la moindre égratignure. Cette maladie est due à un manque de protéines (appelées des facteurs de coagulation) dans le sang. Pour une personne atteinte d’hémophilie, il faut compter entre 10 et 11 facteurs absents dans le sang. Mike Galante et Custnea Sooyadeo en savent quelque chose car ils vivent avec ce mal depuis de nombreuses années. 

 

Le premier nommé est hémophile depuis 45 ans. Et malgré des conditions de vie pas toujours faciles, il n’a pas, dit-il, d’autre choix que de faire face à cette maladie. «Je vis normalement. Je suis atteint de cette maladie depuis ma naissance. Je prends mon courage à deux mains pour avancer. Je vais à l’hôpital très souvent afin d’avoir les traitements nécessaires. Je me dope avec des anti-inflammatoires afin de pouvoir supporter les douleurs intenses», témoigne-t-il. 

 

En raison du traitement médical assez lourd auquel il doit se plier et les nombreux rendez-vous à l’hôpital, Mike Galante a perdu son travail il y a trois mois. «C’est sûr que les hémophiles n’ont pas une vie normale. Vu que j’étais souvent absent de mon ancien emploi à cause des traitements fréquents, mon employeur m’a mis à la porte avec une compensation. Je n’ai pas eu d’autre choix que d’accepter. Certes, j’ai du mal à joindre les deux bouts avec ma femme qui ne travaille pas et mes trois enfants, deux filles âgées de 19 et 16 ans, et un fils de 11 ans.» 

 

Étant une maladie héréditaire, l’hémophilie n’a pas épargné les autres membres de la famille de Mike Galante. En effet, 12 d’entre eux ont dû se résigner à vivre avec ce mal. Loin de se laisser abattre, notre interlocuteur «ne baisse pas les bras». Il reçoit le soutien de l’Haemophilia Association of Mauritius (HAM) qui le pousse à avancer. «Je n’ai pas honte de souffrir de cette maladie car tout mon entourage est au courant. On m’accepte comme je suis.» Toutefois, Mike Galante dénonce le manque de traitements adéquats dans le service hospitalier : «Les soins ne sont obtenus que quand l’état du patient est vraiment critique. Il faut vraiment saigner pour recevoir les traitements requis.» 

 

Custnea Sooyadeo, 46 ans, vit, pour sa part, très mal sa situation. Au chômage depuis des années à cause de la maladie, son quotidien est un vrai parcours du combattant. Étant handicapé, il a dû aller se faire opérer en Inde afin de survivre. «J’ai des traitements deux fois par semaine et c’est très difficile pour moi. Je suis marié et père de quatre enfants. Mon quotidien est très dur. Dans le passé, six de mes oncles sont décédés de cette maladie. J’ai peur pour mon avenir. À la moindre petite blessure, j’ai des saignements conséquents», confie-t-il. 

 

Mike Galante et Custnea Sooyadeo racontent leur vie avec la maladie.

 

Le quotidien des hémophiles n’est vraiment pas évident, à en croire ces témoignages. Hélas, ceux qui souffrent de cette maladie n’osent pas toujours en parler. Selon Asraf Caunhye, président de la HAM, «il existe de plus en plus de victimes atteintes de cette maladie à Maurice. Mais comme le sujet est tabou dans l’île, la honte de dire qu’on en est atteint prend le dessus. Les malades ne viennent pas de l’avant pour dire qu’ils en souffrent vu que c’est héréditaire. Les hommes encourent presque 80 % plus de risques d’être touchés par cette maladie que les femmes. Il est conseillé de prendre le sujet au sérieux pendant qu’il est encore temps». 

 

De plus, déplore Asraf Caunhye, les malades ne bénéficient pas toujours de traitements adéquats. Il y a, dit-il, un manque de financement au niveau des transfusions sanguines alors même que si les traitements ne sont pas faits en temps voulu, les hémophiles courent le risque de souffrir de handicaps sévères à l’avenir. Selon Asraf Caunhye, les traitements sont offerts avec la collaboration des secteurs privé et public. «Depuis 2009, le gouvernement nous aide amplement à aider les gens atteints d’hémophilie, mais il y a encore des améliorations à faire ; notamment quand les malades suivent des traitements à l’hôpital; ils doivent attendre longtemps avant d’être soignés», soutient-il. 

 

L’association fait régulièrement des campagnes de sensibilisation afin d’encourager les personnes atteintes à demander de l’aide et à suivre un traitement adéquat pour que leur état de santé ne se détériore pas. À l’occasion de la Journée mondiale de l’hémophilie, observée ce jeudi, l’HAM a lancé sa campagne de sensibilisation à l’hôpital de Candos avec, notamment une activité de body painting pour conscientiser la population sur cette maladie à Maurice. L’association se prépare aussi à faire des appels aux dons les 25, 26 et 27 avril dans toutes les régions de l’île afin de mieux aider, encadrer et soutenir les Mauriciens atteints de l’hémophilie. Afin que ces derniers puissent avoir la chance de jouir d’une vie meilleure.

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