Publicité

Affaire MedPoint : L’appel qui ne fait pas trembler le MSM

13 juin 2016

Satyajit Boolell (à g.) conteste le jugement en faveur de Pravind Jugnauth.

C’est la prolongation ! Accrochez-vous (encore un peu). Vous pensiez que le match était fini, que Pravind Jugnauth avait remporté son trophée (le poste de ministre des Finances), qu’il avait eu gain de cause pour sa faute sifflée (sa condamnation pour conflit d’intérêt dans l’affaire MedPoint). Son appel victorieux avait provoqué une ola dans le camp de la majorité gouvernementale et chez les partisans du leader du MSM. Néanmoins, le Directeur des Poursuites publiques (DPP), Satyajit Boolell, a décidé que le coup de sifflet final ne sera pas (encore) entendu. Il a avancé quatre points d’appel (voir hors-texte)pour contester le jugement en faveur du leader du MSM dans une motion déposée au greffe de la Cour suprême, le mercredi 8 juin, afin de demander un «leave to appeal to the Judicial Committee of the Privy Council».Un revirement de situation qui n’inquiète pas, affirme-t-on du côté du MSM…

 

Un premier hearingaura lieu demain, lundi 13 juin, par le chef juge Kheshoe Parsad Matadeen. C’est suite à cette étape que le DPP saura s’il pourra consulter ou non les Law Lords(si ce n’est pas le cas, il pourra faire une demande de special leaveau Conseil privé directement). En attendant, que doit faire Pravind Jugnauth ? Démissionner encore une fois ? Selon un des avocats du leader du MSM, Me Raouf Gulbul, ce n’est pas nécessaire : «Constitutionnellement et légalement, il n’y a rien qui l’empêche de garder son poste de ministre (…) On ne connaît pas le jugement du Privy Council, mais pour l’instant, il n’y a aucune condamnation qui pèse sur lui. Il jouit de la présomption d’innocence.»

 

Donc, en attendant que les Law Lordsstatuent (s’ils le font !), le leader du MSM n’a pas de moveà faire. D’ailleurs, Pravind Jugnauth refuse même de commenter cette dernière action sur la pelouse de l’affaire MedPoint. Au MSM, la décision du DPP ne provoque pas de grandes vagues. Plusieurs élus orange sont du même avis : la Cour suprême a démontré que Pravind Jugnauth était innocent. Il n’y a donc pas de souci à se faire. Côté face, aucune inquiétude à signaler. Côté pile, quelques commentaires acerbes en privé. «On ne peut pas dire grand-chose. On ne peut pas égratigner le judiciaire. C’est ce qu’on nous a dit. Il faut laisser travailler les institutions»,confie un membre du MSM qui ne comprend pas, dit-il, l’acharnement du DPP.

 

Dans ses propos, un vague soupçon de vendetta politique (les relations entre l’actuel gouvernement et Satyajit Boolell ont connu quelques ratés). Un soupçon qui n’a pas lieu d’être, soutient-on du côté de la profession légale. Le DPP fait tout simplement son travail en cherchant un éclairage du Conseil privé concernant l’interprétation de l’article 12(23) du Prevention of Corruption Act(PoCA). Néanmoins, la sérénité de Pravind Jugnauth doit s’en trouver légèrement compromise. Le bonheur après le goal a laissé certainement la place à une certaine incertitude. «Il s’y attendait. Notre leader est quelqu’un de réfléchi. Il savait qu’il existait cette possibilité. Il y fait face. De toute façon, le plus dur est derrière lui», affirme un de ses proches collaborateurs. Tout est fait pour que ce nouvel épisode ne secoue pas la fragile Alliance Lepep, de nouveau : «Pravind est un garant de stabilité. Alors, il est essentiel qu’il reste au gouvernement comme ministre et qu’ensuite il prenne la place de Premier ministre. C’est dans l’intérêt de tous d’être solidaires et de hope for the best

 

Dans le meilleur des cas, les Law Lordsne souhaiteront pas entendre cette affaire, poursuit notre interlocuteur : «C’est ce qu’on espère.»Un autre membre du MSM, lui, explique sa philosophie : «On n’y est pas encore. Pourquoi s’inquiéter ? Et puis, quoi qu’il arrive, il ne faut pas oublier que le leader a été innocenté. C’est tout ce qu’on doit retenir.»Les tensions de ces derniers mois ne sont pas oubliées. Et ce jeune membre du parti ne souhaite pas les revivre : «Depuis que Pravind est de retour, les gens sont moins nerveux dans ma circonscription. C’est mieux comme ça.»

 

Et à l’issue de cette prolongation, il souhaite que Pravind Jugnauth remporte le match… encore une fois.

 

Intérêts personnels et conflit d’intérêt…

 

Le lundi 13 juin, il est prévu que le DPP présente sa motion en Cour suprême. Les avocats de Pravind Jugnauth pourront alors résister à la demande de Satyajit Boolell. Des débats et des échanges d’affidavits sont aussi au programme. Néanmoins, quels sont les principaux points d’appel avancés par le DPP ? Les voici : «Ground 1 - The mental element of the offence. Ground 2 - The meaning of “personal interest”. Ground 3 - Errors in relation to conflict of interest. Ground 4 - The construction of “any proceedings” relating to a “decision” “which a public body is to take”.»Pour consulter l’intégralité de l’affidavit, consultez le lien suivant : http://bit.ly/1OhVMAq.

 

Paul Bérenger : «hot potato» et situation malsaine

 

Pravind Jugnauth était au cœur de la conférence de presse hebdomadaire de Paul Bérenger. C’était hier, samedi 11 juin, et le leader du MMM s’exprimait pour la première fois sur la décision du DPP de faire appel au Privy Council. Il estime que le fait que le leader du MSM soit ministre des Finances dans ces conditions-là provoque une «situation malsaine» : «C’est très mauvais et malsain pour le pays que Pravind Jugnauth continue à assumer le poste de ministre des Finances et présente un budget.»Paul Bérenger affirme que «sir Anerood Jugnauth a eu tort de nommer Pravind Jugnauth au poste de ministre des Finances avant que le délai légal pour que le DPP fasse appel devant le Privy Counciln’ait expiré» : «C’est un cadeau empoisonné offert à son fils.»De plus, le leader du MMM avance que le Premier ministre a refilé le budget, qu’il qualifie de «hot potato», à son fils.

Publicité