Mala Chetty : «J’estime que Maurice reste quand même un pays où il fait bon vivre»
Rajen Valayden : «Les honnêtes citoyens ont un droit légitime de vivre
en paix»
Des cambriolages qui se succèdent, une bande organisée qui sévit… Plusieurs cas de vol ont été signalés ces derniers temps. L’insécurité est-elle en hausse ? Mala Chetty, fondatrice de «Grand-Baie Watch», et Rajen Valayden, de l’association «Right 2 Live», nous donnent leur avis sur le sujet.
Depuis quelque temps, les cas de vol se multiplient dans l’île. Votre réaction ?
▲ Mala Chetty : Est-ce qu’il y a trop de chômeurs à Maurice ? Est-ce que cela découle de l’appauvrissement de la population ? Je n’excuse absolument pas ceux qui commettent des vols, mais je me demande seulement ce qui peut provoquer cette recrudescence dans le nombre de vols à travers l’île.
▼ Rajen Valayden : C’est un indicateur majeur de la situation sociale. La pauvreté ne justifie pas le vol, mais expliquerait le phénomène. Sur le terrain, on rencontre beaucoup de personnes qui vivent dans des conditions si précaires que, parfois, elles vous disent : «Nou zenfan pe dormi vant vid, nou leker fermal ek ena foi bann move panse mont dan latet.» Mais notre constat est que la grande majorité des vols sont commis par des toxicomanes qui sont prêts à tout pour leurs doses quotidiennes.
L’insécurité gagne-t-elle du terrain, selon vous ?
▲ Mala Chetty : On constate, de nos jours, que les Mauriciens ont peur. Ils ont peur de marcher le soir, les femmes craignent de sortir seules. Il y a, selon moi, une exagération, car j’estime que Maurice reste quand même un pays où il fait bon vivre. Plus il y a un fort taux de chômage, plus il y a de la délinquance. Cela est prouvé.
▼ Rajen Valayden : L’insécurité a atteint un niveau sans précédent. Les Mauriciens, du moins les honnêtes citoyens, vivent dans la peur. L’inefficacité et le manque de confiance en nos institutions ne peuvent qu’accentuer cette psychose. Je constate que certains se transforment même en justiciers, préférant le lynchage des voleurs au lieu de s’en remettre aux forces de l’ordre. Ce désir grandissant de se substituer à l’autorité est quelque chose à surveiller de très près.
Comment peut-on faire reculer cette tendance ?
▲ Mala Chetty : Ce n’est pas à travers la répression qu’on arrivera à solutionner ce problème. Il faut en finir avec la misère humaine qui gagne du terrain dans le pays.
▼ Rajen Valayden : Il nous faut un ensemble de mesures, à commencer par la responsabilisation de nos décideurs politiques qui doivent tout faire pour rétablir la confiance en nos institutions. Il faut combattre fermement la pauvreté et la drogue, et investir à outrance dans l’éducation, la vraie ! Il nous faut une police qui inspire le sérieux et le respect. Les vols perpétrés ces dernières semaines nous montrent que les voleurs sont mieux formés et équipés que nos malheureux policiers. Leurs réseaux sont plus efficaces que les brigades de police.
J’éprouve aussi une colère à l’encontre de ces hommes en noir qui cultivent une sympathie pour les récidivistes et qui font l’impasse sur la douleur des victimes. Les honnêtes citoyens ont un droit légitime de vivre en paix, de jouir du fruit de leur travail. Et c’est le devoir de l’État de s’assurer de cette possibilité.