Cruelle ironie de l’histoire pour l’ancien Premier ministre qui fait face à la même douloureuse épreuve que son rival Ramgoolam en 2014 : les deux, à dix ans d’écart, font l’expérience d’un cuisant échec, les contraignant à une traversée du désert inattendue après avoir été battus par des néophytes dont ils ne connaissaient même pas l’existence ! Qui ne se souvient pas de la remarque faite par Jugnauth concernant la candidate Babita Thannoo de Rezistans ek Alternativ le jour du scrutin ?
Ce n’est pas parce que l’ancien chef du gouvernement a fait une chute sonore qu’on devrait tolérer son amnésie post-électorale ! Quand le leader du MSM ose écrire dans son message, qu’il est «enn dimounn bien sinp, zame monn less lego dicte mo ban aksion», deux réflexions s’imposent : soit Jugnauth est dans le déni, soit il insulte (et ce n’est pas la première fois) l’intelligence collective d’une nation ! Doit-on lui rafraîchir la mémoire et lui expliquer à quel point l’arrogance du pouvoir a justement caractérisé sa gestion du pays, ce, sans jamais qu’il ne réalise kot li finn fote ! Quand Jugnauth dit que «mo pli gran satisfaksion, seki ankor enn fwa, demokrasi finn prime…», faut-il lui rappeler qu’il ne s’agit pas d’«ankor enn fwa» car la démocratie n’existait plus sous son gouvernement ?
A-t-il besoin d’exemples ? Les élections municipales furent renvoyées, par trois fois sous prétexte de Covid et ensuite de soi-disant réformes ; toutes les voix critiquant le pouvoir ou refusant de courber l’échine étaient sujettes à une répression – des représentants des médias convoqués au poste (des voyous, toujours impunis, débarquant dans les locaux d’une radio pour agresser un journaliste), des parlementaires de l’opposition expulsés et suspendus systématiquement, des voix citoyennes critiques envers le gouvernement maintes fois menacées. Sans oublier les agissements d’une police à la solde du pouvoir qui s’amusait à maintenir une atmosphère de peur !
Tout ça parce que, justement, le clan Jugnauth (dont on a compris le mécanisme machiavélique grâce aux Moustass leaks) n’a jamais accepté les règles du jeu de la démocratie ! Il fallait se montrer docile, faire des échos positifs à une bande d’incompétents qui s’enfonçaient dans une série de scandales, tout en dilapidant des fonds publics et en ayant la mainmise sur nos institutions ! L’arrestation, ce vendredi, de l’ancien Gouverneur de la banque de Maurice Harvesh Seegoolam, dans le cadre d’une enquête autour d’un décaissement douteux de Rs 45 millions est un premier signal fort envoyé à une population impatiente de voir une justice égale pour chaque citoyen !
À l’heure où Jugnauth se prépare à un long passage à vide, il est temps qu’il fasse son introspection et prenne conscience de tout le mal qu’il a fait à notre République. Le bilan calamiteux parle de lui-même : une économie en ruine, résultat d’une gouvernance gangrenée par le népotisme, un endettement atteignant des sommets inquiétants, un gaspillage de l’argent public – notamment certaines décisions s’apparentant à des fraudes et qui conduiraient, semble-t-il, à d’autres arrestations après celle de Seegoolam.
Que le leader du MSM tente un retour vers la vie publique relève de son droit, mais qu’il ne brise pas le silence pour insulter notre intelligence…
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