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Mont-Choisy

Quand les méduses piquent et les murs choquent

16 janvier 2025

En cette deuxième semaine de l’année 2025, la reprise du travail est encore timide et les plages continuent d’attirer ceux qui veulent profiter de l’été. À Mont-Choisy, coin préféré des Mauriciens, le camping est redevenu un plaisir simple : plus besoin de remplir des formulaires ou de déposer Rs 3 000 pour planter une tente. Une nouvelle qui fait du bien ! Désormais, chacun peut passer une nuit à la belle étoile, bercé par le doux bruit des vagues. Nous avons posé notre serviette et piqué une tête sans hésiter, et il faut le dire : nul besoin de sirène pour se laisser séduire. L’eau turquoise et chaude à souhait nous avait déjà ensorcelés. Mais depuis le 3 janvier, des petits intrus volent la vedette ; des méduses ont été signalées dans le lagon par la National Coast Guard. Pourtant, ce jour-là, pas l’ombre d’une tentacule en vue. Derrière cette belle image, Mont-Choisy vit une autre histoire, un peu moins charmante. En 2021 déjà, lors d’un reportage, nous avions couvert l’agacement des habitants face à l’abattage de 180 filaos pour un projet de parking controversé.

Aujourd’hui, c’est un mur de 17 mètres construit illégalement près de la plage qui fait polémique. Ce seawall, érigé sur des pas géométriques sans autorisation, fait partie d’un projet immobilier visant à construire deux blocs de 23 chambres en bord de mer. Les habitants, soucieux de préserver leur plage, ont signalé ce mur et les débris qui l’accompagnent. Le ministère de l’Environnement a réagi avec un Stop Order : les travaux doivent s’arrêter immédiatement, et la plage doit être remise dans son état naturel dans les 30 jours. Malgré ces histoires, Mont-Choisy continue de faire rêver. Sa plage en forme d’arc, si chère aux Mauriciens, reste un endroit où l’on peut s’évader et se reconnecter à la nature. Mais entre les méduses qui rôdent et les murs qui s’élèvent, ce petit coin de paradis nous rappelle qu’il faut veiller à protéger ce qui nous appartient à tous.

Près de l’endroit où la construction du parking progresse lentement, nous rencontrons Ishwardev Tanny, connu de tous sous le nom de «Man», gérant de la roulotte bleue Man Snack depuis 11 ans. «Nous sommes populaires pour nos salades de fruits frais, nos sandwiches et nos poissons grillés. Pendant les travaux du parking, nous n’avons pas travaillé pendant cinq mois, et même si je paie tous les frais pour opérer ici, je n’ai reçu aucune compensation.» Malgré tout, il est ravi d'avoir repris ses activités. «Je propose des fruits de saison directement sortis des vergers. Quant aux méduses, depuis que les gardes-côtes ont donné l’alerte, je préviens chaque client de faire attention. Kan gagn pike, monn aprann bizin met enn zafer sikre lor-la, kouma Coca!» Mais Ishwardev a aussi des préoccupations : «Il faut cesser de bétonner nos plages. Sinon, il n’y aura bientôt plus de place pour les Mauriciens. Et il faut que chacun garde la plage propre, surtout après les fêtes. Bizin respekte sa bann madam ki netwaye-la osi ! Malheureusement, il y a aussi un gros problème de chiens errants. Plus de 30 rôdent autour du parking et ils peuvent être agressifs. Il est temps de trouver une solution !»

En arrivant dans le village, la boutique Mont Choisy Store attire immédiatement l’attention. Elle est la seule présente dans la région depuis plus de 100 ans, un véritable point de repère. C’est là que nous croisons Kumar Lobin, derrière le comptoir, occupé à rassembler quelques provisions. Mais détrompez-vous, il ne travaille pas dans cette boutique. «Mo kwizinie dan lotel Trou aux Biches ek fer 53 an mo res isi ! Je suis en vacances et je profite pour prendre ce qui manque. Ici, c’est un endroit tranquille, sans gros problèmes de sécurité ou fléaux. Si jamais il y en a, nou rezoud problem-la ! Ou vinn zordi, ou ale dimin. Nous avons la chance d’avoir une belle plage qui réunit les familles mauriciennes des quatre coins de l’île. Tout est là pour passer un bon moment : l’ombrage, les parkings, et une eau claire. Malheureusement, les méduses viennent jouer les trouble-fêtes. Dernièrement, quelqu’un a été piqué, je lui ai dit d’aller à l’hôpital ! Je pense que c’est quand la mer est houleuse que ces créatures arrivent dans nos lagons», confie-t-il avant d’ajouter : «Laplaz bizin gard li natirel, pa fer bokou konstriksyon !»

Riaz Auladin, habitant de Plaine-Verte, fréquente Mont-Choisy depuis des années. «L’époque où j’avais un bateau pour pêcher me manque. Le 25 décembre, j’ai emmené ma famille à Mont-Choisy et j’ai été surpris de voir une vingtaine de méduses échouées sur le rivage, dont beaucoup étaient encore vivantes. Ma première réaction a été de filmer et de poster sur Facebook pour avertir les gens. En regardant les commentaires, j’ai constaté que d’autres avaient aussi signalé la présence de méduses, parfois en plus grand nombre, la veille. Ou imazinn ou ki kantite dimal ek soufrans si enn pik ou ! Je pense que c’est peut-être la chaleur et le courant qui les ramènent vers le bord. Ce phénomène, je l’ai également remarqué à Péreybère. Je suis allé pêcher à Bain-Bœuf en ce début d’année, et j’ai eu une grosse carangue au bout de ma ligne. Mais le lagon de Mont-Choisy, lui, n’est plus le même. Lontan ti ena koray zinzam kot ti ranpli ar pwason. Je ne sais même pas si ces coraux existent toujours. Les activités nautiques perturbent beaucoup les animaux marins, et l’érosion est devenue encore plus visible. À Mont-Choisy comme ailleurs, la mer grignote nos plages. Pour nous, qui vivons sur une île, c’est une véritable source d’inquiétude. Si rien n’est fait, que restera-t-il pour les générations futures ?»

Dans le Mont Choisy Store, nous croisons Lalita Jeebun, occupée à surveiller deux petits : «Enn mo ti-zenfan, ek lot-la pou mo vwazinn.» Elle habite juste derrière la boutique, dans ce qui était autrefois appelé le camp de l’usine sucrière Harel. «La plupart des familles ici étaient des coupeurs de cannes. Bann gran dimounn inn gagn terain VRS. Je me souviens qu’il y avait des élevages de bœufs, de moutons, de cochons, et même des tortues et des chevaux. Pour nous, enfants, c’était comme un musée en plein air. Nous avons aussi connu la misère. Faute d’eau courante, je devais aller remplir des seaux à Grand-Baie. Ti bizin sarye touk dilo lor latet ek mars enn long bout !» Aujourd’hui, Mont-Choisy a bien changé, mais Lalita n’a pas oublié cette époque. «La plage, c’est une richesse pou ti dimounn. J’espère que Mont-Choisy gardera son cachet d’antan. Quand il y a eu l’abattage des filaos, cela m’a brisé le cœur.»

Xavi Balcells, Assistant Curator dans la section biologie d’Odysseo : «Ces espèces ne sont pas dangereuses au point de tuer ou de nécessiter une hospitalisation»

«La présence de méduses dans le lagon dépend de la température de l’eau. Elles préfèrent les eaux chaudes, qui favorisent leur maturité sexuelle. Ici, à l’Aquarium, nous avons deux espèces de ces invertébrés : les Moon Jelly Fish et les White-Spotted Jelly Fish. Ces espèces ne sont pas dangereuses au point de tuer ou de nécessiter une hospitalisation. J’ai entendu parler des méduses sur la côte nord, mais je ne sais pas de quelles espèces il s’agit. Lors d’une plongée à Flic-en-Flac récemment, j’en ai vu aussi, mais ce n’étaient pas les espèces communes avec une "ombrelle". Nous comptons plus de 100 espèces de méduses dans le monde, et chaque piqûre doit être prise au sérieux, car la réaction dépend de la personne et de la partie du corps touchée. Les symptômes courants incluent une sensation de piqûre et de brûlure. Si la méduse est plus dangereuse, cela peut aller jusqu’à de la fièvre, des maux de tête et des problèmes musculaires. Les effets durent généralement quelques heures à plusieurs semaines, avec parfois une hyper-pigmentation de la peau pendant un ou deux mois, et des cicatrices permanentes peuvent survenir. Il est important de rester à distance lorsqu’on en aperçoit, car certaines méduses peuvent libérer leurs toxines sans contact direct. De plus, même échouées sur la plage, elles restent capables de piquer. Chaque rencontre avec une méduse est unique, mais la prudence reste la meilleure approche. La mer est leur habitat, alors respectons-les et profitons de l’eau en restant vigilants.»

Mesures à prendre en cas de piqûre de méduse

Rincer avec de l’eau de mer – l’eau salée est préférable, surtout pas d’eau douce.

Protéger vos mains – ne manipulez pas la zone touchée à mains nues, utilisez une serviette ou des gants.

Retirer les tentacules – appliquez du vinaigre pour neutraliser les toxines des nématocystes, pendant 15 à 30 minutes.

Appliquer un patch chauffant – les relieving patches peuvent être utilisés pour réduire la douleur.

Pour les yeux, utilisez une solution saline achetée en pharmacie pour rincer et retirer délicatement les morceaux de tentacules.

Consulter un médecin - que des symptômes soient présents ou non, il est fortement conseillé de consulter un médecin pour un avis professionnel.

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