Rajen Valayden : «Nos associations socioculturelles sont devenues un véritable poison à notre harmonie sociale»
Kevin Boodhoo : «Les politiciens reconnaissent en privé la force de frappe de ces associations dites socio ou politico- culturelles en temps d’élections»
Si le leader du Remake 2000, sir Anerood Jugnauth, et Pravind Jugnauth, leader du MSM, ne cessent de critiquer certaines associations socioculturelles, le ministre des Infrastructures publiques, Anil Bachoo, pour sa part, défend bec et ongles ces mêmes organisations. Rajen Valayden de l’association Right 2 Live et Kevin Boodhoo, président de l’aile jeune de la circonscription no 1 du PTr, nous donnent leur avis sur le sujet.
Que pensez-vous du rôle des associations socioculturelles ?
Rajen Valayden : Le rôle des vraies associations socioculturelles est primordial dans une société pluriethnique comme la nôtre. Celles-ci ont le devoir de promouvoir les valeurs ancestrales et de multiplier les repères qui aident à fédérer la population et faciliter la transition générationnelle. Or, dans le cas actuel, nous assistons à une véritable balkanisation de la nation mauricienne. Au lieu de regrouper la population dans son ensemble à travers des idées et actions, nos associations socioculturelles sont devenues un véritable poison à notre harmonie sociale.
Kevin Boodhoo : Je pense que les associations socioculturelles ont toute leur importance dans un pays pluriculturel comme le nôtre. Elles ont aidé, chacune à sa façon, à contribuer au développement culturel et économique de notre pays et font partie du patrimoine national de Maurice.
Si Pravind Jugnauth a récemment qualifié les membres d’un groupe socioculturel de «mercenaires qui travaillent dans leur propre intérêt», Anil Bachoo, de son côté, défend ces mêmes associations. Votre réaction…
Rajen Valayden : Il faut se rendre à l’évidence. Effectivement, ces associations socioculturelles ne sont pas représentatives de la masse, encore moins des communautés qu’elles prétendent représenter. Leur rôle se limite à faire du lobbying économique et, très souvent, pour des intérêts directs et personnels. Mais je comprends mal les dires de Pravind Jugnauth, car il faut se rappeler que celles qu’il critique étaient à ses côtés lors des élections partielles au no 8. De plus, tout comme Anil Bachoo, Pravind Jugnauth est issu de la même souche fondamentaliste intégriste qui vise uniquement à se défaire de l’oligarchie sucrière en promouvant une hégémonie hindoue. En vérité, nos politiciens ont beaucoup en commun avec ces organisations fantoches. Ils n’ont rien de concret à proposer aux enfants de ce pays.
Kevin Boodhoo : Je pense que les politiciens, tout bord politique confondu, tiennent un double langage quand il s’agit des associations socioculturelles. En même temps qu’ils critiquent ces mêmes associations, ils se permettent le luxe de financer celles-ci en donations et autres «grants» quand ils sont au gouvernement. Les politiciens reconnaissent en privé la force de frappe de ces associations dites socio ou politico-culturelles en temps d’élections.
Que faut-il faire, selon vous, pour éviter que les choses ne dérapent ?
Rajen Valayden : Il y a toute une pédagogie à faire autour de notre histoire, nos droits, nos limitations, la notion et le rôle de l’État, les valeurs (les vraies), la tolérance, la responsabilité citoyenne individuelle et collective, sans oublier la conscience politique du citoyen. Je respecte la légitimité de tout citoyen ou groupement de citoyens qui aspirent à un meilleur avenir. Mais que cela se fasse sans se substituer à l’État, sans intimidation, sans mettre le pays à mal uniquement pour obtenir un contrat ou un emploi. Les associations socioculturelles doivent pouvoir propager la démocratie et non restreindre les droits des autres.
Kevin Boodhoo : Les dirigeants et autres présidents d’associations dites socioculturelles doivent rester à l’écart de la politique et continuer à œuvrer pour le bien-être du pays, en prônant comme valeurs, le mauricianisme, le savoir-vivre ensemble, mais surtout en respectant la laïcité.