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30 juillet 2019 05:36
Elle a pulvérisé tous les records. Noémi Alphonse, athlète handisport de 23 ans, s’est imposée comme la reine du 1 500 m en fauteuil, avec un record de 4 mn 43. Le vendredi 26 juillet, tous les yeux étaient braqués sur elle. Le porte-drapeau de la sélection mauricienne a vite distancé ses adversaires, creusant un écart impressionnant. C’est avec presque un tour d’avance que Noémi Alphonse a remporté haut la main sa course devant une foule en délire, au stade Germain Comarmond.
Le bonheur qu’elle a ressenti au moment de sa victoire est indescriptible. Noémi savoure d’autant plus ce succès qu’il a aujourd’hui un doux goût de revanche. «Lors des derniers Jeux des îles, j’étais dans les gradins en tant que supportrice car je n’avais pas été sélectionnée. C’était un déclic. Depuis, j’ai travaillé sans relâche. On s’est entraîné intensivement, 7 jours sur 7, 6 heures par jour.» Autant d’efforts qui prouvent que le travail finit toujours par payer.
Aujourd’hui, elle dédie son sacre à tous ceux qui l’ont soutenue. Son entraîneur, Jean-Marie Bhugeerathee qui est comme un deuxième papa, ses parents Jean-Alain et Nathalie Alphonse. «Je remercie aussi mon grand-père qui s’est déplacé pour venir me voir. J’étais tellement émue. Merci également à Hewlett Nelson, la présidente du Magic Para Sports Club, Audrey Grandcourt, préparatrice physique, Hugo Dalais, manager chez I-Motion, mes sponsors ABC Group et PhoenixBev, le ministère de la Jeunesse et des Sports, toutes les personnes qui nous ont véhiculés et Ti Bam.»
Ce qui l’a portée aussi, c’est la mobilisation des Mauriciens qui se sont déplacés en masse pour venir soutenir les athlètes. Sans eux, soutient Noémi, tout cela n’aurait pas été possible. Si elle est aujourd’hui fière de son parcours, l’athlète, qui prépare les championnats du monde à Dubaï, l’est tout autant pour ses amis sportifs. «L’équipe d’athlétisme a ramené huit médailles d’or. Le handisport a ramené 17 médailles d’or au total, ce qui est une performance extraordinaire. Je crois que nous pouvons être fiers de nous.»
Une belle leçon de vie !
Il a fait vibrer le public. Suffian Muhammad Ropun, athlète malentendant, a remporté haut la main l’épreuve du 50 m nage libre avec un temps de 28,76 secondes. Ceux qui ont assisté à sa performance au complexe sportif de Côte-d’Or ont eu des frissons. Depuis les derniers JIOI à La Réunion, où il avait décroché la médaille d’argent, le jeune homme de 19 ans s’est entraîné sans relâche. «En revenant de La Réunion, je n’étais pas content de ma performance, avoue-t-il. Alors, je me suis donné à fond. Avant de plonger, j’ai fait le vide autour de moi et une fois dans l’eau, je n’ai plus pensé à rien.»
Les efforts paient toujours et Suffian l’a prouvé. Non seulement son travail a impressionné le public mauricien mais son sourire et sa joie de vivre l’ont séduit. Pour le féliciter, tous ceux présents, même le Premier ministre et son épouse, ont levé les mains en l’air pour l’applaudir en langage des signes. Un moment intense dont il garde un souvenir ému. «C’était incroyable, s’émeut-il, des étoiles plein les yeux. J’en avais les larmes aux yeux. Je remercie tout le monde. Vraiment. Merci beaucoup.»
Dans le public, son père Seedick a assisté à son sacre discrètement mais avec toute la fierté qu’un père peut ressentir pour son enfant : «Suffian s’est donné à fond en s’entraînant intensivement. Aujourd’hui, il a prouvé qu’il peut nager comme tout autre nageur professionnel. Il n’a pas seulement rendu sa famille fière mais tout son pays.» C’est fort de tout cela que Suffian préparera bientôt sa prochaine compétition qui devrait être les World Deaf Swimming Championships, au Brésil.
Elle tremblait de peur. Mais une fois dans les starting-blocks, Anndora Asaun, athlète handisport de 20 ans, n’a plus eu qu’une idée en tête : être la première à franchir la ligne d’arrivée. Et Anndora, non-voyante depuis la naissance, l’a fait. Accompagnée de son guide, Loïc Bhugeerathee, qui lui sert d’yeux, elle s’est élancée telle une gazelle sur la piste, remportant haut la main cette course de 100 m. Le binôme a ainsi réalisé une belle performance après huit mois d’entraînement. Après La Réunion, où elle avait été sacrée championne, elle conserve donc son titre. «Je suis tellement contente d’avoir pu décrocher cette médaille d’or dans mon pays. J’ai le sentiment d’avoir rendu ma famille et les Mauriciens fiers.»
Anndora Asaun est d’autant plus fière de son temps (14’57) qu’il s’agit de son record personnel et de celui des jeux. À La Réunion, se souvient-elle, elle avait gagné par protestation mais cette fois ; la victoire est sans contestation. «Ça avait créé beaucoup de polémiques. Je suis heureuse d’avoir pu prouver à ceux qui m’ont critiquée à l’époque que je mérite cette médaille.»
Une prouesse réalisée grâce à ses efforts mais aussi grâce au soutien de Loïc, de son entraîneur, de sa famille et du public mauricien. «J’ai entendu les supporteurs. Une ambiance purement mauricienne. Ça m’a fait tellement plaisir. J’ai pris toute cette énergie et ça m’a donné de la force.» En attendant les prochains Jeux des îles, Anndora Asaun va se préparer pour les World Para Athletics 2019 à Dubaï, en 2019 et tenter les qualifications pour les Jeux olympiques d’été en 2020.
Il reste invaincu. Quatre participations, quatre victoires. Une fois de plus, Scody Victor, 30 ans, a confirmé son titre de champion des bassins en 50 m nage libre. Décrochant sans surprise la médaille d’or avec un chrono de 32,84 secondes. Un exploit qu’il réitère après sa première participation aux Jeux des îles à Madagascar. Mais gagner dans son pays est une victoire plus savoureuse.
Père d’une petite fille, Chanelle, et marié à Jemmysen, il se souvient encore de ce qu’il a ressenti lorsqu’il a eu droit à une ovation de la part du public. Un moment inoubliable. «J’étais hyper content de voir comment les Mauriciens se sont mobilisés pour nous soutenir. J’ai eu la chance d’être entouré par ma famille et mes trois entraîneurs qui ont fait un travail formidable.»
Unijambiste depuis l’âge 12 ans après une chute, c’est en 2005 qu’il a commencé la natation. Quelques essais dans une piscine ont fini par le convaincre qu’il avait pour cette discipline une véritable passion et un talent jusque-là insoupçonné. La compétition, se mêler aux autres participants, se remettre en question, travailler dur pour s’améliorer, c’est ce à quoi Scody Victor carbure. Dans un mois, c’est aux championnats de Manchester qu’il essaiera une fois de plus de briller.
Avant chaque départ, elle sent monter l’adrénaline du coureur. Mais une fois le coup de sifflet donné, plus de place pour l’hésitation. Spécialiste du saut en longueur et du 800 m, Ashley Telvave, 19 ans, s’est, cette fois, jetée à l’eau dans une discipline qu’elle ne maîtrise pas. «Normalement, je fais de longs parcours mais cette fois, on m’a demandé d’essayer le 100 m. C’était ma première fois. J’avais peur et je me posais beaucoup de questions. Je ne savais pas si j’avais cette rapidité.»
Malgré ses appréhensions, celle qui fait partie de la Mentally Handicapped Persons Sports Federation, a prouvé à elle-même qu’elle était tout aussi capable de décrocher la médaille d’or dans cette discipline. Ashley Telvave a ensuite remis ça lors des épreuves de saut en longueur et du 800 m, raflant une fois de plus la première place. Une réussite qu’elle dédie à ses parents Sharon et Wesley, ses deux frères Oliver et Mathieu, et ses amis qui étaient tous au stade pour la soutenir.
Cette victoire, poursuit-elle, c’est aussi grâce à la ferveur des Mauriciens. «J’étais vraiment émue de voir cette mobilisation, de voir le drapeau de Maurice flotter.» Forte de cette nouvelle expérience, Ashley Telvave ne compte pas ralentir la cadence. En attendant les prochaines compétitions, elle continuera à s’entraîner pour améliorer son chrono.
Ne jamais baisser les bras. Face aux coups durs, toujours savoir se relever et avancer. C’est la philosophie de Cédric Ravet, 32 ans. Sur la piste du 1 500 m en fauteuil, cet athlète a prouvé que le sport est une question de résilience. Si le niveau de ses adversaires ne lui faisait pas peur, c’est autre chose qui le stressait. «J’avais peur d’une collision. Mes adversaires avaient un niveau amateur, ce qui a augmenté le risque de collision. Si elle avait eu lieu, j’aurais été disqualifié. J’étais donc très concentré. Il y avait aussi le vent qui nous été défavorable car ça nous ralentissait. Mais je suis resté concentré sur mon objectif.» Celui de ramener l’or à son pays mais aussi de décrocher une qualification pour les championnats du monde. Il va ainsi déjà concourir dans la catégorie du 400 m. «Je n’ai pas pu être qualifié pour les 1 500 m mais je suis quand même satisfait de mon temps qui est de 3m45. Le record des jeux est de 3m29 et mon record personnel est de 3m09. Je voulais bien gérer ma course au lieu d’aller à fond dès le début et risquer de la perdre.»
Se préparer, toujours se préparer. C’est la clé du succès, atteste Cédric Ravet. Pour lui, les entraînements n’ont jamais cessé. «Il y a une grosse préparation derrière. Entre chaque compétition, le travail se poursuit. C’est crucial.» C’est donc concentré qu’il vise aujourd’hui une qualification pour les jeux paralympiques de 2020. Il fera tout pour y être.
Il visait une cinquième médaille, Vincent Duval l’a obtenue. Ce jeune athlète malentendant, âgé de 25 ans, s’est une fois de plus illustré dans l’épreuve du saut en longueur, raflant pour la troisième fois consécutive la médaille d’or. Si pour les deux précédentes éditions des jeux, ce Mauricien, installé à La Réunion, a été doublement médaillé, notamment pour le saut en longueur et le 200 m, cette fois, c’est uniquement à l’épreuve du saut en longueur qu’il a tenté de préserver sa suprématie.
Malgré une préparation «difficile», le jeune homme n’a pas baissé les bras et a redoublé d’efforts pour rapporter l’or à son pays. «Je m’étais blessé et j’ai pris du retard sur ma préparation mais je ne me suis pas découragé et j’ai fait tout ce qu’il fallait pour avoir la première place.» Dans la même catégorie, Sheena Bhikea, 23 ans, a, elle, décroché la médaille d’argent. Celle qui en est à sa troisième participation aux JIOI compte bien travailler davantage pour les prochaines compétitions.
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