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12 novembre 2015 17:17
Sa présence sur les pelouses mauriciennes ne passe pas inaperçue. Ceux qui assistent aux matchs de la Barclays Mauritius Premier League et des autres championnats l’ont certainement remarquée, et de plus, elle sait faire preuve d’autorité sur le terrain. Pakita Rivet exerce comme arbitre dans un monde principalement dominé par les hommes. Le 28 octobre dernier, elle a officié comme arbitre principale lors de la rencontre mettant aux prises l’AS Rivière-du-Rempart à GRSE Wanderers.
«Les joueurs, les entraîneurs et les spectateurs me respectent toujours. Même en dehors des terrains il y a toujours ce ‘Bonjour Ref !’ à mon égard. Il y a des décisions qui ne plaisent pas aux footballeurs et spectateurs et là on se fait critiquer. Mais cela ne va pas plus loin que cela », lance Pakita Rivet avec plein d’enthousiasme.
Arbitre internationale depuis 2013, la jeune femme a débuté dans l’arbitrage en 2009. C’est sa passion pour le football qui l’a amenée dans ce milieu. Un amour que lui a été transmis par ses frères qui sont Frédéric et Mike. Avec deux frangins comme formateurs, cette supportrice de Liverpool a rapidement développé quelques aptitudes footballistiques. Ses talents ne passent d’ailleurs pas inaperçus dans son quartier de Baie-du-Tombeau. Alors qu’elle est encore adolescente, Pakita Rivet rejoint l’équipe de foot du Cercle de Latanier.
Douée, elle a évolué à tous les postes, « sauf celui de gardienne de but », raconte la jeune femme avec de grands éclats de rires. Son secteur de jeu reste toutefois le poste de milieu défensif. Mais cette aventure ne durera pas longtemps, puisque en rejoignant la Force policière, la jeune fille est contrainte de mettre un terme prématurément à sa carrière en raison des risques de blessures.
«Je ne pouvais prendre le risque de continuer, car cela m’exposait aux blessures. Puis un jour, lors d’un tournoi, j’ai appris que la Mauritius Football Association (MFA) recrutait des aspirants arbitres. Je me suis inscrite, et par la suite j’ai reçu une formation avant de pouvoir commencer à exercer en championnat», relate Pakita Rivet.
Exercer comme arbitre requiert beaucoup de sacrifices, souligne notre sifflet au féminin. «Les sorties du week-end sont à oublier, avec les compétitions nationales. Ajouter à cela le conditionnement physique, où il faut s’entraîner le plus souvent possible pour pouvoir rester en forme. Et, aussi, rater les matchs de Liverpool à la télé», avoue-t-elle
Faire carrière comme arbitre ne demande pas seulement une bonne condition physique, mais aussi un certain niveau académique, et une aptitude à pouvoir gérer la pression, le stress et les situations difficiles. Pour en arriver-là, Pakita Rivet doit beaucoup à ses pairs.
«J’ai toujours eu le soutien de la famille dans ce que je fais. Ils ont toujours été derrière moi depuis mes débuts en football. Sans eux, je ne pourrais vivre pleinement ma passion pour le ballon rond, car, même si je ne joue plus, je suis toujours au contact de ce sport. D’ailleurs, je n’hésite pas à siffler un match dans le quartier quand on me sollicite, mais bien entendu, je le fais en tenant compte de mes engagements professionnels», explique notre sifflet.
«Le soutien et les commentaires des autres arbitres et officiels comptent beaucoup. Cela nous permet de savoir si nous avons bien fait notre travail ou pas. Il y a aussi les encouragements des personnes de la commission d’arbitrage et ceux à la fédération qui nous poussent toujours à nous perfectionner», précise la femme en noir.
Elle dira, cependant, que pour réussir un bon match, il faut une bonne cohésion entre l’arbitre principal, ses assistants et aussi le quatrième arbitre. «Sans l’aide de ces personnes, l’arbitre central ne pourra sans sortir», insiste cette dernière.
Et lorsque nous lui demandons si, des fois, elle ne doute pas de son jugement, elle fait comprendre qu’il y a toujours un commissaire de match qui surveille tout ce qui se passe durant la partie. «Bien sûr, nous ne pouvons plaire à tout le monde dans un match. Les spectateurs de l’équipe perdante ne sont pas toujours d’accord avec nous mais il y a toujours un commissaire qui nous suit et jusqu’à présent je n’ai eu aucun reproche », commente notre officielle qui reste convaincue que la moindre erreur de jugement peut être fatale pour la carrière d’un officielle.
Comment suivre 22 acteurs sur le terrain ? A cette question, Pakita Rivet nous dira que tout se joue dans le positionnement de l’arbitre sur le terrain. Un aspect très important, car cela lui permet de bien suivre les actions de chaque équipe. «Le positionnement joue un rôle très important. Bien des fois, les gens dans les gradins ne voient pas ce que nous avons vu et interprètent la chose différemment. Mais un bon positionnement est ce qui nous permet d’avoir un meilleur angle de vue sur chaque action. En plus, il faut toujours rester concentré, car la moindre inattention peut nous faire rater quelque chose d’important», souligne le sifflet mauricien.
A 31 ans, l’ex-joueuse de Latanier compte pas mal d’expérience, elle a d’abord débuté comme juge de touche ou lineswoman puisque c’est une femme, avant de devenir arbitre principale. Elle a fait les championnats de D2, D1 et aujourd’hui exerce dans la Barclays Mauritius Premier League.
En 6 ans de carrière, elle a également arbitré des rencontres sur la scène internationale. Elle a fait son baptême du feu en 2013 lors des préliminaires du mondial des U 17 avec la rencontre mettant aux prises la Zambie à l’Afrique du Sud. Un match mémorable pour elle, «aujourd’hui encore je continue à avoir des compliments pour ma prestation sur le terrain», avoue Pakita Rivet.
Sa dernière sortie sur le continent est tout aussi impressionnante, puisqu’elle a eu la chance d’arbitrer l’une des demi-finales du tournoi de football au Jeux Africains au Congo Brazzaville en septembre dernier. Cette rencontre opposait le Cameroun au Nigeria.
Après ces expériences, Pakita Rivet a hâte d’aller encore plus loin et pourquoi pas arbitrer un match de Coupe du monde avant ses 45 ans, l’âge de la retraite d’un arbitre international.
Direction la MFA House à Trianon. C’est l’instance suprême du football mauricien qui organise régulièrement des cours de formation à l’intention des aspirants arbitres. Ils sont dispensés par des instructeurs de la FIFA/CAF et sont composés de plusieurs volets : théorique, pratique et physique.
Il n’y a pas d’âge minimum pour aspirer à devenir sifflet, il suffit d’avoir une très bonne condition physique et un bon niveau académique. On ne se rend pas compte, mais les arbitres sont ceux qui courent le plus sur un terrain de football et doivent accélérer à tout moment. « Les arbitres sont les personnes qui se fatiguent le plus sur le terrain. Il n’y a pas de temps de récupération, contrairement aux joueurs. Il passe son temps à faire le va et vient durant toute la durée de la rencontre. En plus de cela, il doit tenir compte des moindres faits et gestes sur la pelouse. C’est extrêmement important d’avoir une bonne condition physique. D’ailleurs, ces tests, les arbitres le font à plusieurs reprises durant l’année sans compter les nombreux ateliers de travail où nous passons en revue les règlements», rappelle Maria Pakita Rivet, la seule arbitre centrale féminine.
Les prochains appels de candidature pour ceux désirant suivre des cours d’arbitrage auront lieu prochainement.
Qadeer Hoybun et Rehade Jhuboo
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