Humwantee Sookhee et son fils Rahul
Au fur et à mesure que l’enquête sur l’affaire Deelchand se poursuit, la liste des victimes continue à s’allonger avec le déballage d’Antoine Chetty, le repenti. Certaines affaires demeurées jusqu’ici non-élucidées refont surface et des arrestations sont à prévoir.
L’ex-CP Raj Dayal pourrait bientôt être sur la sellette concernant la mort par overdose de Parwez Damree du fait qu’il n’aurait pas réagi à la lettre que le détenu Soobraty lui avait adressée de la prison de Beau-Bassin lui racontant dans les menus détails comment Parwez Damree craignait pour sa vie. Soobraty a écrit que son copain de cellule lui avait dit que s’il lui arrivait malheur, cela porterait l’empreinte du notaire Deelchand. Selon la lettre, Parwez Damree travaillait pour le compte de Deelchand, alors clerc de notaire, pour faire des petits travaux, mais cela a mal tourné quand il s’est fait arrêter par la police. Il balance alors le nom de Deelchand comme étant son fournisseur. Deelchand est appréhendé et relâché sous caution, même si le Parquet avait conseillé à la police d’objecter à sa remise en liberté conditionelle. Selon la lettre de Soobraty racontant ce que lui avait dit Damree, il y aurait eu une tentative d’Antoine Chetty pour le convaincre de retirer sa plainte, à travers un affidavit, contre Deelchand en échange d’une somme d’argent. Chose qu’il aurait acceptée. Cette lettre envoyée au CP serait restée lettre morte et c’est une des étapes de l’enquête contre l’ex-CP Dayal que la police mène actuellement. Interrogé, Raj Dayal, nous a dit de nous en tenir à son communiqué (voir hors-texte). Un autre volet concernerait la disparition d’armes à feu qui devaient être détruites à la SMF et qui, selon les enquêteurs, ne l’ont jamais été.
L’affaire Sookhee : le ‘main case’ en mai prochain
C’est en mai prochain que la ‘main case’ sera entendue en Cour suprême sur des biens appartenant à Humwantee Sookhee et son fils de 10 ans, Rahul Sookhee, qui avaient été mis au nom d’une autre compagnie à travers le notaire Deelchand. La première affaire, comprenant principalement la reconnaissance par la Cour que les biens ayant appartenus à feu Subiraj Sookhee revenaient à son épouse Humwantee et à son fils Rahul, a déjà été entendue et réglée. C’est Pravindranath, proche d’une personne supposée être celle qui aurait tenté de s’approprier les biens de Humwantee et du petit Rahul, qui a déclenché toutes ces poursuites. “Je suis triste de devoir poursuivre (cette personne), mais je dois défendre les intérêts de cet enfant qui est sous ma tutelle depuis la mort de son papa. Je suis d’autant plus navré que certains ont tenté de faire des magouilles à une jeune femme, ma belle-soeur, qui est très naïve de nature”, nous a déclaré Pravindranath Sookhee à sa station d’essence de Rose-Hill. Il reproche au notaire Deelchand d’avoir tenté de transférer les biens du petit Rahul sur le nom d’une autre personne et c’est pour cette raison qu’il a entré une ‘main case’ en Cour suprême pour réclamer des dommages et intérêts. La personne incriminée n’a pas retourné nos appels hier pour sa version des faits.
Philippe Calou et les autres…
Un autre cas de tentative d’expropriation révélé par Antoine Chetty dans ses dépositions impliquant Vinay Deelchand est celui de celui-ci. Selon la déclaration de Philippe Calou, il a été agressé à coup de sabres par les suspects Chetty et Mooraghen à cause d’un projet de morcellement résidentiel à Le Bouchon. La victime avait la responsabilité de gérer un terrain pour une tierce personne mais Antoine Chetty et Moonsamy Moraghen sont venus prétendre qu’ils étaient les propriétaires légitimes du terrain. Ils auraient alors agressé la victime parce qu’elle voulait les dénoncer. Une autre présumée victime de la bande à Deelchand est Lalldev Gajadhar. Son agression à l’arme blanche remonte au 16 juin 1998, à Quatre-Bornes. Le motif : il avait contesté en Cour un acte de vente qu’il dit avoir été falsifié et soi-disant signé le 24 avril 1996 par son père mourant. C’est le notaire Deelchand, alors clerc de notaire, qui avait préparé ses papiers.
En 1994, un homme religieux, qui vient de rentrer à Maurice après avoir travaillé à l’étranger, achète un terrain. Quelque temps plus tard, il apprend qu’il est en possession d’un faux contrat pour l’achat d’un terrain au morcellement Candos à Quatre-Bornes. Il intente un procès à Vinay Deelchand (clerc de notaire à l’étude Rajkumar Lallah à cette époque, ndlr) qui s’est occupé des démarches administratives de la vente. L’homme religieux obtient gain de cause en Cour dans cette affaire. Approché pour une déclaration, il s’est refusé à tout commentaire dans cette affaire : “Je crains pour ma sécurité”, dit-il. Le 17 mai prochain, une autre affaire, toujours de vente illégale alléguée de terrain contre le suspect Deelchand, sera entendue en Cour intermédiaire. Le couple Ramharai intente un procès pour avoir été victime d’une présumée arnaque dont l’auteur serait Vinay Deelchand. C’est en octobre 2000 qu’ils ont pris possession d’un terrain acheté pour la somme de Rs 400 000. Mais le terrain en question avait déjà été vendu en 1998 par Me Deelchand et un arpenteur au couple Mungrooa. Les Ramharai ont retenu les services de Me Panzhany Rangasamy.
Selon des révélations faites par Antoine Chetty, les disparitions d’Ismaël Doba, d’un clerc de notaire, le 7 avril 2003 et d’un courtier, Paul Simon Janvier, seraient aussi liées à l’affaire Deelchand.
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Raj Dayal peut être interrogé par la police
Des hommes de loi nous ont affirmé qu’un ex-CP est, maintenant, un citoyen comme les autres et que, de ce fait, la police peut enquêter sur lui. “C’est seulement quand un CP est dans l’exercice de ses fonctions qu’un tribunal constitutionnel est mis sur pied pour enquêter sur lui, mais dès qu’il est destitué de ce poste ou qu’il est à la retraite, il ne peut plus se prévaloir de ce droit”, nous a déclaré un ‘Senior Counsel.
Me Gayatree Dayal, dont les services ont été retenus par l’ex-CP Raj Dayal, a cependant déclaré dans un communiqué que les policiers n’ont pas le droit d’enquêter sur les faits et gestes d’un CP. Elle a ajouté que c’est uniquement un tribunal constitutionnel, mis sur pied par le président de la République, qui est autorisé à le faire. Trois juges seront alors nommés pour enquêter. L’avocate de Raj Dayal a aussi déclaré que son client craignait un complot des trafiquants de drogue et de leurs complices contre sa personne dans le sillage de l’affaire Deelchand. La nièce de Raj Dayal souligne aussi que les informations publiées dans la presse sur les relations de son client avec Dev Hurnam, et sur la commission d’enquête présidée par le juge Sik Yuen par rapport à l’ex-CP, sont fausses et préjudiciables aux intérêts de Raj Dayal.
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Les débats sur sa motion de remise en liberté vendredi dernier
La folle journée de Dev Hurnam
La joie de Dev Hurnam libéré sous caution à midi vendredi dernier a été de courte durée. Peu après 14h30, le magistrat Lutchmeeparsad Aujayeb gêla son premier ruling suite à une motion du DPP et décida, dans son deuxième ruling, que Dev Hurnam serait reconduit en cellule policière. Il est 11h40. Dev Hurnam arrive en cour. Quelques minutes plus tard, le magistrat Aujayeb commence à lire son ruling. Après une analyse du dossier, le magistrat dit ne pas comprendre comment la libération éventuelle ou la détention prolongée de l’accusé “may have any bearing on the further conduct” de l’enquête. Il annonce alors la libération de l’accusé sous caution. Quelques minutes plus tard, on apprend que le DPP compte faire appel du ruling et il réclame un ‘Stay of execution’ (suspension de la décision de la Cour). À 12h47, Dev Hurnam est de nouveau en Cour. “C’est une injustice faite contre moi”, lance-t-il. En présentant sa motion, Me Bobby Madhub affirme qu’il a reçu des instructions du DPP pour présenter la motion du ‘Stay of execution’. Pour sa part, Me Désiré Basset souligne que lorsqu’un suspect présente une remise en liberté sous caution, il tombe sous le judiciaire et, ainsi, il peut être relâché. “(..) ce sera un jour triste pour la démocratie et la loi si le judiciare ‘surrenders to the executive”, dit-il, en faisant allusion au magistrat si ce dernier doit accéder à la demande du DPP. Me Désiré Basset soutient que la section concernée de la Bail Act est contraire à la Constitution qui garantit la séparation des pouvoirs. Me Basset exprime le souhait que l’affaire soit référée à la Cour suprême pour que celle-ci tranche. C’est le 29 avril, que la défense et la poursuite seront fixées quand l’appel va être débattu en cour suprême. Antoine Chetty allègue que Dev Hurnam aurait comploté pour agresser physiquement le SPJ Sik Yuen et pour assassiner un inspecteur et un officier de police.
Par Nadine Bernard/Christophe Karghoo/
Jean-Claude Dedans/Jean Marie Gangaram