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4 octobre 2025 09:49
Des manifestations violentes sont toujours en cours à Madagascar contre les coupures d’eau et d’électricité. Initiées par des jeunes, elles ont causé au moins 22 morts et plus de 100 blessés selon l’Organisation des Nations unies (ONU), dont des journalistes dans l’exercice de leur fonction. Retour sur une autre semaine mouvementée dans la Grande île.
Rien ne va dans l’île Rouge. Durant la semaine écoulée, Madagascar a connu d’autres fortes manifestations contre les coupures répétées d’eau et d’électricité, touchant particulièrement la capitale Antananarivo. Selon l’ONU, le bilan humain s’élève à au moins 22 morts et plus de 100 blessés, dont plusieurs journalistes dans l’exercice de leur fonction, bien que le gouvernement conteste une partie de ces chiffres. La communauté internationale s’inquiète de l’escalade. La Southern African Development Community appelle au dialogue et à la retenue, tandis que l’ONU et des organisations de défense des droits humains dénoncent l’usage excessif de la force par les autorités. Parallèlement, des gendarmes ont également été admis pour des soins. Deux en sont morts alors qu’ils effectuaient le rétablissement de l’ordre durant les manifestations dans la capitale.
L’agression de plusieurs journalistes en fonction par les forces de l’ordre retient également l’attention. L’Ordre des journalistes malgaches et les victimes ont déjà déposé une plainte pénale au tribunal après les actes de violence à leur égard et aussi pour les matériels endommagés. «Je condamne fermement ces violences envers les journalistes. Il s’agit d’une entrave à l’exercice de la fonction de journaliste, à la liberté d’expression», martèle Alphonse Maka, ancien président du Conseil du Fampihavanana Malagasy. Il appelle les autorités à protéger les manifestants pacifiques. Dans le passé, il a été conseiller auprès du Premier ministre durant la Transition malgache. Il a aussi marqué le paysage médiatique et politique malgache.
L’ancien journaliste de Madagascar Tribune et directeur de publication de La Vérité, défend la liberté de la presse, la réconciliation nationale et la bonne gouvernance. Aujourd’hui, bien qu’à la retraite, il préside le conseil d’administration de l’organisation non gouvernementale Fihavanana – Paix pour Madagascar – afin de poursuivre le processus de réconciliation nationale, visant à éradiquer les crises politiques et assurer une paix sociale durable. Convaincu que «pas de paix, pas de développement», il reste en contact avec les acteurs politiques et la société civile, encourageant le dialogue et la réflexion sur l’avenir du pays. Concernant la liberté de la presse, Alphonse Maka rappelle que la Constitution malgache garantit les libertés d’opinion, d’expression et d’information, avec la dépénalisation des délits de presse.
Sanctions excessives
Cependant, il déplore que des sanctions excessives et des pressions politiques continuent d’exercer une censure indirecte, provoquant l’autocensure parmi les journalistes, surtout en ce moment où le pays est ravagé par des émeutes et les pillages. Les organes de presse étant souvent détenus par des politiciens ou hommes d’affaires, beaucoup de journalistes restent vulnérables. L’absence de protection légale des sources et des lanceurs d’alerte rend l’exercice du journalisme difficile et limite l’accès à l’information. Alphonse Maka souligne l’importance de réformer le Code de communication, en insistant sur la protection des sources et le libre accès aux informations publiques, tout en régulant les nouveaux modes de communication comme les réseaux sociaux.
L’ancien directeur de publication défend également la création d’un syndicat de journalistes pour garantir de meilleures conditions de travail et un salaire décent, soulignant que la corruption et les faibles revenus constituent un frein majeur à l’indépendance journalistique. Pour lui, les médias doivent être un contre-pouvoir et les acteurs de la réconciliation, dénonçant injustices et corruption tout en contribuant à la paix sociale. Il rappelle que l’expérience rwandaise de 1994 montre le rôle critique des médias en période de conflit, et plaide pour que la presse malgache devienne un partenaire privilégié des faiseurs de paix et du développement démocratique dans un pays où rien ne va plus en ce moment.
L’Emmo-Nat : «Tout attroupement considéré comme illégal fera l’objet de mesures strictes»
L’État-major mixte opérationnel national (Emmo-Nat) a averti que «tout attroupement considéré comme illégal fera l’objet de mesures strictes», en particulier lorsqu’il implique le port ou l’usage potentiel d’armes. Dans une déclaration publiée le 2 octobre, l’Emmo-Nat invite les citoyens à éviter toute infraction ou provocation pouvant troubler l’ordre public et encourage la population à poursuivre normalement ses activités quotidiennes. Les forces de défense et de sécurité précisent qu’une surveillance renforcée est en place dans plusieurs zones sensibles, notamment les sites économiques, les points d’approvisionnement essentiels, les écoles, les structures sanitaires et d’autres lieux stratégiques, afin de prévenir tout acte de pillage ou de dégradation.
Le président Andry Rajoelina reçoit les chefs d’Église
Le chef de l’État malgache n’a pas encore désigné de Premier ministre, faute de consensus entre les députés de l’Assemblée nationale. Dans ce contexte de crise, il a reçu, à Lavoloha, les chefs d’Église venus exprimer leurs inquiétudes et apporter leur soutien spirituel à la nation. Selon la présidence, ils ont également prié pour le pays. Sollicités par divers acteurs, dont la société civile et les administrateurs civils, les responsables religieux sont appelés à jouer un rôle dans la recherche d’une issue à la crise. Parallèlement, alors que le député de Manandriana, Fanomezantsoa Andrianjanahary, a lu une déclaration au nom de l’Assemblée nationale, le groupe parlementaire Firaisankina a tenu à s’en désolidariser.
L’opposition exige le respect des droits fondamentaux
Des députés de l’opposition, représentés par Fidèle Razara Pierre, confirment que des discussions ont eu lieu pour trouver une issue à la crise, mais posent comme condition préalable sur le respect des droits fondamentaux, notamment la liberté d’expression et la réouverture de la place du 13-Mai. Ils préviennent que le groupe Firaisankina ne soutiendra pas une déclaration qui ignore les revendications des manifestants. Pour sa part, l’Assemblée nationale rappelle que seule l’application stricte de la Constitution peut résoudre la crise, en insistant sur les articles 45 et 54 relatifs au rôle du président et à la nomination du Premier ministre.
Marc Ravalomanana lance un appel au calme
L’ancien président Marc Ravalomanana exhorte le peuple malgache à soutenir, dans le calme, le mouvement étudiant. Il réclame la libération des étudiants arrêtés, la justice pour les victimes de violences ainsi qu’une réforme en profondeur du système éducatif. Il insiste sur le respect dû aux enseignants et sur la garantie des droits fondamentaux : accès à l’eau, à l’électricité, aux soins de santé et à la sécurité.
«Arrêtez de nous tuer pour nos droits», crie Rayan Raveloson
Le capitaine des Barea, soit l’équipe nationale de football de la Grande île, a publié un post très poignant sur Instagram. Il explique que «l’eau, l’électricité et la sécurité sont des besoins fondamentaux». Il dénonce aussi la répression contre les manifestants et appelle les autorités malgaches au respect des droits élémentaires de la population.
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