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Yannick Pokhun, l’époux de Delphine, décédée : «Je me battrai jusqu’au bout…»

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Delphine Pokhun est partie sans réaliser ses rêves les plus fous.

Une semaine après l’accident fatal qui a fait dix morts, le mari d’une des victimes est plus que jamais déterminé à lutter pour connaître les raisons exactes de ce drame et à réclamer justice pour la terrible perte qu’il a subie. Père d’un petit garçon de 3 ans, il se livre, le cœur lourd et rempli de tristesse.

Sa force, il la puise désormais dans les plus beaux souvenirs laissés par sa femme Delphine. Honorer la mémoire de celle qu’il a épousée en décembre dernier est son principal objectif. Rien ne l’arrêtera. Il est prêt à tout. Quitte à se battre envers et contre tous pour obtenir justice et pour que la vérité éclate sur les circonstances exactes de l’accident de Sorèze ayant fait 10 victimes, le vendredi 3 mai.

«Je me battrai jusqu’au bout», lâche Yannick Pokhun d’un ton très ferme. La douleur qu’il ressent depuis la tragique disparition de l’amour de sa vie transpire par tous ses pores, mais il refuse de laisser celle-ci prendre le dessus sur lui. Il a décidé de rallier tous les parents des victimes qui ont péri dans cet accident à sa cause. «Je lance un appel à toutes les familles des victimes. L’union fait la force. Il est de notre devoir d’honorer la mémoire de nos proches pour que d’autres familles ne vivent pas le même drame que nous. Car il n’y a pas que ces dix victimes qui ont été emportées dans des accidents impliquant les autobus de la CNT. Je ne veux pas que l’île Maurice connaisse un autre pareil drame dans le futur», confie Yannick qui est plus que jamais déterminé à ce que justice soit rendue à sa femme et aux autres victimes.

Si pour le moment, il bénéficie du soutien d’une seule famille, celle de Ruth Marimootoo, une autre victime de l’accident (voir hors-texte), il ne perd pas espoir de voir les autres se joindre à lui. Quoi qu’il en soit, lui, il ira de l’avant. «Je vais retenir les services d’un avocat, car je veux poursuivre la CNT. La situation n’a que trop duré.»

Le drame qu’il vit, il ne souhaite à personne de le vivre. Une semaine après, Yannick est encore terriblement secoué par ce terrible coup dur que lui a assené le destin. «J’ai vécu une semaine très pénible. Delphine me manque. Je ne cesse de penser à elle, à tout ce qu’on a vécu ensemble. Il est difficile pour moi de rester dans notre maison en son absence. Je pense sans cesse aux bons moments passés dans notre petit nid d’amour, avec notre enfant. Désormais, je me sens très seul. C’est comme une partie de moi qu’on a arrachée», lance Yannick avec un gros pincement au cœur.

«Il réclame sa mère»

Le plus dur pour le jeune père : il doit toujours expliquer à son garçonnet que sa maman ne rentrera jamais. «Il réclame sa mère à chaque fois. Je lui explique alors qu’elle est au ciel. En toute innocence, il m’a répondu que ce sont les avions qui sont au ciel. Cela me brise le cœur», dit-il d’une voix remplie de tristesse. Assis sur les genoux de son père, le petit Matthieu écoute celui-ci attentivement.

Même s’il ne comprend pas ce qui se passe, dans ses yeux d’enfant se lit un chagrin immense, sans doute causé par l’absence prolongée de sa mère qui l’affecte terriblement. D’ailleurs, selon Yannick, son petit garçon est plutôt turbulent depuis la mort de son épouse. «Il ne mange pas. Il est très turbulent. Une frayeur s’est installée en lui. Dès que je bouge ou que je sors, il me demande si je vais revenir ou parfois, il pleure et insiste pour m’accompagner. Je pense que cela est dû au fait que le jour du drame, c’est sa mère qui l’a déposé à l’école et lui a sans doute dit qu’elle reviendrait plus tard pour le récupérer», explique le jeune homme, âgé de 21 ans.

Âgée également de 21 ans, Delphine Pokhun avait des projets plein la tête qu’elle voulait réaliser avec sa famille. Aujourd’hui, c’est à Yannick de mener à bien tous ces projets, sans sa femme. «Je ferai tout ce qu’elle désirait qu’on fasse. Pour elle et pour mon fils. On vient de terminer la construction de notre maison. On allait bientôt ouvrir un compte d’épargne en vue de construire une maison un jour pour Matthieu. Je vais le faire.» Absente physiquement, Delphine, celle qui a conquis son cœur il y a quatre ans, sera à jamais gravée dans la mémoire du jeune homme. Pour elle, il se battra jusqu’au bout…

Robin Soonarane, directeur de la CNT : «Les accidentés seront dédommagés»

Il veut rassurer ceux touchés par l’accident de Sorèze. Robin Soonarane, directeur de la Compagnie nationale de transport (CNT), affirme que la compagnie d’assurances «dédommagera ceux concernés». Car, précise-t-il, «les employés ainsi que les passagers sont couverts par une police d’assurance en cas d’accident». Une semaine après le drame de Sorèze, sa compagnie ainsi que le bus appelé Blue-Line immatriculé 4263 AG 07 sont toujours au cœur de l’actualité.

Cette semaine, deux experts indiens en mécanique ont fait le déplacement à Maurice pour examiner le véhicule accidenté. Suite à leurs investigations, un rapport a été soumis aux autorités concernées, le samedi 11 mai. Il semblerait que le rapport fasse mention d’une fuite située au niveau du raccord du système de freinage qui serait vraisemblablement la cause directe de l’accident de Sorèze.

Robin Soonarane, avance, pour sa part, que le 29 avril, le conducteur Deepchand Gunness avait soulevé un problème mécanique concernant l’autobus 4263 AG 07, soit six jours avant le terrible drame. «Suite à un examen du véhicule, la pièce défaillante avait été remplacée et le bus remis sur la route où il a travaillé jusqu’à 19h25.»

Toujours selon le directeur, le jour du drame, une autre vérification du véhicule, comme le veut la routine quotidienne, n’avait rien soulevé d’anormal. «Il faut préciser que le Blue-Line est certifié pour transporter 45 passagers seulement en mode sitting et zéro en mode standing. Le jour du drame, il semblerait que certains passagers étaient debout», déclare-t-il.

Jean-Paul Marimootoo : «La mort de ma femme est injuste»

Il vit le drame de sa vie. Celui de la mort tragique de son épouse Ruth Marimootoo qui a péri dans l’accident de Sorèze, le 3 mai. Une semaine après, l’amertume ne quitte pas le cœur de Jean-Paul Marimootoo. «La mort de mon épouse est injuste. La CNT est responsable de cela. Maurice n’est pas un paradis. C’est un enfer. Ma femme avait le visage tellement défiguré qu’on n’a même pas pu la laisser à visage découvert sur le canapé. Nous avons dû masquer son visage avec une photo d’elle», témoigne péniblement Jean-Paul. Pour toutes ces raisons, il veut lui aussi soutenir Yannick Pokhun dans sa mission qui est de faire éclater la vérité sur ce terrible drame. «Trop, c’est trop. Des sanctions doivent être prises contre la CNT. Cette compagnie doit payer et doit rendre des comptes pour ce que ma femme a subi par sa faute ainsi que les autres victimes qui ont perdu la vie.»

Il déplore la méthode mise en place par les autorités concernées pour avoir droit à une assistance psychologique. «On a mis deux hotlines à la disposition des familles des victimes. C’est nous qui devons appeler et leur dire de venir nous voir. C’est totalement inadmissible. Les autorités ont nos noms et nos adresses. C’est à elles de venir vers nous et non pas le contraire.»

Alan Ganoo, leader de l’opposition : «Rendez public le rapport des experts indiens»

Le leader de l’opposition appelle à faire preuve de transparence dans l’affaire de l’accident de Sorèze. «Le gouvernement doit rendre public le rapport des experts indiens. Il faut que les Mauriciens sachent ce qui s’est passé», avance le leader de l’opposition. Cette semaine, il compte de nouveau venir avec des questions parlementaires à l’Assemblée nationale concernant l’accident mortel de Sorèze.

Les Blue-Line interdits en Inde depuis 2011

En Inde, on les surnomme les «Killer Buses». Alors qu’à Maurice, on leur a collé l’étiquette de «l’autobus de la mort» depuis l’accident mortel de Sorèze du 3 mai. Considérés depuis comme un vrai danger public, les autobus Blue-Line de la CNT de la marque Ashock Leyland ne cessent de faire parler d’eux. Ce type de véhicule, qui est fabriqué en Inde, avait été retiré de la circulation dans la Grande péninsule. Après une longue bataille juridique, la Haute Cour de New Delhi avait ordonné le retrait de ces bus de la circulation en 2011. Ils étaient 1 600 au total. Cette instance avait par la suite accordé un délai de plusieurs mois à la National Transport Corporation (compagnie de transport indienne) qui utilisait un modèle de bus identique aux Blue-Line de la Compagnie nationale de transport à Maurice. En Inde, 182 personnes avaient péri dans des accidents impliquant des autobus Blue-Line en 2005 et 163 en 2006.

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