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Par Ally Mohedeen
7 septembre 2014 00:35
Il a fait preuve de courage pendant de longues années. Alors que ses chevaux se préparent à quitter la Rue Shakespeare mardi matin pour se rendre en piste, Serge Henry, cloué au lit depuis quelque temps après des soins à l’île de la Réunion, se bat contre sa maladie dans la demeure familiale à Curepipe. Lorsque les préposés du MTC ouvrent la piste d’entraînement, Kiki, lui, pousse ses derniers soupirs et quitte ce monde sur la pointe des pieds.
La nouvelle, telles les remontées étourdissantes de ses chevaux comme Pinehurst dans le Maiden en 1998, atteint, très vite, le Champ de Mars où elle est accueillie avec tristesse par ses collègues entraîneurs, membres du public et officiels du MTC.
« Missié Kiki ine alé ! ». Le public, massé en petit nombre à la rue Shakespeare où les chevaux se dégourdissent les jambes avant de se rendre en piste, fait circuler la nouvelle de bouche à oreille. Ceux – et il y en a – qui soutiennent son écurie, viennent se tenir près de l’enceinte de l’écurie Henry pour présenter leurs sympathies à sa fille Nathalie, laquelle trouve, difficilement, ses mots. Courageuse, elle l’est puisqu’elle tient à superviser l’entraînement des chevaux de son défunt père malgré la tristesse qui l’écrase presque. «Quoi dire dans ces moments difficiles ? Nous sommes tous profondément peinés. Mon papa ne faisait jamais les choses à moitié et c’est pourquoi il a été champion dans plusieurs disciplines. C’est une perte pour nous tous !». Champion il l’a été. Au golf, bridge, boxe et aux courses de chevaux qu’il a appris à connaître et aimer.
Il voulait assister au Maiden
La présence de son frère Philippe, lui-même un ex-champion, aux côtés de Nathalie Henry au Champ de Mars retient également l’attention en ce matin du mardi 2 septembre. «C’est Kiki qui lui avait demandé de venir prêter main-forte à Nathalie au cas où sa santé ne lui permettait pas d’apporter les derniers réglages dans l’entraînement de Man To Man en marge du Maiden», explique une source proche de Philippe Henry. Ce dernier, même s’il a été un adversaire coriace de son frère à l’époque où il était à la tête de son propre établissement, est visiblement peiné par la disparition de son frère aîné. Il déclare : «Tout le monde savait qu’il était souffrant. Il venait de rentrer de la Réunion où il a reçu des traitements. Malheureusement, il part avant le Maiden, une course dans laquelle il voulait absolument suivre la performance de Man To Man.»
Au Champ de Mars, l’amitié qui lie les familles Henry et Gujadhur est connue de tous, car ce sont des gens qui contribuent de génération en génération à l’avancement de la chose hippique. A l’époque où c’était le papa de Serge et de Philippe qui roulait sa bosse au Champ de Mars, du côté de la famille Gujadhur, il y avait les deux compères Sir Radha et Ton Mica qui menaient la barque de la casaque électrique. Cette amitié-là a perduré chez la génération Kiki, Philippe, Bud, Ramesh et Ramapatee, entre autres.
Il quitte le Champ de Mars pour entrer dans la légende
Alors que Philippe et Nathalie ne quittent pas des yeux les chevaux de Kiki dans le paddock après leurs mises en jambes sur la piste, on sent chez les Gujadhur un sentiment de profonde tristesse. Que ce soit chez Ramapatee Gujadhur, pourtant lui-même préoccupé par ses chevaux, surtout ceux qui seront au départ du Maiden aujourd’hui, ou chez Bud et Ramesh qui préparent eux aussi la journée classique. «Kiki a le plus grand nombre de victoires. Voilà pourquoi on dit qu’il était un grand entraîneur. Son papa avait toujours été proche de la famille. Kiki s’est toujours montré courageux et combatif ces derniers temps alors que sa santé le rendait de plus en plus fragile», explique Ramapatee Gujadhur.
Du côté du Mauritius Turf Club, le départ de Serge Henry rend triste le personnel du management car, comme nous le dit un employé du Club, «c’était quelqu’un qui disposait de la plupart de son temps aux courses. S’il n’était pas à son écurie ou à son bureau, il était toujours au MTC. Il trouvait toujours des choses à dire et des compliments à faire».
Pour le président Gilbert Merven, le décès de Serge Henry «est une grosse perte pour les courses». Il n’a pas tort puisque Serge Henry était, non seulement, un entraîneur dévoué, mais aussi un amoureux de la race équine. La preuve : il était un des rares entraîneurs à tenter l’élevage de chevaux en terre mauricienne !
Parvez Bhoyroo, qui a connu de grands moments aux côtés de Serge Henry à l’époque où il possédait plusieurs chevaux dans ce «yard» garde de cet ex-entraîneur le souvenir d’un «homme formidable, ene mari dimoune.» Il l’avait rencontré quelques jours seulement avant ce mardi fatidique. «Ces derniers temps, je suis parti le voir assez régulièrement et je me souviens qu’il m’avait demandé de “fer bon garçon” la dernière fois que je lui ai serré la main. C’était dimanche après la journée de courses», raconte celui qui était l’un des propriétaires de Pinehurst, vainqueur du Maiden pour le compte de Serge Henry en 1998. Entre ces quelques lignes, l’homme craque, car il avait prévu de rencontrer «Kiki» dans l’après-midi de mardi.
Serge Henry, ce battant hors-pair, a jeté l’éponge. Il laisse derrière lui sa femme Linda, qui l’a toujours soutenu durant sa longue maladie, ses trois enfants, Jean-Michel, Nathalie et Caroline et ses chevaux ! Il quitte le Champ de Mars pour entrer dans la légende !
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