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31 mars 2025 10:38
L’ancien Chief Police Medical Officer a pu déposer au tribunal de Souillac dans le cadre de l’enquête judiciaire instituée par le Directeur des poursuites publiques pour faire la lumière sur le décès troublant de Pravind Kanakiah. Le Dr Satish Boolell a déclaré qu’il y a une possibilité que cet ancien employé du ministère des Finances ait été victime d’un acte malveillant. Récit.
«Foul play cannot be excluded.» C’est en ces termes que le Dr Satish Boolell a mis fin à son audition devant le tribunal de Souillac dans le cadre de l’enquête judiciaire instituée pour faire la lumière sur le décès troublant de Pravind Kanakiah. La dépouille de ce fonctionnaire avait été retrouvée à la Roche-qui-Pleure le 11 décembre 2020, au lendemain de sa mystérieuse disparition. Dans son rapport d’autopsie, le Dr Sudesh Kumar Gungadin, actuel Chief Police Medical Officer, a attribué son décès à une «traumatic subarachnoid haemorrhage». Refusant de croire à un accident ou un suicide, son épouse Reshmee Kanakiah a aussitôt entamé des démarches pour réclamer une contre-autopsie.
Le Dr Satish Boolell, ancien chef du département médico-légal de la police, avait été approché à cet effet. C’est d’ailleurs pour cette raison que Me Damodarsingh Bissessur, Senior State Counsel, a souhaité l’auditionner devant la magistrate Ameerah Dhunnoo qui préside les travaux de l’enquête judiciaire. En cour, le Dr Boolell, qui travaille désormais comme Freelance Consultant in Forensic Medecine, a expliqué qu’il n’y a jamais eu de contre-autopsie, même s’il confirme qu’il y a eu une requête dans ce sens. Il avait été contacté par Rama Valayden, a-t-il précisé, qui lui avait demandé de se rendre à la morgue de Candos. Il y avait rencontré le Dr Sudesh Kumar Gungadin.
Le Dr Boolell a déclaré avoir rencontré la veuve Kanakiah là-bas. «J’ai téléphoné à Valayden pour lui dire qu’il n’y aura pas de contre-autopsie. Il m’avait dit de carry on. J’avais déjà parlé au Dr Gungadin. Il était d’accord pour que je l’assiste dans l’examen de la dépouille de Kanakiah. Il avait partagé ses findings avec moi. Il m’avait aussi communiqué la cause du décès et la raison qui l’avait poussé à arriver à cette conclusion. I just agreed with his findings. The cause of death was acceptable. Je lui ai dit que je n’avais pas l’intention de faire une contre-autopsie car la famille n’avait pas retenu mes services officiellement pour le faire. I was not instructed. Pourtant, j’avais accordé 10 minutes de réflexion à la veuve Kanakiah à cet effet.»
Or, selon Me Bissessur, Reshmee Kanakiah et Deepak Rutnah affirment le contraire. «Il n’y a eu aucun accord entre eux et moi», martèle le Dr Boolell. Et d’ajouter : «Je ne connais pas Deepak Rutnah. Valayden m’avait téléphoné vers 20 heures ou 21 heures, le 12 décembre 2020. Le Dr Gungadin m’avait dit qu’il avait déjà pratiqué une autopsie la veille. Il m’avait aussi dit que les proches de Kanakiah voulaient faire une contre-autopsie car ils ne l’avaient pas reconnu après sa mort. Sa peau avait, entre autres, noirci. À un certain moment, j’ai parlé à la veuve. Elle m’avait répondu : “Mo bizin dimann mo bofrer”. Elle n’est jamais revenue vers moi. J’ai alors téléphoné à Valayden pour lui faire part de la tournure des événements.»
Le Dr Boolell a également confié qu’il ne savait pas si les services de Rama Valayden avaient été retenus par les proches du défunt. Il est ensuite revenu sur le constat qu’il a fait sur la dépouille de Kanakiah. «J’ai vu le corps. J’ai vu les blessures. Je confirme la cause du décès du Dr Gungadin. La victime a succombé à un coup au cou. Il a eu une dislocation de la colonne vertébrale. C’est cela qui a causé l’hémorragie qui a eu raison de lui. A blunt blow may lead to this.» Il a confirmé que Kanakiah n’avait pas de fracture au crâne. «Il avait des blessures au cou. Il est possible qu’il a été victime d’un karate shock. Ses blessures n’étaient pas self-inflicted. Il n’est pas mort après une chute. Foul play cannot be excluded.»
Lors de son audition précédemment, le Dr Gungadin avait, entre autres, déclaré que Kanakiah avait un total de 16 blessures sur le corps. Il n’avait toutefois aucune fracture au crâne, aux jambes, aux bras ou aux autres membres. L’actuel Chief Police Medical Officer avait également souligné que l’homme ne s’était pas noyé à la Roche-qui-Pleure, qu’il était déjà mort lorsque son corps est tombé à l’eau. Selon ses dires toujours, Kanakiah avait eu certaines blessures avant de mourir. Il en avait eu d’autres pendant et après la mort. Il aurait aussi eu des «post mortem injuries» lorsque son corps avait eu des frictions avec les récifs. Le Dr Gungadin avait aussi précisé que «the pattern of the injuries are obvious», que les dents de Pravin Kanakiah étaient intactes et qu’il ne s’était pas mordu la langue.
En cour, le chef actuel du département médico-légal de la police n’avait pas écarté la possibilité que le fonctionnaire ait été victime d’un foul play. Il avait évoqué deux possibilités : soit Pravin Kanakiah est mort lorsque sa tête a «hit a hard surface», soit il a succombé à ses blessures suivant des «blunt forces applied to the head at various places». Le Dr Gungadin avait aussi avancé que la victime «has most likely passed away» avant d’entrer en contact avec l’eau de mer. «This is not a case of drowning», avait-il affirmé avant d’ajouter qu’«il n’y avait pas d’eau dans les poumons du défunt». Suite à une question de la magistrate Dhunnoo, le Dr Boolell a, pour sa part, souligné qu’il y aurait peut-être eu d’autres findings s’il avait pu pratiquer une contre-autopsie.
Les travaux de l’enquête judiciaire se poursuivent ce mercredi 2 avril. L’assistant surintendant de police Hemandass Ghoorah, ancien responsable de la Major Crime Investigation Team, sera le principal témoin du jour.
Me Bissessur, Senior State Counsel : «Il y a eu une confusion sur le renvoi de la précédente séance»
Tout est parti d’un malheureux malentendu. Damodarsingh Bissessur a tenu à faire un statement en cour pour expliquer le renvoi de la séance du vendredi 21 mars après avoir pris note du coup de gueule du Dr Satish Boolell. L’ancien responsable du département médico-légal de la police n’avait pas caché sa colère lors de sa précédente audition lorsqu’il avait appris que le Senior State Counsel avait demandé un renvoi de la séance du jour. «Il y a eu une confusion sur le renvoi de la précédente séance», a souligné le représentant du State Law Office.
Me Bissessur n’avait pas avancé de raison officielle pour soutenir sa demande pour la séance du vendredi 21 mars. Il a toutefois tenu à le faire lors de la séance suivante, soit le lundi 24 mars. Me Bissessur explique qu’il était en communication avec le Police Prosecutor du tribunal de Souillac, qui lui a fait comprendre que l’huissier qui devait «summons» le Dr Satish Boolell n’avait pu le rencontrer personnellement «despite several attempts». Le Senior State Counsel affirme que l’ancien Chief Police Medical Officer «was not in attendance».
C’est par le biais de la presse qu’il a appris que celui-ci avait pris connaissance de la «summons letter» lorsqu’il l’avait retrouvée dans sa boîte aux lettres. Me Bissessur a soutenu que personne ne l’avait informé de la présence en cour du Dr Boolell, le vendredi 21 mars. Il a précisé qu’il se trouvait à Port-Louis où il avait déjà pris d’autres engagements professionnels après avoir appris que l’huissier n’avait pu remettre la «summons letter» en main propre à l’ancien légiste. C’est la raison de sa demande de renvoi.
Outham Appadoo, le beau-frère de la victime : «Li pa ti ena okenn rezon pou swisid li»
L’audition d’Outham Appadoo, le beau-frère de Pravin Kanakiah, s’est poursuivie le lundi 24 mars. Cet habitant d’Union-Vale, à Trois-Boutiques, a été le premier à être auditionné ce jour-là. Me Damodarsingh Bissessur lui a adressé plusieurs questions précises. L’une d’elles concerne le home loan contracté à la SBM par le couple Kanakiah ainsi que leur life insurance. Le Senior State Counsel a ensuite voulu avoir des réponses de ce comptable sur tous les événements qui ont suivi la mystérieuse disparition de l’ancien fonctionnaire. Celui-ci avait été «reported missing» le 10 décembre 2020. Sa dépouille a été repêchée à Roche-qui-Pleure, le lendemain. Le Dr Sudesh Kumar Gungadin a pratiqué une autopsie le même jour, dans la soirée. Il a attribué le décès à une «traumatic subarachnoid haemorrhage». Les funérailles de Pravin Kanakiah ont eu lieu le lendemain.
Me Bissessur a voulu savoir pourquoi Outham Appadoo a accompagné sa sœur Reshmee à la SBM pour faire une «claim» deux jours plus tard. «Mo ser ti fek sanz travay. Li ti ankor lor probation. Li ti gagn zis sink zour konze. Linn profite pou fer tou demars vit. Ti ena demars afidavit, leta sivil ek dan enn lot labank. Mo ti amenn li partou momem. Mo ti pe konsey li momem. Li ti ena loan pou peye lafin di mwa. So misie ti fek mor. Li ti enn single earner aster. Ti enn moman dir pou lafami. Mo ser ti ankor pe esey konpran kinn arive», s’est-il souvenu.
Me Bissessur lui a alors demandé pourquoi il y a eu tout cet empressement pour les démarches alors que la famille venait de faire les funérailles. Le Sudiste avance que sa sœur craignait de perdre son emploi. C’est aussi pour cette raison qu’elle a entrepris toutes ses démarches rapidement. Peu après, le Senior State Counsel a interrogé Outham Appadoo concernant sa présence aux côtés de sa sœur après l’autopsie. Il a confirmé que la police lui avait remis les vêtements de son beau-frère après cet exercice avant de les reprendre pour les besoins de l’enquête. Il a dit ne pas se souvenir de quel jour il s’agissait précisément. Il a également assuré ne pas se souvenir dans quel poste de police sa sœur et lui s’étaient rendus pour déposer les vêtements.
La série de questions suivantes était axée sur le Dr Satish Boolell. L’habitant d’Union-Vale est alors revenu sur l’épisode d’un groupe WhatsApp dont un collègue de son beau-frère était membre, de même que l’avocat Deepak Rutnah. «Deepak Rutnah ti dir koleg mo bofrer ki ena prev foul play», a-t-il dit, avant de préciser : «Deepak Rutnah ti pran kontak ek mo ser. Se apre ki nou finn desid pou fer enn kont-otopsi. Avoka lamem ti pran kontak ek Dr Boolell. Mo ti prezan ek mo ser le 12 desam 2020 dan lamorg Candos. Enn lot bofrer ti ansam ek nou.» Outham Appadoo a aussi confié qu’il n’a pas vu le rapport de la contre-autopsie. Il a également affirmé ne pas se rappeler si le Dr Boolell «ti koz ek fami apre».
Me Bissessur s’est ensuite intéressé aux liens entre le Sudiste et son beau-frère. «Linn res kot nou preske de zan. Nou ti zwen toulezour. Mo bofrer ti touzour pozitif. Li ti bien antousias pou ranz lakaz. Li ti plante. Li ti kontan so bann fler. Li ti extra kontan so garson. Mo ser ek li ti fini plan enn deziem zanfan. Li ti bien responsab. Li ti pe okip bann bil so mama mem si zot ti nepli res ansam», a déclaré Outham Appadoo. Me Bissessur est ensuite revenu à la charge avec une autre série de questions sur la mésaventure de sa sœur lors de ses démarches pour réclamer une contre-autopsie. «Lapolis pa ti tro keen pou nou fer enn kont-otopsi. Mo ti dan stasion ek mo ser kan enn lapolis ti mal koz ar li ek ousi kan sa mem lapolis-la ti pran li dan enn van. Mo ti swiv zot dan loto sa zour-la ek enn lot bofrer», a raconté le frère de Reshmi Kanakiah.
L’habitant d’Union-Vale a aussi déclaré que son beau-frère n’a montré «okenn sign depresion». Il a affirmé que ce dernier «ti touzour pozitif». Il avait aussi un grand «respe pou so lantouraz». «Li ti kouma enn gran frer pou mwa. Linn fer boukou sakrifis pou ranz so lakaz. Li pa ti ena okenn rezon pou swisid li.» Pravin Kanakiah travaillait comme Procurement & Supply Officer. Il était employé par le ministère des Finances et était affecté à la Government Analyst Division, à Réduit.
La magistrate Ameerah Dhunnoo s’est, elle, intéressée aux fameuses photos du cadavre de Pravin Kanakiah. «Mo ti prezan kan Deepak Rutnah inn pran kontak ar fami. Li ti koz foto. Li ti fini dir nou pa swisid sa me murder. Li ti dir nou al fer kont-otopsi. Li ti konsey nou al stasion. Li ti montre nou foto apre. Lor enn bann foto-la trouv lekor mo bofrer lor disab. Mo pa tro rapel lezot. Mo zis rapel ki ti ena blesir selman lor so lekor. Li pa ti dir nou kot linn gagn bann foto-la selman. Nou ti ankor dan sok. Nou pa ti poz li kestion kot linn gagn sa. Ti enn moman difisil pou nou. Mo ser ti vinn res kot nou apre. Mo ti pe ed li pou tou so bann demars. Nou tou bien pros dan fami», a précisé Outham Appadoo
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