Mervyn Anthony : «Pendant toutes ces années, on n’a pas vu de gros développements»
Reynolds Permal : «S’il y a 30 ans, les handicapés n’avaient pas accès à l’éducation, aujourd’hui beaucoup ont été au collège et même à l’université»
La ministre de la Sécurité sociale a, dans une déclaration jeudi dernier, déploré la réticence du secteur privé mauricien à embaucher des personnes ayant un handicap. Qu’en est-il de l’employabilité des handicapés ? Mervyn Anthony, membre du comité exécutif d’Azir Moris et qui souffre de surdité, et Reynolds Permal, chef de file de Lizié dan la main, nous donnent leur avis sur le sujet.
La ministre de la Sécurité sociale a, dans une déclaration jeudi dernier, déploré la réticence du secteur privé mauricien à embaucher des personnes ayant un handicap. Qu’en pensez-vous ?
Mervyn Anthony : Déplorer la réticence du secteur privé est une stratégie qui date. Néanmoins, la responsabilité du problème est partagée entre le secteur privé et le gouvernement. Il est vrai que le secteur privé est réticent, mais cette réticence a été soignée par tous ceux qui nous ont gouvernés ces dernières années.
Reynolds Permal : Comme je suis dans ce domaine depuis plus de 30 ans, je ne dirai pas qu’il y a de la réticence à employer les handicapés. S’il y a 30 ans, les handicapés n’avaient pas accès à l’éducation, aujourd’hui beaucoup ont été au collège et même à l’université. Il y a donc eu des ouvertures à plusieurs niveaux. Et à la question de savoir si les choses ont évolué avec le temps, je dirais oui et non. Car que ce soit dans le secteur public ou privé, beaucoup reste à faire.
Qu’est-ce qui explique la perception que les droits des handicapés sont lésés ?
Mervyn Anthony : Ce n’est pas difficile à comprendre parce que la Training and Employment of Disabled Persons Board Act date de 1996 et pendant toutes ces années, on n’a pas vu de gros développements par rapport à ce qui se passe dans le domaine au niveau international. À ce stade, la Convention des Nations unies apporte de l’eau au moulin de ceux qui luttent pour le droit des handicapés. C’est un droit fondamental que d’avoir accès à l’emploi et le gouvernement a le devoir de faire preuve d’initiative, de faire des recherches et d’assurer qu’un système qui garantit le respect des droits des handicapés soit mis en place.
Reynolds Permal : Il y a, certes, eu la loi qui a été votée en 1996 pour faire bouger les choses. Mais j’estime qu’il aurait fallu s’attarder davantage sur les besoins et les aptitudes des handicapés. Il faut prendre en considération leurs compétences et non pas leur offrir des formations juste parce qu’il le faut.
Que faut-il faire pour arriver à un consensus sur ce sujet ?
Mervyn Anthony : Je tiens à préciser que le problème est d’ordre politique, mental et financier. Il y a plus de 90 000 handicapés dans l’île. Lorsque nous considérons qu’environ 50 000 d’entre eux sont capables de travailler et que le salaire d’un handicapé est de Rs 10 000 mensuellement, cela fait un coût mensuel global d’environ Rs 500 millions, ce qui fait reculer les employeurs. Ces derniers sont définitivement mal conseillés. Employer des handicapés ne constitue en aucun cas un risque de réduction de leur productivité car ces personnes sont également très capables.
Reynolds Permal : Il faudrait, selon moi, cibler les compétences et par la suite offrir des formations tout en ayant en tête que ceux formés pourront, par la suite, trouver un emploi dans des secteurs spécifiques.