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19 mai 2025 16:22
Réduire, réutiliser, recycler et donner au lieu de jeter. Éviter le gaspillage et mieux gérer ses déchets est aujourd’hui devenu une nécessité. BazZeroGaspiyaz a récemment ouvert une nouvelle boutique au cœur de Port-Louis, où l’on peut trouver des vêtements, des livres, des accessoires et des articles divers de seconde main, à des prix justes. Nathalia Vadamootoo, la coordinatrice, nous parle de cette démarche à la fois sociale et environnementale.
BazZeroGaspiyaz a récemment ouvert un nouveau thrift shop, le premier à Maurice situé dans un shopping mall de la capitale. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?
Le thrift shop existe depuis juin 2020. Il était à Buckingham, près de la rue Hugnin à Rose-Hill. C’était comme notre école : on a appris plein de choses sur les clients, comment expliquer le thrift, comment encourager les gestes écologiques, comment aménager les vitrines et gérer l’espace.
Après deux ans à Buckingham, nous avons déménagé dans le centre de Rose-Hill, dans un espace plus grand, non loin du ministère de la Sécurité sociale. Nous voulions être plus accessibles aux personnes qui se rendaient au ministère pour demander des aides ou des subsides, et nous avons eu l’opportunité d’apprendre encore plus sur le développement d’unités de microproduction à partir du recyclage et sur l’identification des familles pouvant bénéficier de notre programme de gestion de la pauvreté.
En 2024, nous avons transféré toute la structure au Victoria Urban Terminal pour nous concentrer sur l’éducation et la sensibilisation à la réduction des déchets solides, enjeu crucial face au problème de l’enfouissement à Mare-Chicose. Nous espérons innover dans l’éducation écologique grâce au passage massif de personnes chaque jour dans cette gare. Nous avons ainsi un seul point de thrift, qui nous permet de remplir deux objectifs : le premier, changer la perception des Mauriciens par rapport à la réutilisation, et le second, promouvoir une consommation responsable, ce qui a forcément un impact positif sur la protection de l’environnement.
À quoi le public peut-il s’attendre ?
Tout d’abord, je dois remercier tous les Mauriciens qui acceptent de «donner au lieu de jeter» et qui complètent le cycle de la consommation responsable : cela signifie qu’ils donnent ce qu’ils ne souhaitent plus garder, mais aussi qu’ils viennent au thrift shop pour s’habiller seconde main ou réutiliser des objets.
Ils peuvent trouver tout type d’objets bien conservés par leur ancien propriétaire, en bon état – car nous testons tout et effectuons des réparations si nécessaire. Tout est propre et de qualité, mais attention : ce sont des pièces uniques. Voici la liste : vêtements, chaussures, livres, jouets, décoration, vaisselle, etc.
Nous avons aussi une réserve non exposée à Port-Louis, divisée en trois groupes : les objets nécessitant réparation, les kits zéro déchet, et les matériaux destinés à des projets artistiques, défilés de mode, programmes de stimulation de la créativité en entreprise ou parcs thématiques.
Rappelez-nous les principaux buts de BazZeroGaspiyaz ?
BazZeroGaspiyaz (BZG) est une marque écologique, créée le 4 juillet 2022, fruit de plus de 11 ans d’expérience dans la récupération, la revalorisation et la remise en circulation d’objets déjà utilisés.
L’objectif principal de BZG est d’agir et d’innover pour changer les habitudes des Mauriciens en matière de gestion des déchets solides. Cela permet de réduire la taille des poubelles dans les ménages, les commerces et les entreprises, et de limiter les pertes et gaspillages.
Nous avons aussi un autre objectif : la recherche et le développement de structures industrielles axées sur une gestion des déchets respectueuse de l’environnement et du consommateur.
Vous avez des objectifs écologiques et sociaux. Pourquoi est-il important de prendre de tels engagements aujourd’hui ?
Depuis longtemps, les décideurs ne prennent pas en compte le caractère pluridisciplinaire des problèmes qui affectent l’île Maurice. Par exemple, la réduction des déchets solides n’est pas qu’un problème social ou écologique, mais aussi économique, voire énergétique. Les solutions sont elles aussi interdisciplinaires.
Il est primordial d’arrêter de compartimenter les sujets, car cela ralentit l’action et le développement. La coopération interministérielle, la recherche appliquée et l’aide technique internationale doivent devenir les piliers du changement que l’île Maurice requiert.
C’est important de prendre de tels engagements, car dans la course effrénée au profit, on a oublié la planète. Et l’humanité ne peut pas vivre ailleurs. En revanche, la Terre, elle, pourrait vivre sans nous, se dépolluer et se réparer.
Grâce à l’action de BazZeroGaspiyaz, et surtout à notre éducation adressée aux Mauriciens, nous rendons possible l’économie circulaire et la réduction des déchets à l’échelle des foyers, commerces et entreprises. Ces processus sont souvent perçus comme trop techniques ou complexes. Nous adoucissons cette perception par exemple à travers l’éducation au tri, à la qualité des matières, etc. Nous espérons étendre notre couverture nationale pour permettre à tous les Mauriciens d’adopter des gestes écologiques et de mieux vivre avec la nature et l’océan.
Comment, selon vous, peut-on faire avancer la cause de la maîtrise des déchets solides ?
La crise est déjà là, mais on continue à envoyer des camions d’ordures à l’enfouissement, avec toutes les conséquences négatives : pollution de l’eau, de l’air et des sols. C’est le problème le plus grave lié à la mauvaise gestion des déchets solides.
Il est urgent que chaque Mauricien fasse en sorte de réduire la taille de sa poubelle. Pour faire avancer la cause et intégrer l’économie circulaire dans le quotidien, il faut s’informer. Car la réduction des déchets n’est pas réservée aux écologistes ou travailleurs sociaux.
Si vous n’êtes plus satisfait de votre emploi, si vous ressentez le besoin de transformer votre existence, si votre quotidien n’a plus de sens, si vous avez envie d’explorer votre créativité, votre talent… BazZeroGaspiyaz peut vous aider à trouver une nouvelle voie d’expression, de création et d’entraide grâce aux déchets évités, qui deviennent une opportunité pour ceux qui osent devenir maîtres d’eux-mêmes.
Si vous connaissez des personnes ou familles en difficulté, merci de leur parler de BZG. Nous avons la capacité de faire des études de marché et de créer des structures productives à partir de déchets évités. Ces unités productives enrichissent notre modèle d’économie circulaire, qui offre des alternatives à l’importation et à la passivité du système économique actuel.
Je profite de cet entretien pour inviter les lecteurs à changer leurs habitudes grâce à ces gestes simples :
Mettre dans des contenants séparés le papier, le plastique, le métal et le verre, et les déposer une fois par mois dans les lieux de collecte mis en place par certaines associations et centres commerciaux. Vous trouverez les lieux les plus proches sur internet.
Ne jetez pas ce qui peut encore servir à quelqu’un d’autre.
Créez chez vous un point de compostage avec les épluchures et les déchets de jardinage.
Achetez de manière responsable, et réfléchissez à la fin de vie de ce que vous consommez.
Jeter dans la poubelle est devenu un geste automatique. J’aimerais que chaque Mauricien se pose cette question à chaque achat : «Comment vais-je me débarrasser de cet objet quand je n’en aurai plus besoin ?»
Nous avons construit l’idée qu’il suffit de jeter pour bien faire. Mais il n’y a plus de place pour les poubelles. Il est donc urgent de prendre conscience et de pratiquer les gestes zéro déchet et anti-gaspillage.
Avez-vous d’autres projets à venir ?
Le public réagit très bien. Il y a de la curiosité, une envie de mieux faire, de réduire la taille de sa poubelle. Les visiteurs aiment flâner dans le thrift shop, acheter seulement ce dont ils ont besoin, se balader comme dans un musée et se laisser surprendre par nos pièces uniques.
Il y a aussi des propositions, des suggestions, des partages. Je vois que les mentalités évoluent et continueront à le faire, pour qu’un jour, nous devenions une île propre, organisée et bien gérée. Un macro-projet pour transformer la gestion des déchets s’impose, afin que nous puissions atteindre le niveau de performance des pays développés.
Dix gestes écoresponsables pour éviter le gaspillage
Apprendre à reconnaître et acheter de la qualité : elle dure plus longtemps, s’abîme moins et les matériaux sont souvent beaux et nobles.
Acheter vintage et seconde main pour réutiliser au maximum, diminuer les dépenses et éviter la saturation de Mare-Chicose.
Analyser ses achats, vérifier s’il existe des alternatives plus saines ou moins polluantes.
Recycler plastique, papier, verre et métal séparément, pas dans la poubelle de la cuisine.
Mettre au compost toutes les épluchures et les restes de jardinage.
«Donner au lieu de jeter» : ne mettez pas à la poubelle ce qui peut être utile à quelqu’un ou réparé.
Offrir ou recevoir des cadeaux vintage et seconde main encourage la réparation, la réutilisation et l’économie sociale.
Éviter le plastique autant que possible ; privilégier les matériaux durables comme le bois, le cuir, le métal, la céramique, le verre ou la pierre, et s’assurer d’une production responsable.
Bien utiliser sa machine à laver pour prolonger la durée de vie des vêtements.
Se méfier des publicités : elles peuvent vous pousser à acheter ce dont vous n’avez pas besoin.
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