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La minute légale avec… Aurélien Oudin, juriste

Le comité disciplinaire en entreprise : garant du droit, rempart contre l’arbitraire

12 juin 2025

Quelles sont les procédures qui doivent être mises en place par votre employeur.e? Avez-vous le droit d’être acompagné.e ? Quels sont les moyens à votre disposition pour faire appel si cela est nécessaire ? Aurélien Oudin (BSc, LL.B, MBA), juriste, répond à ces questions essentielles.

UNE SANCTION ENVISAGÉE

Dans les rouages de la gouvernance d’entreprise, peu de mécanismes incarnent l’équilibre entre autorité et justice comme le comité disciplinaire. À Maurice, l’arsenal législatif, tout particulièrement le Workers’ Rights Act 2019, encadre avec rigueur les procédures à suivre lorsqu’un employeur envisage de sanctionner un salarié pour une faute présumée.

UN COMITÉ IMPARTIAL

Au cœur de ce processus se joue un délicat exercice de pondération : assurer la discipline au sein des effectifs tout en préservant les droits fondamentaux du travailleur. Le comité disciplinaire, s’il est correctement constitué et impartial, devient alors le théâtre d’un juste débat contradictoire, conforme aux principes du «natural justice» ;

LA MISE EN ŒUVRE DU DROIT D’ÊTRE ENTENDU

Dès lors qu’un fait répréhensible est reproché à un salarié, ce dernier doit impérativement être informé par écrit des accusations formulées contre lui. La lettre de convocation à l’audience disciplinaire constitue un acte fondateur, dont la rédaction doit être précise, circonstanciée et exempte d’ambiguïté. Il y est notamment indiqué :

•⁠ ⁠la nature exacte des faits reprochés,

•⁠ ⁠la date, l’heure et le lieu de la comparution,

•⁠ ⁠ainsi que le droit de l’employé à se faire accompagner.

Et c’est ici que la subtilité du droit mauricien se déploie : le salarié peut se faire assister non seulement par un collègue de travail ou un délégué syndical, mais également – en cas de nécessité ou de déséquilibre manifeste – par un officier du ministère du Travail, tel qu’un Labour Officer, ou même par un juriste. Loin d’être anodine, cette provision illustre la volonté du législateur d’offrir une protection concrète aux travailleurs les plus vulnérables.

LA COMPOSITION DU COMITÉ : ENTRE IMPARTIALITÉ ET AUTORITÉ

Un comité disciplinaire digne de ce nom se doit d’être composé de manière neutre et objective, à l’abri de tout conflit d’intérêt. Sa constitution doit refléter à la fois l’autorité de l’employeur et l’impartialité requise pour juger sereinement des faits. On y trouve généralement un membre de la direction, un représentant du département des ressources humaines, et – dans les structures plus complexes – un représentant des salariés.

Il est fortement recommandé, dans les cas les plus sensibles, que le comité soit conseillé par un juriste d’entreprise ou consultant en droit du travail, afin de s’assurer de la régularité de la procédure et d’éviter tout vice susceptible d’être invoqué ultérieurement.

LE DÉROULEMENT DE L’AUDIENCE DISCIPLINAIRE

Au cours de la séance, le salarié est invité à exposer librement sa version des faits, à produire des éléments de preuve et à faire entendre ses témoins. Le principe de l’égalité des armes exige que l’audience soit équitable et que le salarié ait un délai raisonnable pour préparer sa défense.

Le comité est tenu de consigner l’intégralité de la séance dans un procès-verbal officiel, retraçant fidèlement les échanges, déclarations et décisions.

DÉLIBÉRATION, SANCTION ET DROIT DE RECOURS

À l’issue de l’audience, les membres du comité se retirent afin de délibérer. Leur décision doit être motivée, mesurée et proportionnée à la gravité de la faute commise. Elle peut aller de l’avertissement écrit à la suspension disciplinaire, voire – dans les cas les plus extrêmes – au licenciement pour faute grave.

Toutefois, l’employé conserve un droit de recours. Il peut :

•⁠ ⁠adresser une requête en appel au sein de l’entreprise, si un tel mécanisme est prévu ;

•⁠ ⁠solliciter une conciliation auprès de la Commission for Conciliation and Mediation (CCM) ;

•⁠ ⁠ou porter l’affaire devant l’Employment Relations Tribunal (ERT), voire devant les juridictions compétentes.

CONCLUSION : LA PROCÉDURE DISCIPLINAIRE, UN ACTE DE GOUVERNANCE RESPONSABLE

Le comité disciplinaire ne saurait être réduit à une simple formalité administrative. Il est, en réalité, l’incarnation d’une justice interne en entreprise garante de la paix sociale et du respect du droit. Dans un État de droit comme Maurice, il appartient aux employeurs - assistés de leurs conseillers juridiques – de respecter scrupuleusement les exigences procédurales, faute de quoi toute sanction pourrait être invalidée par les instances compétentes.

L’exigence de rigueur n’est pas un fardeau, mais un gage de crédibilité. Car, au fond, qu’est-ce que le droit disciplinaire, sinon l’application du droit dans l’entreprise au nom de l’ordre, de l’équité et de la justice ?

Vous pouvez contacter Aurélien Oudin à travers son entreprise spécialisée en legal services, Find Law : 5768 6840.

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