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Par Michaëlla Seblin
16 février 2025 09:52
Que retient-on, trois mois après les élections législatives, à la veille des 100 premiers jours du nouveau gouvernement ? D’un côté, une équipe bénéficiant encore de l’indulgence d’un peuple qui l’a massivement élue, de l’autre, une opposition déboussolée, toujours incapable de panser ses plaies après l’incroyable défaite du 11 novembre dernier.
Au sommet de l’État, le duo Ramgoolam-Bérenger profite encore de sa lune de miel, et l'entente semble, pour l'heure, solide au sein des partis de l'Alliance du Changement. En revanche, l'Alliance Lepep a disparu des radars. Aucune conférence de presse explicative depuis la défaite, aucune apparition publique collective de ses dirigeants. Hormis quelques publications laconiques sur Facebook et de rares apparitions où son embarras est palpable – comme lors du lancement du livre de Bancoult –, Pravind Jugnauth donne l’image d’un leader sonné par la débâcle, hésitant sur la posture à adopter. Un trouble d’autant plus évident lorsqu'il se retrouve relégué au rôle d’invité, contraint d'écouter son rival Ramgoolam prononcer un discours. Une situation à laquelle il est manifestement peu habitué. Et ce n’est pas son interpellation dans l’après-midi de ce samedi qui facilitera les choses…
Du côté d’autres partenaires de l’ancien gouvernement, le silence est tout aussi assourdissant. Xavier Duval, dont le parti semble désormais n’exister qu’à travers son fils député, s’est éclipsé, tout comme ses anciens alliés Collendavelloo, Obeegadoo et Ganoo. Cette opposition éclatée et muette se condamne-t-elle à l’effacement ou les prochaines élections municipales les forceront-elles à renouer le dialogue ?
Pendant que l’opposition demeure discrète, le gouvernement, de son côté, s’emploie à projeter l’image d’une équipe qui s’est rapidement mise au travail. Trois mois après son installation, la nouvelle équipe reste relativement populaire, avec à son actif quelques performances qui suscitent une impression globalement positive. Le rétablissement des pouvoirs du Directeur des poursuites publiques (DPP), l’annonce des élections municipales pour mai, le retour d’un climat courtois au sein de l’hémicycle et les changements visibles opérés à la MBC témoignent d’une volonté de redonner tout son sens à une démocratie qui n’existait que de nom sous l’ancien régime.
D’autres mesures prometteuses ont également été annoncées, telles que la réintroduction du permis à points (à moins que le gouvernement ne cède face aux lobbies) et une série de réformes. Reste à voir si cette dynamique pourra être maintenue dans la durée.
Car si jusqu’ici la tolérance fut de mise, et qu’une période de grâce de trois mois a été accordée au gouvernement, les citoyens attendent des résultats concrets ! Une question s’impose désormais : depuis le 11 novembre, avons-nous observé des transformations profondes dans notre quotidien ? Si la promesse d’une baisse (plutôt minime) des prix des carburants a été tenue, d’autres engagements majeurs, tels que la réduction des tarifs de l’électricité, des produits alimentaires (qui ne font que grimper) et une décision concernant les prix des médicaments, sont toujours attendus. La complaisance envers le gouvernement ne durera pas.
D’ailleurs, certaines décisions commencent à susciter des critiques. Les nominations, en particulier, provoquent déjà des débats. De nombreux citoyens dénoncent un manque de transparence, une mise à l’écart des principes de méritocratie vantés pendant la campagne électorale au profit de quelques récompenses à des fidèles, majoritairement pensionnaires. Ces premières désillusions pourraient rapidement s’amplifier si des corrections ne sont pas apportées.
Les Mauriciens suivent également avec attention le gaspillage des fonds publics résultant de décisions évoquant des fraudes massives présumées, orchestrées par l’ancien gouvernement. Quelle sera la suite donnée aux récentes arrestations, notamment celles de Seegoolam (ancien gouverneur de la Banque de Maurice) et de Gooljaury (proche collaborateur de Jugnauth), accusés de blanchiment d’argent et de fraude ? L’interpellation du couple Jugnauth ce samedi annonce-t-elle le début d’un grand ménage ?
La surprise est également venue avec l’annonce de la démolition prochaine du réservoir de Cluny. Alors que nous nous préparons à affronter une sécheresse sévère, nous apprenons que cette infrastructure, inaugurée en août 2023 et ayant coûté 74 millions de roupies aux contribuables, devra être détruite en raison de 25 fissures constatées. Une décision choquante qui soulève des interrogations sur la responsabilité de cette négligence. Est-il si facile de gaspiller l’argent public sans conséquences ? Les responsables ne devraient-ils pas être poursuivis et traduits en justice ?
Avec les 100 premiers jours du gouvernement touchant à leur fin, il est désormais temps de rendre des comptes !
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