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15 octobre 2015 15:14
Finissons avec les clichés. Ce sport collectif n’est pas une affaire de garçons bien bâtis qui vous rentrent dedans de façon spectaculaire. Les filles s’y collent aussi depuis quelques années et sont bien décidées à défendre leurs territoires. Elles s’y connaissent à fond, à l’image des membres de la sélection mauricienne de rugby qui participe actuellement à l’Afrasia International Rugby Tournament et suit avec intérêt la présente édition de la Coupe du monde, qui se déroule en Angleterre au Pays de Galles.
Ça crie, ça hurle sur le terrain. Ce sont les membres de la sélection nationale en pleine séance de travail à l’entraînement. A les voir en action, on ne dirait pas que certaines viennent à peine de s’y mettre. Adèle Catherine, âgée de 23 ans, est l’une d’entre elle, et, derrière son sourire ravageur, se cache une fonceuse déterminée. C’est à l’université de Maurice que cette habitante de Roche-Brunes a découvert cette discipline.
« C’est là que j’ai été approchée pour rejoindre l’équipe nationale au début de l’année. Je dois avouer qu’au début j’ai rejoint l’équipe pour rigoler, mais mon intérêt s’est beaucoup développé, parce que le rugby à plaquer est un sport qui demande beaucoup d’engagement, d’effort, de bonne mise en forme et de dévouement, mais, surtout, parce que je suis entourée de femmes hors du commun qui se donnent à fond et avec qui j’ai créé des liens d’amitié. Nous sommes devenues comme une famille qui avons évolué ensemble à plusieurs niveaux », raconte ce membre du Curepipe Starlight, capable de jouer en demi de mêlée et sur l’aile.
Tout débute en 2012 pour Floriane St- Louis lorsqu’elle était étudiante universitaire. « J’ai tout de suite accroché à cette activité qui demande un investissement physique et moral. Il faut être physiquement prêt pour l’effort, accepter de prendre des coups, de tomber, mais il faut, aussi, avoir le courage de se relever et continuer malgré tout. C’est aussi un sport d’amitié : il faut absolument avoir confiance en ses coéquipiers et être prête à les soutenir à tout moment. Et j’aime cet état d'esprit », explique la sœur de la triathlète Fabienne St-Louis.
De son côté, Valérie Arlanda s’est retrouvée dans le monde du rugby par hasard. « C’est un ami qui m’avait proposé de venir faire du fitness et d’essayer le rugby, et cela fait 10 mois que je suis dedans », avoue cette habitante de New Grove, qui se sent très à l’aise dans ce milieu, considéré comme l’apanage des hommes. Les trois interlocutrices balaient d’un revers de main, au risque de nous retrouver au sol, cette perception.
« You can do anything others do, you can do it even better. En tant que femmes qui évoluons dans un sport dit fait pour les hommes, il nous a fallu penser très grand et oser se lancer. Qui ne tente rien n’a rien et jusqu’ici on a tout à gagner, surtout de l’expérience », répond Adèle Catherine. Elles pensent toutes que ce sport a eu un impact positif sur leur vie.
« Le rugby m’apporte plus de confiance en moi, parce que je me rends compte que je suis capable de bien plus que ce que je pensais. J’apprends aussi à maîtriser mes émotions et à mieux vivre avec les autres », explique Floriane St-Louis, membre du Curepipe Starlight alors que Valérie Arlanda souligne que le rugby, lui, a apporté la discipline et une bonne hygiène de vie.
« Le rugby m’apprend le respect de mon prochain. Ce sport est perçu comme étant agressif et violent, certes, mais à aucun moment il n’encourage le manque de respect de l’adversaire. Le rugby veut aussi que l’on n’abandonne pas son équipe en difficulté : chacune est indispensable à son poste tout comme dans la vie, on a tous un rôle à jouer et lorsqu’on se fait plaquer, tant que l’arbitre ne siffle pas, le jeu doit continuer. En tant que femme, je dois dire que je me fait respecter, ça attire l’intérêt et la curiosité des gens », dit Adèle Catherine, qui aime bien Dan Carter chez les All Blacks.
Si le rugby féminin est en mode décollage à Maurice, les filles pensent que le potentiel est là pour atteindre d’autres paliers. « Il y a des débouchés dans ce domaine, à l’étranger, pour les femmes mais, pour le moment il nous faudrait déjà commencer par recruter plus de filles, de femmes, à qui l’invitation est lancée », dit Adèle Catherine. « Je suis sûre que nous sommes capables d’atteindre un niveau très acceptable dans la région africaine dans un premier temps et pourquoi pas au niveau international. Mais, pour cela, il faut qu’on puisse affronter plus régulièrement des équipes étrangères afin de mieux évaluer notre progression et apprendre de nouvelles choses », ajoute Floriane St- Louis, qui a comme joueur préféré, le Français Wesley Fofana
Ces passionnées de rugby suivent avec attention ce qui se passe actuellement lors de la Coupe du monde et chacune a sa favorite. Si Floriane St-Louis est supportrice de la France, ses deux coéquipières sont à fond derrière la Nouvelle-Zélande.
La sélection mauricienne jouit d’une très bonne réputation sur la scène internationale. Maurice fait partie des huit meilleures équipes africaines sur le continent, et, au niveau mondial, le quadricolore se retrouve à la 85e place. Dans le cadre des Jeux oympiques de 2016 au Brésil, la RUM prépare activement une équipe de ruyby-à-7, en vue d’une éventuelle qualification pour les Jeux de 2016.
Alors que beaucoup pensent que le rugby est une affaire d’hommes, cette discipline est également pratiquée par les femmes. Lancé à Maurice depuis quelques années, le rugby féminin connaît un véritable succès auprès de la gent féminine. «C’est la catégorie qui connaît le plus de succès en ce moment. On peut même dire que le rugby féminin est en train d’exploser à Maurice, car de plus en plus de filles veulent pratiquer cette discipline. Cela a commencé par le rugby de toucher, mais maintenant elles sont plus nombreuses à vouloir se mettre au rugby de plaquage», avance Julien Blazy, directeur technique national (DTN) de rugby à Maurice. Cette équipe de plaquage a vu le jour depuis environ un an et compte aujourd’hui une trentaine d'adeptes.
Pour beaucoup de personnes, le rugby est un sport qui n’est pas fait pour les gens ordinaires, ou encore, il faut avoir des attributs spéciaux pour pouvoir le pratiquer. C’est la perception qu’a bon nombre de Mauriciens lorsque nous parlons du ballon ovale. Et pourtant ce n’est pas le cas. Le rugby fait partie des disciplines que tous peuvent pratiquer peu importe le physique. «Contrairement à ce qu’on puisse penser. Tout le monde peut jouer. Qu’on soit grand ou petit, cela n’a pas trop d’importance, car le gabarit varie selon les postes. Cela est fait en tenant compte de la forme et des aptitudes de la personne. Dans le rugby il y a plusieurs postes, et chacun correspond à un physique particulier», explique Julien Blazy, le directeur technique national de la Rugby Union of Mauritius (RUM).
Ceux qui désirent pratiquer le rugby peuvent prendre contact auprès de la Rugby Union of Mauritius. La fédération va ensuite diriger ces personnes vers les clubs se trouvant dans les régions les plus proches de leur domicile. En adhérant à un club, les amateurs de la discipline pourront pratiquer leur sport favori en toute quiétude tout en bénéficiant d’un bon encadrement. Ils auront, également, une licence fédérale d’un an, et une couverture d’assurance pour les blessures, cela contre une somme de Rs 2 000 pour les -18 ans et Rs 2 500 pour les seniors. Ce montant couvre aussi les déplacements les jours de match.
Avant de se mettre à un nouveau sport, nous nous demandons toujours ce qu’il faut comme équipement. Pour le rugby, ce ne sera pas grand-chose sauf bien entendu une paire de chaussures à crampons, un-t-shirt et un short. Cela suffit grandement et pourquoi pas un protège-dents qui ne coûte pas cher (environ Rs 100). Sinon, se sont les clubs qui fournissent les équipements indispensables les jours de matche avec les tenues officielles etc.
La RUM compte six clubs de rugby à Maurice. Ces derniers sont les Highland Blues CSSC, les Northern Pirates, les Western Cowboys, les Stags, l’Université de Maurice et une équipe de la Special Support Unit (SSU). Si tous ces clubs possèdent des équipes seniors, trois d’entre eux disposent des équipes dans toutes les catégories d’âge notamment U11, U13, U, 15, U17, juniors et féminin. Ces clubs sont les Highland Blues, les Northern Pirates et les Western Cowboys. Une nouvelle catégorie fera son apparition prochainement à savoir les U9. Outre les clubs, la fédération de rugby mène également des actions afin d’introduire ce sport dans plusieurs régions du pays avec notamment Rivière-Noire, La Gaulette, Petite-Rivière-Noire, Bambous, La Source (Quatre-Bornes), Résidence Kennedy, Roche-Bois et Surinam.
Textes : Rehade Jhuboo et Qadeer Hoybun
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