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Football Local | Ashok Chundunsingh : «Le niveau est à zéro»

20 juin 2016

Ashok Chundunsingh : «Le niveau est à zéro»

Fidèle à sa réputation. Il a marqué le football mauriciendes années 70 à90 tant comme footballeur qu’entraîneur même s’il a dérangé certains. C’est surtout son passage à la tête de l’ex-Sunrise SC qui a fait la renomméed’Ashok Chundunsingh, d’abord pour les résultats, mais aussi son franc parler sans langue de bois (pour ne pas dire un langage fleuri typiquement mauricien). A 64 ans, il n’a pas changé et continue avec sa verve habituelle.

 

On ne dissocie pas l’homme et le sport-roi, même s’il se passionne pour la chose hippique et continue d’exercer dans le domaine de l’assurance. Ashok Chundunsingh avait la particularité de focaliser l’attention sur lui avec des phrases… chocs à l’instar d’un José Mourinho pour que ses joueurs puissent s’exprimer librement sur un terrain de football. On connaît le résultat, avec le Sunrise, il a tout raflésur le plan local et a rivaliséavec des grosses pointures africaines.

 

Alors que le Sunrise SC vivait ses années de gloire, le coach Ashok Chundunsingh, devait lâcher une phrase typiquement de lui :« Les Jaune et Noir pouvaient battre Manchester United ». En 2016, il maintient cette déclaration et nous l’avons rencontré à l’occasion de l’Euro 2016 pour ses préférences et son analyse.  La conversation s’est portéeinévitablement sur le football mauricien et sur ses années de gloire avec le Sunrise SC.

 

Champion d’Afrique

 

L’ex-mentor des Jaune et Noir en est convaincu : « Oui le Sunrise pouvait battre Manchester United, car,à l’époque, on était physiquement aussi fort que n’importe quelle équipe à travers le monde».  Il ajoute que « Je crois sincèrement si on prenait ce Sunrise-là et si on ajoutait l’expérience que j’ai acquise aujourd’hui comme entraîneur, on aurait battu Manchester United, Liverpool ou autres, et on aurait été championne d’Afrique. D’ailleurs à l’époque, on rivalisait avec les FC Sions, Zamalek, Nkana Red Devils, cela démontrait qu’on était sur le bon chemin ».

 

Ashok Chundunsingh, avant l’épopée fantastique avec le Sunrise SC, était un footballeur au sein des Hindu Cadets, et avait dans les années 90 occupéles fonctions de sélectionneur national à deux reprises avec des résultats moins glorieux qu’avec le Sunrise SC. Il a été un témoin privilégié de l’histoire du football mauricien et jette un regard très critique sur  l’état actuel de cette discipline.

 

«Le football mauricien continue de m’intéresser car c’est grâce à lui que je suis connu et qu’on dit que je suis un grand entraîneur. Mais franchement vous dire, le niveau actuel du football est zéro. Les footballeurs commettent beaucoup de fautes, ne savent pas se positionner sur un terrain, ne savent pas défendre ou attaquer. Ils n’ont aucune notion tactique et jouent qu’avec leurs cœurs et leurs corps. Il suffit de regarder un match pour comprendre»,lâche-t-il amèrement.

 

Il s’est laissé tenter,récemment, par l’offre de Petite-Rivière-Noire FC pour réenfiler le costume d’entraîneur. L’occasion pour lui de s’embarquer dans le train de la professionnalisation du football, qui a démarré depuis deux ans. L’aventure a été de courte durée pour Ashok Chundunsingh sur la côte ouest et sans entrer dans les détails il lance des propos lourds de sens.

 

«L’idée de la professionnalisation est bonne mais on doit voir au niveau de la gestion des clubs, comment les entraînements sont faits, l’attitude des joueurs parmi tant d’autres. J’ai eu l’occasion de constater de visu que les joueurs sont indisciplinés sans qu’ils ne soient réprimandés par leurs dirigeants qui n’ont aucun contrôle sur eux. Je me demande si la ligue professionnelle va durer dans les années à venir », fait ressortir notre interlocuteur.

 

Le bilan de santé du Club M l’inquiète. «Le football est en perdition et peut-être dans 2 à 3 ans on cessera de parler du football mauricien. Déjà la formation et le niveau sont à zéro. Les Mauriciens ont une culture footballistique entre l’Angleterre et les pays de l’Amérique latine. Que voyons-nous aujourd’hui ? Un entraîneur àla tête de la sélection nationale qui mise sur la défensive sans savoir comment produire du jeu. Il a ses propres notions mais qui  ne conviennent pas à notre football. Les éléments tactiques et techniques ne sont pas pris en compte, donc, on pratique un football naïf, alors qu’il devient plus scientifique, calculéet méthodique», constate l’ex-entraîneur du Club M.

 

La seule lueur d’espoir pour empêcher la mort du football, à Maurice,réside dans la formation. Ashok Chundunsingh propose ses idées. « La MFA doit encourager la formation au niveau des jeunes et des clubs. C’est bien qu’on parle beaucoup de la formation, mais elle doit d’abord commencer à travers des clubs et les régions. Il faut laisser un jeune s’entraîner et jouer en compagnie de ses amis, voisins, familles. Il faut le laisser prendre du plaisir à jouer au football. Si on prend un jeune on l’emmène dans un autre environnement pour le faire apprendre il ne pourra pas s’exprimer et prendre ce plaisir. Laformation doit commencer dans la région où réside ce jeune.  Les joueurs doivent se sentir bien entourés, et être aiméspar le public.  Valeur du jour, les joueurs des clubs nationaux ne sont pas issus des régions auxquelles sont attachés leurs clubs. Le fait qu’on autorise les clubs à recruter 5 à 6 joueurs étrangers démontre clairement qu’on n’arrive pas à produire des footballeurs mauriciens », dit l’ex-mentor du Sunrise SC.

 

Un  franc-parler jusqu’au bout. Fidèle à sa réputation.

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