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L’Escalier | Nou Tou Ansam : petite maison, grande mission

6 septembre 2018

Reana Thisbé et Suzette Labour mettent tout en œuvre pour que les bénéficiaires puissent s’épanouir.

Dans ce petit village du Sud, un nouveau mouvement est en marche. C’est à La Baraque, l’un des quartiers de la localité, qu’il prend forme et vie tous les jours. Pour le découvrir, il faut emprunter le chemin qui mène au moulin d’Omnicane. C’est non loin de là, dans une cour à la végétation luxuriante, que se trouve la maison communautaire de L’Escalier. Alors que tout le village semble vivre au ralenti, ici on apprend à avancer, à se dépasser, à se surpasser pour que demain et les jours à venir soient meilleurs.

 

Travailler main dans la main pour faire avancer le village, ses habitants et toute la communauté. Accompagner les personnes vulnérables pour qu’elles puissent sortir de leurs conditions de vie et grandir, soutenir les femmes afin  qu’elles puissent devenir autonomes et indépendantes, guider les jeunes pour qu’ils trouvent leur voie et ne succombent pas aux fléaux qui guettent. C’est là toute la raison d’être de Nou Tou Ansam, la maison communautaire de L’Escalier, qui a été inaugurée il y a quelques jours.

 

C’est en effet dans ce village du Sud que le dernier projet communautaire des fondations ENL et Omnicane, en collaboration avec Caritas, a vu le jour. «Caritas a mené, en 2014, une étude sociale dans la région à la demande d’ENL et d’Omnicane qui voulaient s’impliquer socialement auprès des habitants. Nous avons alors évalué les manquements et les besoins de L’Escalier, ce qui nous a permis de mettre sur pied le projet de développement communautaire. Nous avons commencé nos premières activités en 2016 et le 7 avril, Nou Tou Ansam a été officiellement inaugurée», explique Suzette Labour, coordinatrice du projet.

 

Ici, petits et grands apprennent à lire et à écrire, les enfants jouent au foot ou prennent des cours de musique et les femmes suivent des formations de cuisine, d’artisanat et d’entrepreneuriat. Chaque jour, les bénéficiaires sont accueillis par Suzette Labour, responsable de la maison communautaire, qui a été récemment rejointe par Reana Thisbé. 

 

Rassembler les habitants

 

L’objectif de Nou Tou Ansam, disent-elles, est de permettre et favoriser l’épanouissement socio-économique de l’habitant et de la communauté pour qu’ils puissent vivre en toute autonomie. «Notre but premier est l’autonomisation des personnes vulnérables. Plusieurs familles ici vivent dans des conditions pas toujours évidentes et la maison communautaire est là pour leur offrir un endroit sûr où elles peuvent apprendre, comprendre, se développer à travers l’éducation et les activités, afin de progresser dans la vie», confie Suzette Labour.

 

L’idée, poursuit Reana Thisbé, c’est aussi de réunir et de rassembler tous les habitants de L’Escalier pour qu’ils puissent, ensemble, transformer leur village en un meilleur endroit où vivre. Pour cela, le défi, c’est de les rendre socialement actifs. «Ici, nous accueillons tout le monde, toutes les communautés. Nous mettons aussi beaucoup d’accent sur la réunification de tous les quartiers de L’Escalier. Aujourd’hui, tout le monde reste un peu dans son coin : Malakoff, Plein Bois, L’Escalier centre, Tagore, La Sourdine. Nous devons briser les tabous, les barrières et changer les mentalités pour que tous puissent enfin se réunir et travailler à l’avancement de notre village.»

 

Depuis l’ouverture de la maison communautaire, il y a, confie Suzette Labour, comme un lien qui s’est créé entre les habitants du village. «Notre équipe d’animation est constituée de plusieurs personnes venant chacune d’un quartier du village. Nous avons une participation active de tous les membres pour la réalisation des différents projets du centre qui répondent parfaitement aux besoins des habitants.»

 

C’est ensemble qu’ils aborderont les problèmes et essaieront de trouver des solutions. Le train, en tout cas, est déjà en marche. «Nous remarquons que la drogue a fait son entrée dans notre village, parmi nos jeunes. Nous organisons chaque mois une causerie, sur la drogue ou le sida par exemple. Nous organisons aussi des rencontres avec les forces vives du quartier et les chefs religieux pour voir comment travailler main dans la main», lance Reana. Un autre des nombreux objectifs de ce nouveau mouvement : lancer une plateforme communautaire pour le village de L’Escalier.

 

Depuis sa mise en opération, la maison communautaire tourne à plein régime. Entre l’accompagnement scolaire trois fois par semaine, l’école de foot pour les 8-14 ans qui remporte un franc succès, les classes de guitare et de clavier, les cours d’artisanat, d’alphabétisation pour les adultes, les ateliers de travail, les causeries et les activités extrascolaires, il y a de quoi faire. Et ce ne sont pas les projets qui manquent. Outre celui de mettre sur pied la plateforme communautaire, Nou Tou Ansam compte notamment lancer bientôt sa librairie pour donner aux petits comme aux grands le goût de la lecture.

 

Parole aux bénéficiaires

 

Mariella Narainsamy : «On peut apprendre à tout âge»

 

«Cela fait quelques années que je suis à la maison. J’ai longtemps travaillé pour pouvoir aider ma famille. J’ai même travaillé dans trois maisons en même temps. Et puis, j’ai tout arrêté. Depuis que je viens ici, j’ai appris énormément de choses. La première, c’est qu’on peut apprendre à tout âge. J’ai suivi plusieurs formations : la cuisine, l’artisanat et l’entrepreneuriat, qui ont éveillé en moi le désir de lancer ma petite affaire. J’ai appris à faire du patchwork, du linge de maison et des décorations pour l’intérieur. Ça demande beaucoup de travail. Il faut tracer, couper, coudre mais c’est aussi beaucoup de plaisir. Avec deux amies, nous avons décidé de tenter l’aventure. Nous allons bientôt lancer une page Facebook sur laquelle nous mettrons des photos de nos créations. Ensuite, nous allons progressivement lancer notre business.»

 

Suzanne Kettary : «J’arrive à lire et à écrire»

 

«Nou Tou Ansam a amené un grand changement dans ma vie. Outre le fait de ne plus passer mes journées à la maison, de sortir, de venir rencontrer du monde, de discuter, de partager avec les autres, j’ai surtout appris à lire et à écrire grâce aux cours d’alphabétisation. Au début, ce n’était certes pas facile mais les efforts en valaient la peine. J’ai arrêté l’école en sixième et tout le long de ma vie, ne pas savoir lire et écrire a été un vrai handicap. Aujourd’hui, c’est un peu une nouvelle vie pour moi. J’arrive à lire et à écrire. Je me débrouille. Je peux aller à la banque pour faire mes démarches, signer des papiers, aller dans des bureaux sans avoir honte. Petit à petit, j’ai fait des progrès. Aujourd’hui, j’arrive à lire des choses à mes petits-enfants et à leur expliquer des petits trucs. J’arrive même à envoyer des SMS. Et pourquoi pas, bientôt, être sur Facebook ? (rires)»

 

Priya Félix :  «Devenir indépendante financièrement»

 

«Je suis maman de trois filles qui prennent toutes des cours de musique ici, grâce à Nou Tou Ansam. Cela fait des années que je ne travaille pas. Je passais mes journées à m’occuper de la maison, à attendre mes enfants rentrer de l’école, à préparer le repas, à regarder la télé. Je me sentais souvent seule, stressée et je m’ennuyais. Lorsque je suis venue à la maison communautaire, ça a été pour moi le début de quelque chose de nouveau. Ici, je rencontre d’autres dames comme moi, avec qui je partage beaucoup de choses. On apprend énormément grâce à toutes ces formations et ça nous pousse à rêver d’autre chose. J’ai suivi des cours de cuisine, d’entrepreneuriat et d’artisanat. Aujourd’hui, je me dis que je peux me lancer à mon compte et proposer mes petits produits d’artisanat. Ce sera l’occasion de me débrouiller par moi-même et de devenir indépendante financièrement.»

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