Le nom de Pooja Gumbheer s’ajoute à la longue liste des victimes de violences répétées.
Hemraz et Bindia racontant leur souffrance.
Elle n’avait que 21 ans et toute l’existence devant elle pour réaliser ses rêves. Mais un homme a décidé de mettre un terme à tout cela, de lui enlever la vie. Son concubin s’est acharné sur elle avec une arme tranchante avant de l’égorger. Pooja Gumbheer n’a pas survécu. Effondrés, ses proches racontent sa descente aux enfers auprès de son bourreau.
C’est une mère anéantie, écrasée par une immense douleur : celle d’avoir perdu sa fille, sa petite dernière – elle a deux autres filles et deux fils –, celle qui l’a toujours aidée et réconfortée dans les moments difficiles. «Pourquoi ?» ne cesse de se demander Bindia Gumbheer, en pleurs. Elle n’a jamais voulu penser au pire, même si elle admet que tout le monde craignait pour Pooja, que tous voulaient qu’elle quitte son compagnon, Daramsingh Bissoo, alias Vicky, 29 ans, qui la brutalisait régulièrement. «Tout le monde lui disait de quitter Vicky car cela allait mal finir un jour. Mais elle refusait de le faire sous prétexte qu’il allait changer», lâche-t-elle.
Cela s’est effectivement mal, très mal terminé. Le dimanche 23 février, Pooja a été mortellement agressée par son concubin. Ce dernier lui a assené plusieurs coups de couteau avant de l’égorger. Ne lui laissant aucune chance de survie. Il s’est ensuite rendu au poste de police pour se constituer prisonnier. Au moment des faits, la victime, qui était coiffeuse, se trouvait chez son frère Suraj, à la route Bassin, Quatre-Bornes, où elle avait trouvé refuge après une énième dispute conjugale, le jeudi précédent.
Son père Hemraz, terriblement ébranlé par ce drame, affirme que cette agression était préméditée : «Vicky avait tabassé ma fille le jeudi 20 février après une banale dispute. Le lendemain, ma fille l’a quitté et a trouvé refuge chez mon fils. Le fils de Vicky, issu d’une première union, était avec elle. Des gens nous ont dit que cet homme avait été aperçu à plusieurs reprises dans les environs, le lendemain, avec un couteau à la main. Dimanche, ma fille est allée acheter des vêtements en compagnie de ma belle-fille car elle voulait se rendre à Grand-Bassin pour faire une prière spéciale pour son couple. Vicky les a vues et les a suivies. Quand elles sont rentrées, il est passé par la porte de derrière. Il a d’abord demandé à ma fille de rentrer avec lui à la maison. Mais lorsqu’elle a refusé de le suivre, il a commis l’irréparable.»
Maltraitance
Depuis, c’est toute une famille qui est déchirée par le chagrin et la révolte. Quand on demande à Bindia de dresser le portrait de son gendre, sa voix empreinte de tristesse devient dure, tant sa colère est grande. «Malgré son apparente timidité, c’est un homme violent, alcoolique, irresponsable et paresseux car il n’aimait pas travailler. Il battait souvent ma fille. Zot ti gagn lager souvan akoz kas. Sak fwa li zour mo tifi kan li refiz aste sigaret ek lalkol pu li. Tou kou sak cou mem kou !» s’insurge cette mère.
Depuis que Pooja avait quitté sa famille sans l’accord de celle-ci, à l’âge de 16 ans, pour emménager avec Vicky, déjà père d’un enfant de neuf mois issu de son premier mariage, son existence, à en croire ses proches avait basculé. Elle était constamment, disent-ils, victime de maltraitance, et souvent elle trouvait refuge chez sa famille, avec le fils de Vicky qu’elle considérait comme son propre enfant et qui a maintenant 6 ans. «À plusieurs reprises, il l’a frappée et a fait voler en éclats des objets dans la maison. Sa première femme l’avait quitté parce qu’elle était aussi victime de brutalités. Elle avait déjà rencontré Pooja pour lui dire de quitter Vicky mais elle ne l’a pas fait.» Et malgré toutes les violences qu’elle subissait et toutes les fois où elle avait quitté la maison conjugale, elle finissait toujours, selon sa mère, par rentrer chez elle.
«Vicky avait toujours les bons arguments pour convaincre ma fille, confie Bindia. Pooja cédait à chaque fois car il lui disait qu’il allait se suicider ou qu’il allait changer. Ma fille rentrait aussi chez eux à cause du fils de Vicky, dont elle s’occupait. Il n’avait que neuf mois lorsque sa mère biologique l’a abandonné, en emmenant son frère aîné, pour fuir les coups de Vicky. Mo tifi ti touzour ena leker feb. Elle croyait que Vicky allait changer et ne voulait pas que le fils de ce dernier souffre de leur séparation.»
Après le drame, Vicky Bissoo a comparu devant le tribunal de Rose-Hill, lundi. Il fait l’objet d’une charge provisoire de meurtre et reste en détention. Pour les proches de Pooja, il restera toujours le «monstre» qui leur a enlevé la jeune femme de manière atroce. «Vicky pa ti ene dimoun sa. Li ti pe komport li byen en piblik pu fer croire ki li ti enn bon dimoun», lâche le père de Pooja, amer.
Aujourd’hui, sa famille et lui ne peuvent que pleurer sur le triste sort qu’a connu la jeune femme, partie si jeune et dans des conditions terribles.