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12 octobre 2016 02:00
Les défuntes équipes de la Fire Brigade, du Sunrise, du Cadets Club, du Scouts Club étaient considérées comme le Big Four local dans les années 90. Elles se livraient à de rudes batailles pour le titre avec notamment des clasicos de feu.
Derrière la lutte intense entre ces équipes-là, un duel sans merci avait aussi lieu sur un autre tableau : celui du meilleur buteur.
A un certain moment, l’équipe du Sunrise pouvait compter sur Ashley Mocudé, alors que la Fire Brigade avait Tony François tandis que le Cadets Club s’appuyait sur Johnny Edmond pour mener ses attaques. Au décompte final, c’était souvent le buteur des Jaune et Noir, Mocudé, qui avaient le dernier mot pour rafler le titre de meilleur buteur de la saison. Une belle empoignade entre goleador qui faisait le bonheur des nombreux amateurs du ballon.
Johnny Edmond a marqué cette belle époque en inscrivant plein de buts. Il est âgé aujourd’hui de 47 ans et vit en Angleterre depuis une douzaine d’années. Outre le Cadets Club, l’ex-footballeur avait porté les couleurs du Scouts Club, mais aussi de La Cure Sylvester SC (avec lequel il avait fait ses premiers pas comme footballeur de haut niveau) et Young Tigers. Une carrière fructueuse qui devait le mener aussi en sélection nationale. Une carrière dont il se remémore avec plein d’émotion à travers des clichés d’antan que nous avons dénichés.
« C’était une belle époque avec des stades qui étaient bondés. Je me rappelle que les gens venaient vers moi pour avoir des cartes d’entrée pour ensuite aller soutenir l’équipe adverse. Il y avait une très bonne ambiance dans les gradins et cela aidait les footballeurs à se transcender. Moi-même j’étais très motivéàdonner le meilleur de moi-même pour procurer du plaisir aux supporteurs. J’éprouvais une grande joie lorsque je marquais des buts pour ensuite venir les célébrer devant les fans de mon équipe», se rappelle Johnny Edmond.
C’est sous les couleurs du Cadets Club que cet habitant de CitéLa Cure devait faire parler de lui en enchaînant les buts. Il est redevable envers Rajesh Gunesh (ex-joueur- vedette du Cadets Club et qui était devenu l’entraîneur de cette équipe) qui l’a aidé à s’améliorer. « C’est grâce à lui que j’ai appris les techniques du football et le positionnement sur le terrain », précise l’ex- buteur.
Il ne se souvient pas le nombre de fois qu’il a fait trembler les filets. Mais un but reste indélébile dans sa mémoire. « C’était un match entre le Cadets Club et le Sunrise. On avait ouvert la marque avant qu’Ashley Mocudén’égalise. On s’acheminait vers un score de parité lorsque je réceptionnais le ballon à35 ou 40 mètres du but à quelques secondes du coup de sifflet final. Sans réfléchir deux fois, j’ajustais un tir qui allait se loger dans la cage d’Orwin Castel. Après ce but et les célébrations, l’arbitre siffla la fin de cette rencontre. Ça a été un moment de pur bonheur d’offrir la victoire à mon équipe et surtout avec un but pareil », raconte l’ex- goleador.
Aujourd’hui nos stades sont clairsemés et on entend plus les roucoulements des pigeons que l’encouragement des foules. Une situation qui chagrine cette ancienne star du ballon rond mauricien. «J’ai appris que le football ne suscite plus la même ferveur populaire et cela me rend très triste. Dommage qu’on ait atteint cette situation et cela est dangereux pour l’avenir du football. J’ai constaté que certains s’accrochent encore au football, tant comme dirigeants, entraîneurs et supporteurs. Même aujourd’hui les gens me reconnaissent dans la rue et viennent me parler. J’aurais souhaité que les footballeurs actuels puissent avoir une telle reconnaissance auprès du grand public », dit-il.
Après de bons et loyaux services chez les Vert et Blanc, le footballeur d’origine chagossienne devait répondre favorablement aux appels du Scouts Club, considéré comme le rival direct du Cadets Club àl’époque, pour ramener le club vers le sommet. Les Rouge et Blanc avaient mis le paquet en recrutant certains des meilleurs footballeurs de l’île et cela allait s’avérer payant avec le sacre de 97/98 après plus de 20 ans d’attente. Johnny Edmond était un des artisans du succès des Rouges à la pointe de l’attaque et ne regrette pas son choix de rejoindre le Scouts Club.
«Les dirigeants avaient un plan ambitieux pour redonner aux Scouts Club ses lettres de noblesse. C’était un projet sportif très intéressant et l’équipe me voulait beaucoup. Les dirigeants n’hésitaient pas à m’attendre devant ma résidence pour négocier. Je suis content d’avoir pu aider l’équipe à redevenir championne de Maurice», souligne Johnny Edmond. Avec l’avènement de la régionalisation des équipes de football au début des années 2000, notre interlocuteur rejoint les rangs de l’Olympique de Moka et puis de l’ASPL 2000.
L’heure de la retraite aussi s’approchait pour lui alors qu’une proposition professionnelle s’offrait à lui pour un emploi en Angleterre. Johnny Edmond fait ses bagages avec comme espoir d’assurer son avenir et celui de ses proches. Ca fait plus de 10 ans qu’il est employé au sein d’une compagnie d’alimentation, et continue d’être en contact avec le football dans son quartier de Crawley (qui a un air de Maurice avec les nombreux Chagossiens et Mauriciens qui y vivent). « J’ai joué pour une petite équipe régionale oùj’ai remporté une compétition mais faute de temps je ne peux pas trop jouer au football ». Mais il m’arrive d’aider les Chagossiens qui ont participé à la ConIFA (The CONfederation of Independent Football Associations), regroupant les pays et états non-reconnus par les instances internationales.
Cependant, Johnny Edmond nourrit un regret depuis qu’il réside en Angleterre. « Je suis arrivé dans ce pays un peu trop tard. Peut-être si j’avais 25 ans j’aurais pu entamer une belle carrière de footballeur en Angleterre et ce ne sont pas les clubs qui manquent avec des infrastructures incomparables avec celles de Maurice avec des pelouses qui rappellent celles du vieux stade George V. C’est mon regret», confie celui qui a marqué le football mauricien.
Cela fait la deuxième fois que Johnny Edmond est retourné à Maurice après avoir posé ses valises en Angleterre. Une visite pour des raisons familiales mais qui a tourné inévitablement autour du football. Partout où il est passé il y avait des gens qui l’ont reconnu, et il a profité pour retrouver certains de ces anciens coéquipiers.
S’il n’a pas eu l’occasion d’assister à un match de football, il a pu cependant voir son équipe de cœur, La Cure Sylvester SC lors des rencontres de préparation. Le club de la capitale l’a d’ailleurs honoré en lui offrant un Shield souvenir. Les footballeurs du passé ne seront jamais oubliés.
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