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Mois de la maladie d’ Alzheimer

La mémoire en panne mais l’espoir en marche

27 septembre 2025

«La mémoire est la première chose que l'on oublie», dit l'adage... Mais pour les millions de personnes touchées par cette maladie à travers le monde, c'est une réalité quotidienne. Car la maladie d'Alzheimer, cette «voleuse de souvenirs», continue de progresser, laissant derrière elle un sillage de familles dévastées et de patients en quête d'espoir. Mais il y a aussi le mois de septembre. Une petite parenthèse déterminante, observée à travers le monde et qui a fait l'actualité ces derniers jours pour accentuer la sensibilisation au combat autour de la journée mondiale du 21. Ce mois est aussi un moyen de mettre en lumière ce terrible mal, mais aussi de rappeler que la recherche est bel et bien en marche, et que les scientifiques travaillent sans relâche pour comprendre les mécanismes de cette maladie complexe afin de trouver des traitements efficaces. Les avancées sont prometteuses, les pistes se multiplient, et l'espoir renaît. Alors que les médias internationaux relayent en ce moment toutes les avancées pour donner espoir aux familles concernées par la maladie, notre compatriote, le Dr Irfaan Daureeawoo, médecin consultant, formé en gériatrie, expert en maladie de Parkinson et en ostéoporose au East and North Hertfordshire NHS Trust en Angleterre, passe en revue cette maladie qui laisse la mémoire en miettes.

Notre compatriote, le Dr Irfaan Daureeawoo, médecin consultant, formé en gériatrie, expert en maladie de Parkinson et en ostéoporose au East and North Hertfordshire NHS Trust en Angleterre, nous fait un tour d’horizon sur l’actualité autour de la maladie d’Alzheimer.

- Un constat : «La démence est décrite comme étant des troubles neurologiques progressifs, une condition qui provoque une détresse gigantesque, que ce soit psychologique, sociale ou financière, pour les patients, ainsi que pour leurs soignants et leurs familles. La démence est un syndrome marqué par un déclin cognitif progressif et elle est associée à une dégradation des capacités fonctionnelles et, dans de nombreux cas, à des changements comportementaux et psychologiques. Dans le monde, environ 55 millions de personnes sont atteintes de démence, et près de 10 millions de nouveaux cas sont constatés chaque année (1)».

- Une observation : «Souvent, à Maurice ou même dans ma pratique en Grande-Bretagne, les patients ou leurs proches se posent une question : "Est-ce qu’il/elle est atteint(e) de démence ou d’Alzheimer ?" «Line gagn demans ou swa Alzheimer ?» La démence est le terme utilisé pour englober des troubles neurodégénératifs qui provoquent une diminution ou une perte d’autonomie dans les activités de la vie quotidienne (ADL). Quelques types de démence : la maladie d’Alzheimer (principale cause), la démence vasculaire, la démence mixte (Alzheimer et vasculaire), la démence fronto-temporale (plutôt des troubles comportementaux), la démence à corps de Lewy et d’autres types. Mondialement, l’OMS estime que la démence est la septième cause de mortalité et représente l’une des principales causes d’invalidité et de dépendance. En 1906, Aloïs Alzheimer découvre la pathologie comme une condition atypique rare. En 1910, le nom est formellement publié en tant que maladie d’Alzheimer.»

- Les facteurs en question : «Le plus grand facteur pour la maladie d’Alzheimer et d’autres démences est l’âge avancé. D’autres facteurs de risque de démence sont : l’hypertension artérielle, le diabète, l’obésité, le tabagisme, un excès d’alcool consommé, un manque d’activité physique, la dépression et l’isolement social. La maladie d’Alzheimer est observée le plus souvent après 65 ans, où elle concerne environ 3 % de cette tranche d’âge. Elle augmente progressivement pour atteindre plus de 20 % chez les personnes âgées de plus de 80 ans. Ce qui est alarmant, c'est que 75 % des personnes atteintes de démence vivent sans être diagnostiquées. Un des premiers signes de la maladie d’Alzheimer constatés par l’entourage, au même titre que les troubles cognitifs, est une réduction des activités sociales. Au stade initial, le déclin cognitif est subtil et le patient se plaint d’oublis bénins de noms ou d’événements récents qui, par la suite, s’intensifient avec le temps. À ce stade, où l’autonomie est préservée, un diagnostic pré-démentiel ou de trouble cognitif léger peut être envisagé. Avec la progression au stade intermédiaire, d’autres zones cérébrales sont affectées, ce qui mène vers des troubles du comportement, des gestes, du langage et de la reconnaissance.»

- Les symptômes : «La personne touchée commence à solliciter une aide pour certaines activités comme faire ses comptes, gérer les finances, utiliser des équipements du quotidien, se déplacer, gérer son budget, faire à manger, faire sa toilette, etc. À ce stade, un diagnostic de démence est souvent formellement posé. Au fur et à mesure, au stade sévère de cette maladie, les lésions progressent davantage et la récupération des informations devient presque impossible. Les événements et les données du passé disparaissent de la mémoire. La dégénérescence des cellules du cerveau est conséquente. Là, le patient atteint de démence sévère perd son autonomie pour la majorité des actes de sa vie quotidienne. À ce stade, plusieurs patients sont institutionnalisés à cause d’une dépendance accrue et aussi de l’épuisement de l’entourage, des aidants et de la famille.»

- L’impact de la maladie : «L’Alzheimer a des impacts économiques, physiques, psychologiques et sociaux, non seulement sur les patients atteints de démence, mais aussi sur les aidants, les familles et la société en général. Malheureusement, on note souvent des stigmatisations, car la pathologie est mal comprise et connue, ce qui entraîne des entraves dans le diagnostic et les soins. Plus de 50 % des aidants dans le monde estiment un impact sur leur santé en raison de leurs responsabilités de soignant, même s’ils expriment des sentiments positifs à l’égard de leur rôle (3). Au-delà des troubles cognitifs, on détecte souvent des troubles de communication, des pertes partielles ou totales de mots, des troubles de reconnaissance des objets, des personnes, des formes, une incapacité à exécuter des mouvements volontaires. Le diagnostic formel passe par un service de mémoire, dédié à la démence. Ce service multidisciplinaire est composé de gériatres spécialisés en démence, de psychiatres ou de neurologues, de neuropsychologues et d’infirmiers formés à la prise en charge de la démence.»

- La prévention : «Plusieurs études recommandent une bonne hygiène de vie, qui peut contribuer à diminuer le risque de démence et à en retarder les symptômes. Une vie saine peut également prévenir d’autres maladies chroniques qui, à l’inverse, sont liées à une plus grande probabilité de développer un syndrome de démence. Il faut prévenir le diabète, la dépression, l’hypertension, un taux de cholestérol élevé, maintenir un poids de santé. Une prévention contre la perte d’audition, ou l’utilisation des prothèses auditives pour compenser cette perte, peut aussi aider, tout comme le fait de garder une vie sociale active, d’éviter les chutes ou les blessures à la tête. Il est aussi recommandé de stimuler régulièrement le cerveau en apprenant de nouvelles choses et en entreprenant de nouvelles activités. Il est aussi conseillé de garder une vie active et de faire de l’exercice, d’éviter un excès d’alcool et d’avoir une alimentation saine et équilibrée. En cas de dépression, il est important de se faire écouter et de se faire traiter. Il est aussi conseillé d’éviter la pollution de l’air, de maintenir une bonne hygiène de sommeil et de se sevrer du tabac. Le soutien, l’encadrement et les soins devraient être adaptés aux besoins, de préférence individuels.»

- Comment communiquer avec un patient : «La personne atteinte aura progressivement des difficultés croissantes à comprendre autrui et à communiquer. La mise en place d’un environnement et d’une ambiance agréables, en évitant les distractions qui perturbent la concentration, est aussi conseillée. Bien que les aidants rencontrent des difficultés, il est impératif de garder son calme et de rester à l’écoute du patient. Souvent, on note que le ton envers les patients change, mais il est conseillé de communiquer de manière claire, calme et chaleureuse, en évitant d’infantiliser. Il est aussi conseillé d’établir un contact visuel et d’utiliser un langage corporel amical. La communication non verbale reste utile. Il faut absolument éviter les somnifères ou calmants sans approbation d’un médecin spécialisé ou expérimenté dans la démence. J’insisterai aussi sur la demande d’aide pour les personnes prenant soin d’un patient atteint de démence. L’épuisement est réel et mène parfois, inconsciemment, vers une agressivité, de la négligence et du délaissement. Le soutien des aidants et des proches est primordial et la sollicitation d’aides est normale».

- Les symptômes : «Beaucoup de gens ignorent ou minimisent les premiers signes de la maladie d’Alzheimer, les confondant souvent avec le vieillissement normal. En sensibilisant le public, on peut mieux faire connaître les symptômes précoces : perte de mémoire, confusion, difficulté à accomplir des tâches simples, troubles de communication, ce qui peut encourager les gens à consulter un médecin plus tôt. Un diagnostic précoce permet de mettre en place des stratégies de traitement et de gestion qui peuvent ralentir la progression de la maladie, améliorant ainsi la qualité de vie des patients et de leurs aidants»

- Les avancées : «Le traitement de la maladie d’Alzheimer est un enjeu majeur de santé publique. Il fait l’objet de recherches scientifiques continues et de ressources gigantesques. Comme mentionné, des études sont focalisées sur les dysfonctionnements des protéines bêta-amyloïde et tau. Ces études ont permis à une molécule, le lecanemab, d’être approuvée en Amérique, en Chine, au Japon, entre autres, et tout récemment, en août 2024, par la Medicines and Healthcare products Regulatory Agency (MHRA) de Grande-Bretagne pour les stades précoces de la maladie d’Alzheimer. Cependant, le médicament n’est pas encore autorisé par le NICE Guidelines. Le lecanemab fonctionne en ralentissant la progression de la maladie au stade précoce. Il faut souligner que ce débouché médicamenteux majeur, bien qu’étant prometteur et porteur d’optimisme pour l’avenir, reste en cours d’évaluation pour mesurer son efficacité, son coût, ses bénéfices et ses effets secondaires. Cette journée mondiale rappelle la nécessité de soutenir les aidants et de renforcer la solidarité. La Journée mondiale de la maladie d’Alzheimer 2025 est une occasion de rappeler que la mémoire collective, elle, ne doit pas faiblir.»

Les sources pour les recherches du docteur : https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/dementia https://www.alzint.org/about/deme tia-facts-figures/dementia-statistics/, https://www.alzint.org/about/dementia-facts-figures/Gély-Nargeot et al., 2003 et Pasquier et al., 2004 dans Michalon, 2023.

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