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29 avril 2020 01:18
140 jours. Voilà le temps qui s’est écoulé depuis la tenue de «The Au Revoir Plate», le dernier tour de piste de la saison 2019, qui avait vu la victoire d’Anza-Borrego. Une éternité pour les mordus des courses hippiques, mais encore plus pour le MTC, qui n’a plus perçu de revenus substantiels depuis. Une situation intenable pour un organisme dont la masse salariale est composée de près de 350 employés. Et face au manque de visibilité quant à la fin de la crise sanitaire mondiale qu’est le COVID-19, l’organisateur des courses à Maurice n’a plus le choix : il doit redémarrer l’activité hippique au plus vite.
Le MTC n’est, toutefois, pas maître de son destin, car une importante décision comme celle-ci demeure la prérogative des autorités du pays. Dans cette optique, il nous revient que le Club de la Rue Eugène Laurent aurait déjà eu plusieurs échanges sur le sujet avec la Gambling Regulatory Authority (GRA). «Nous sommes d’accord sur le principe. Il nous reste à présent à bien définir tous les paramètres et établir un protocole en collaboration avec le gouvernement», nous a confié une source proche du dossier.
Mais dans la pratique, quelles seront les dispositions qui devront être prises pour permettre la tenue de courses hippiques à huis clos, une véritable première à Maurice ? « Avec la topographie si particulière du Champ de Mars, il nous faudra bien évidemment la collaboration de la force policière, pour nous assurer qu’il n’y ait pas d’attroupements tout autour de la piste, et ce afin de respecter la distanciation sociale préconisée par le ministère de la Santé. Il faudra, probablement, considérer la fermeture temporaire de certaines rues autour du Champ de Mars, le temps de la journée, pour limiter les risques de contamination.»
Quid de l’accès à l’hippodrome ? «Ici aussi, nous devrons mettre en place un screening très rigoureux. Le personnel affecté au bon déroulement de la journée serait réduit au strict nécessaire. En ce qu’il s’agit des propriétaires, il se pourrait bien qu’ils ne soient pas de la partie, dans un premier temps. Il en va de même pour toute personne dont la présence n’est pas indispensable. Certes, ce sont des choix qui risquent de ne pas être bien accueillis, mais il devra en être ainsi pour lancer la saison.»
Côté finance, notre interlocuteur nous confirme que le club bicentenaire est déjà en mode de survie, la priorité étant d’assurer le salaire des employés. Sinon, il leur est difficile de se projeter dans l’avenir, tant l’incertitude est grande. «Nous vivons au mois le mois. Ce serait vraiment dramatique pour l’industrie hippique si nous n’arrivons pas à mettre en place le huis clos.» Cette formule «behind closed doors» sera-t-elle la planche de salut pour le MTC, déjà endetté à la hauteur de Rs 5,8 millions pour l’exercice 2019?
«Au MTC, on ne se fait aucune illusion quant au fait que l’organisation des courses à huis clos ne nous permettra probablement qu’à rentrer dans nos frais. Car nous ne percevrons aucun revenu du sponsorship, des marchands et de l’assistance au sein des loges. Il y a fort à parier que les stakesmoney seront aussi impactés négativement. De plus, il faudra s’interroger sur la capacité des gens à parier sur les courses dans le contexte économique très compliqué que nous vivons. Au-delà de l’aspect financier, nous pensons que la reprise des activités hippiques pourrait aussi permettre d’avoir une certaine distraction pour toute la population mauricienne qui vit cloîtrée chez elle depuis le 20 mars.»
En parlant justement de l’aspect financier, il faut dire qu’il est non-négligeable pour le MTC, dont 70% de ses revenus dérivent du pole du betting. A ce jour, il demeure très peu probable que les bookmakers auront le droit d’opérer, et ce afin de minimiser le contact entre les parieurs qui affluent à chaque journée de course. Ainsi, le MTC ne pourra compter que sur les deux compagnies du Tote, à savoir Supertote et Totelepep, et SMS Pariaz (fixed odds betting) pour générer des revenus à travers la prise des paris par téléphone. Selon notre source, ces trois enseignes ne représenteraient que 40% à 50% du betting, un chiffre qui souligne encore plus la situation difficile dans laquelle le MTC se trouve. Il est cependant possible que ce chiffre grimpe quelque peu car il n'est pas à exclure qu'une partie des parieurs privés de fixed odds betting sur l'hippodrome se redirige vers ces trois prestataires.
Mais qu’en est-il des coursiers, acteurs indispensables pour la relance de l’activité hippique ? Selon un membre d’une écurie que nous avons sondé, il faudra au minimum trois à quatre semaines pour que les chevaux soient «racing fit». «Actuellement, nous tenons quatre séances d’entraînement par semaine. Au début, nous ne faisions que du travail léger mais sommes montés légèrement en intensité, même si les galops poussés ne sont pas encore à l’ordre du jour. Nous n’avons pas vraiment de visibilité par rapport aux fixtures notamment mais nous nous tenons prêt pour la reprise d’ici fin-mai.»
Toutes les écuries seront-elles prêtes pour cette échéance ? «Je ne peux malheureusement pas parler pour les autres, mais de ce que je vois au training ces jours-ci, je pense que nous serons au moins une demi-douzaine d’écuries aptes à aligner des partants si la saison débute fin-mai.» A Maurice, il est un fait que les écuries dépendent beaucoup du betting pour pouvoir maintenir la tête hors de l’eau. L’absence des bookmakers ne risque-t-elle pas d’avoir une influence néfaste sur la participation?
«La situation devient vraiment critique. Nou bizin galoupe. En ce qu’il s’agit de la situation avec les bookmakers, je pense que c’est du 50-50 pour les entraîneurs», insiste notre interlocuteur, qui se dit surtout inquiet par rapport aux jockeys étrangers, qui deviendront, selon lui, une denrée rare pour l’hippisme mauricien une fois le confinement levé par le gouvernement mauricien. «Quel jockey acceptera de passer 15 jours en quarantaine à son arrivée chez nous avant de pouvoir chausser les étriers ?»
Toujours est-il que le dossier du huis clos prend forme du côté du MTC. Reste à présent à obtenir le feu vert des autorités concernées. «C’est une situation nouvelle pour tout le monde et l’adaptation demeure le maître-mot. Nous restons en contact avec la GRA et nous avons inclus le ministère de la Santé dans le processus du decision making. Nous gardons bon espoir», nous a confié notre source au MTC.
La juridiction de Hong Kong, souvent prise en exemple par la planète hippique, est à ce jour l’une des rares qui résiste à la propagation du COVID-19. Et le MTC compte bien calquer le huis clos mis en place par le Hong Kong Jockey Club (HKJC). Mais quelles sont exactement les mesures sanitaires mises en place là-bas ?
Comme le confiait notre compatriote Karis Teetan à notre confrère l’express récemment, le HKJC a tout mis en oeuvre pour assurer la protection des professionnels de l’industrie. D’abord, tous les jockeys sont testés quatre fois par semaine. Quand ils ne sont pas en selle, ces derniers portent tous des masques et ils se tiennent à bonne distance les uns des autres dans le jockey’s room. Leurs déplacements journaliers sont monitored par le HKJC et ils se font même livrer leurs provisions chez eux.
Pour accéder à l’hippodrome, toutes les personnes doivent se soumettre à un contrôle de température et seulement un propriétaire par cheval est autorisé le jour des courses. Mais le HKJC ne se repose pas sur ses lauriers, étant constamment à la recherche de nouvelles mesures pour renforcer la sécurité sur l’hippodrome. Bien évidemment, le MTC ne dispose pas forcément de tous les moyens de Hong Kong mais il compte bien s’en inspirer pour permettre la reprise de l’activité hippique.
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