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Deux anciens présidents du ‘Bar Council’ donnent leur avis

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Sir Marc David QC et Me Yousuf Mohamed

L’éthique de la profession légale est d’actualité ces temps-ci et la principale question qui est sur toutes les lèvres, surtout dans le sillage de l’affaire Hurnam/Bholah, est: jusqu’où un avocat peut-il aller pour conseiller son client? Sir Marc David QC et Me Yousuf Mohamed, tous deux ‘Senior Counsel’ et anciens présidents du ‘Bar Council’ nous donnent leurs réponses.

Q: Jusqu’où un avocat peut-il aller pour conseiller son client?

Sir Marc David: Comme je l’ai dit des années durant aux étudiants du ‘Council of Legal Education’, un avocat est là pour conseiller. Il a le devoir et le droit de dire à son client quels sont ses droits constitutionnels et, aussi, qu’il peut choisir de répondre aux questions ou pas. L’avocat ne peut se permettre de dire à son client de se taire surtout avant de savoir ce qu’il a à dire. C’est après avoir pris le soin d’entendre la version de son client qu’un avocat peut le prévenir des implications de ses actes et de ses dires. Ensuite, si le client a parlé, c’est à l’avocat de trouver des moyens de défense en plaidant le ‘self defence’, la provocation, etc. en se basant sur les informations à sa disposition. Mais en aucun cas l’avocat ne doit appeler son client à la barre pour lui faire dire le contraire de ce qu’il lui a dit. C’est aussi le devoir de l’avocat de tester la véracité des témoins sur la base de ce que son client lui a avoué. L’avocat n’est pas là pour fabriquer une défense à son client ou une version des faits de toutes pièces.

Me Yousuf Mohamed: N’oublions pas que l’avocat est quelqu’un qui doit conseiller son client en droit et protéger ses intérêts tel que c’est prévu par la Constitution et certainement veiller à ce que ses droits ne soient pas lésés durant l’enquête et pendant le procès. Un avocat, puisqu’il doit conseiller son client en droit, ne peut pas dépasser le cadre de la profession, c’est-à-dire conseiller à son client de mentir. Il n’est pas là pour trouver une fausse défense sur les faits. Par exemple, il ne peut pas dire à son client qu’il ne faut pas dire la vérité à la police, qu’il faut qu’il mente, qu’il invente quelque chose pour qu’il ne soit pas trouvé coupable. Si le client a un alibi, qu’il le dise. Et si l’enquête révèle que le client a un alibi, l’avocat doit attirer l’attention de la police là-dessus et la laisser faire son enquête. La police, à son tour, ne doit pas seulement prendre la déclaration du client mais aussi celles d’autres témoins pour vérifier ce que l’avocat a pu découvrir.

Q: Qu’est-ce qui se passe si on apprend qu’un avocat a aidé son client à fabriquer une version fictive des faits?

Sir Marc David: Dans ce cas, il est évident que l’avocat commet un délit et c’est aux autorités de prendre les mesures qui s’imposent. C’est au judiciaire de décider d’aller de l’avant ou pas avec l’affaire.

Me Yousuf Mohamed: C’est à l’Attorney General de prendre les actions disciplinaires qui s’imposent à la requête du Bar Council. Et si l’avocat est trouvé coupable, il se retrouvera dans de beaux draps car il risque en plus de se voir rayer du barreau.

Q : Que peut faire le ‘Bar Council’ dans ce genre de cas?

Sir Marc David: Il y a un gros flou dans les lois régissant notre code d’éthique et le ‘Bar Council’ ne peut prendre qu’une seule sanction contre un avocat qui a commis un délit : il peut seulement lui donner un avertissement. Dans les cas de délit majeur, le ‘Bar Council’ peut référer l’affaire à l’Attorney General ou à la Cour suprême. Mon avis est que le ‘Bar Council’ devrait avoir plus de pouvoir de sanction et s’ériger en un tribunal pour décider si l’avocat est digne de rester au barreau. Aujourd’hui, cette institution est impotente. Les médecins ont leur propre tribunal où ils peuvent révoquer les brebis galeuses. S’ils peuvent le faire, pourquoi pas les avocats?

Me Yousuf Mohamed: Le ‘Bar Council’ ne peut pas prendre des mesures disciplinaires contre quelqu’un de la profession qui a commis un délit dans l’exercice de ses fonctions. Il peut seulement demander à l’Attorney General de prendre les actions qui s’imposent. Le ‘Bar Council’ ne peut initier une action légale car il n’a pas de pouvoir exécutif ou disciplinaire.

Q: Comment faire pour que ce genre de cas ne se produise pas dans le giron légal?

Sir Marc David : À la base, quand quelqu’un décide de faire le droit, il devrait y avoir un moyen, en se basant sur la psychologie ou le psychique ou d’autres procédés pour savoir si de par son tempérament, sa façon d’agir, il peut être avocat ou pas. Il faut aussi faire l’éducation des étudiants en droit. Le ‘Code of Ethics’ à Maurice et en Angleterre n’est pas une matière examinable et j’ai toujours dit qu’il fallait obliger les étudiants à prendre part à des examens sur l’éthique de la profession légale. Quand un étudiant fait son ‘pupillage’, il devrait suivre en même temps des sessions sur l’éthique et passer des examens-là dessus. S’il ne réussit pas à ces examens, il ne devient pas avocat.

Me Yousuf Mohamed: Il faut qu’il y ait des réunions régulières du ‘Bar Council’ durant lesquelles l’accent est mis sur la nécessité d’observer le code d’éthique. D’ailleurs, la conférence qui a eu lieu la semaine dernière à la municipalité de Port-Louis sur l’éthique du milieu légal a fait beaucoup de bien à la profession. Cela nous a permis de faire un examen de conscience et de reprendre du poil de la bête. Surtout que des juges, pas seulement ceux qui sont à la retraite mais aussi ceux qui sont encore en fonction assistaient à cette conférence. Nous avons analysé nos forces et nos faiblesses et notre président n’a pas hésité à dire qu’il faut éliminer les brebis galeuses de la profession.

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