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25 juillet 2017 03:34
Malgré toutes les réticences émises par les membres de l’opposition au parlement, le gouvernement ira de l’avant avec les amendements à la GRA Act, amendements qui ont été, du reste, votés mercredi. Et ce, au grand dam du Mauritius Turf Club, qui avait, la veille, appelé à un dialogue constructif. Il ne manque dorénavant plus que l’aval de la présidente de la République pour officialiser le shift in power au sein de l’industrie hippique.
Sentant la menace peser de tout son poids, plusieurs acteurs du giron étaient montés au créneau pour dénoncer ces pouvoirs accrus confiés à l’instance régulatrice, qui a mis en exergue au fil du temps, le peu de connaissance de la chose hippique mais le gouvernement n’a pas cédé. Dans les couloirs du Mauritius Turf Club, on évoque le début de la fin avec ces nouveaux amendements, qui assujettissent un peu plus l’organisateur des courses vis-à-vis de la GRA. Et pour cause avec quelques-uns de ces changements susceptibles de réduire le MTC à un simple«rubber stamp racing organiser».
Dans son communiqué en date du 18 juillet, le MTC évoque ses inquiétudes par rapport à trois grands axes de réflexion concernant notamment la représentation internationale du Club, l’anéantissement de son pouvoir décisionnel et l’atteinte à ses droits d’auteur. Sur ce dernier point, l’amendement de la section 23 (b) vise à «ensure, where a horse racing organiser is paid such amount as the Board may determine by a totalisator operator, a bookmaker, a sweepstakes organiser or an operator of dart games to use its race cards and fixtures, that the horse racing organiser does not prevent the totalisator operator, bookmaker, sweepstakes organiser or operator of dart games from using its race cards and fixtures». En d’autres mots, il reviendra désormais à la GRA de fixer la redevance des opérateurs du circuit hippique envers le MTC, qui craint de ne plus pouvoir maîtriser la source de plus de 70% de ses revenus.
La capacité du MTC à gérer ses affaires courantes est également remise en question à travers la section 23 (c) puisque celle-ci stipule que «on receipt of a complaint or on its own initiative, review decisions of – (i) a horse racing organiser or its agents; or (ii) an appeal committee». Pour le Club, cette nouvelle disposition vise à accorder à l’Etat, par le truchement de son instance régulatrice, un contrôle absolu sur les courses hippiques puisque la GRA pourra à tout moment venir contester une décision prise par l’organisateur, son board de commissaires de courses ou de son board d’appel. Si le gouvernement motive cette décision par le fait que le racing organiser ne peut s’autoréguler, le MTC y voit, pour sa part, une grave atteinte à son indépendance en tant que l’organisateur des courses à Maurice, une démarche qui ne serait pas vue d’un bon oeil par la Fédération des Autorités Hippiques (FIAH), à laquelle le MTC est affilié.
Alors qu’elles étaient, à un moment, cordiales, les relations entre la GRA et le MTC sont devenues tendues depuis l’arrivée de Mukesh Balgobin à la tête du Club de la rue Eugène Laurent. Du côté de l’instance régulatrice, on estime qu’il existe bel et bien une ligne de communication entre les deux entités, mais force est de reconnaître que le président du MTC a eu du mal à trouver une oreille attentive à la GRA depuis sa prise de fonctions. L’amendement apporté à la section 33, relative au personal management licence, ne risque pas d’arranger les choses puisqu’il vient fragiliser un peu plus Mukesh Balgobin en raison de ses démêlés avec les autorités gouvernementales. Si le président est déterminé à rester en poste, des voix se sont élevées au sein même du MTC pour qu’il considère l’option de «step down», et ce, dans l’intérêt du Club.
On semble ainsi se diriger vers une nationalisation des courses. Pour combler ses lacunes sur la chose hippique, la GRA envisage de créer une Horse Racing Division, qui sera gérée par des experts étrangers. Une réunion est prévue mardi prochain entre les administrateurs du MTC pour décider de la marche à suivre, mais la refonte de l’industrie hippique semble plus que jamais enclenchée.
«On est en train de donner des pouvoirs à la GRA, qui n’a aucune compétence pour gérer les courses. Cela, la commission Parry l’a aussi clairement établi. Nous allons vers une situation unique dans le sens où la GRA pourra venir rejuger une affaire déjà traitée par le MTC. Tout ceci est contraire aux règlements internationaux de la Fédération International des Autorités Hippiques (FIAH) à laquelle le MTC est affilié, ce qui pourrait nous mettre dans une posture délicate vis-à-vis de cette instance. Il ne faut pas oublier que le PMU avait suspendu les paris sur les courses mauriciennes le temps que durait la commission d’enquête. Nous allons tout droit vers une politisation des courses et il est clair que les courses hippiques vont prendre un sale coup avec cette nouvelle direction.»
«Je trouve toute cette situation dramatique. Le gouvernement ne sait pas ce qu’il fait en voulant nationaliser une industrie qui a fait ses preuves dans l’organisation des courses. Il est effrayant de constater que ces amendements ont été proposés et votés sans consultation aucune avec l’équipe dirigeante du MTC. Ce qui est plus grave dans toute cette histoire c’est que la GRA pourra à l’avenir remettre en questions les décisions du MTC. La FIAH risque de ne pas voir cette situation d’un bon oeil. Selon moi, la GRA se doit de contrôler les paris et pas l’organisation des courses.»
Le président du MTC a été mal avisé de commenter l’actualité hippique lors de la conférence de presse qu’il tenait en sa capacité de CEO de MBL Limited à l’Hotel St-Georges vendredi dernier. Par voie de communiqué, le Mauritius Turf Club s’est dissocié des propos tenus par son président, preuve d’un véritable malaise au sein de l’institution organisatrice des courses depuis la décision du gouvernement d’amender la GRA Act, mercredi dernier. Si certains observateurs interprètent cette démarche du MTC comme une tentative de pousser Mukesh Balgobin un peu plus vers la porte de sortie, dans l’entourage du président, en revanche, on estime qu’il n’est aucunement question d’une démission à ce stade.
Didier Simanarain
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