Pas mal, disent-ils… même s’il y a toujours un «mais». En tout cas, nos automobilistes ne restent pas insensibles à la baisse de Rs 5 sur le prix du litre de l'essence et du diesel. Ainsi, le prix de l’essence passe de Rs 66,20 à Rs 61,20 et celui du diesel de Rs 63,95 à Rs 58,95. Décision avalisée par le Conseil des ministres vendredi et qui a pris effet le même jour à minuit. Une baisse attendue et qui était l’une des annonces-phares faites par les deux principales alliances en lice lors des dernières législatives. À l’arrivée, la mesure semble faire des heureux même si, en général, nos interlocuteurs attendaient une baisse plus conséquente.
À commencer par Jayen Chellum, secrétaire général de l’Association des consommateurs de l’île Maurice (ACIM) : « C’est une promesse qui a été tenue dans un sens. Il y a un aspect politique dans cette baisse car il y a eu un engagement vis-à-vis de la population, d’autant qu’il n’y a pas eu de baisse de prix depuis, je pense bien, octobre 2023. Ceci étant dit, on peut aussi se permettre d’autres questions plus profondes. Il y a d’autres facteurs à prendre en compte, comme la situation économique difficile évoquée par le gouvernement. Et je pense aussi qu’il faut un nouveau système de calcul des produits pétroliers, qui prend en compte un quantum de taxation uniquement valable pour les produits pétroliers.»
Un peu plus loin des analyses, il y a, bien sûr, nos usagers de la route, qui dépendent beaucoup de l’essence et du diesel pour leur vie personnelle et/ou professionnelle. À l’exemple de Shabbeer Ahmad Mowlah, qui s’occupe depuis environ un an de son propre business de service de livraison pour des Chinese delicacies (notamment des wantans et des rouleaux de printemps). Du coup, le monsieur de Terre-Rouge est tout le temps sur la route aux quatre coins de l’île. «J'accueille très positivement cette mesure, même si j’avoue que ce n’est pas énorme. C’est toujours mieux que rien, surtout à long terme si l’on calcule bien. J’espère juste que cette baisse ne va pas se faire d’un côté avec des augmentations de l’autre», dit-il.
Même son de cloche du côté de Doriana Cateaux, jeune maman de Curepipe, qui bouge aussi beaucoup pour les besoins de sa fille et de la famille en général : «Bien sûr, on ne va tout de même pas refuser une baisse du prix de l’essence après tellement de mois où le prix a augmenté ou n'a pas bougé. C’est très favorable même si, comme beaucoup, je m’attendais à une baisse plus importante. Et j’espère aussi que le gouvernement ne va pas augmenter le prix d’autres produits suite à cette baisse.»
Pratiquant un métier qui lui demande de bouger sans cesse, le Fitness Coach Prakash Neerunjun, de Montagne-Blanche, est un peu mitigé face à cette baisse des prix des carburants. «C'est un soulagement, mais un tout petit, car je pense que tout le monde attendait une baisse plus importante des prix. Mais c’est tout de même positif si on fait le calcul, surtout à long terme pour ceux qui sont très dépendants d’un moyen de transport pour le boulot. Donc, c’est favorable.»
Le policier Davish Baboolall fait, lui, tout un chemin chaque jour, à moto ou en voiture, pour aller sur son lieu de travail, soit de Vacoas à l’aéroport Sir Seewoosagur Ramgoolam, à Plaine-Magnien, où il bosse dans l’Helicopter Squadron. Et il est plutôt satisfait : «C’est mieux que rien d’avoir une baisse des prix des carburants, même si elle n’est pas énorme. Mais je ne vais pas refuser la possibilité d'économiser quelques sous, voire même un jour de remplissage d’essence. C’est un petit soulagement, mais un soulagement quand même, en attendant mieux.»
Navin Ramgoolam et son rapport qui fait peur
Un constat de l’économie où il ne mâche pas ses mots. Navin Ramgoolam est venu, mardi dernier, au Parlement avec un rapport sur l’état de l’économie mauricienne après le départ de l’ancien gouvernement. Et les chiffres qu’il a avancés ont de quoi faire peur. Selon lui, «l’ancien gouvernement a dilapidé les fonds publics du pays. (…) Nous sommes dans une tempête financière. (…) Il n’y a pas eu d’economic boom ; ce ne sont que des ballons de mensonge». Samedi matin, le nouveau Premier ministre en a rajouté une couche lors de la conférence de presse du gouvernement : «Nous devrons aller de l’avant avec un Fiscal Responsibility Act pour qu’il y ait des régulations sur les dépenses. (…) L’agence de notation Moody’s nous surveille de près et si on est dégradé, nous allons finir dans la catégorie Junk, où il sera de plus en plus difficile d’avoir des loans internationaux. Et si nous arrivons à en avoir, ce sera sur des taux qui ne vont pas être en notre faveur.» Paul Bérenger a, lui, déclaré : «Nous allons devoir faire appel à nos amis et partenaires, comme l’Inde ou même la Chine, et demander l’aide du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale.»
Le rapport qu’a brandi Navin Ramgoolam mardi au Parlement, en utilisant des termes comme «voodoo economics», parle de beaucoup de dossiers, comme l’inflation cumulative de 23 % (qu’il a comparé aux Seychelles qui accusent un taux de… 2 %), les pertes de Metro Express estimées à plus de Rs 2 milliards ou encore la roupie qui a perdu 46 % de sa valeur, tout en fustigeant aussi la Mauritius Investment Corporation pour sa gestion monétaire ou la State Trading Corporation, en déficit de Rs 5,6 milliards. Le rapport remet en question les taux de croissance économique, revus à la baisse dans le rapport. Idem pour le déficit budgétaire, revu à 5,7 % du produit intérieur brut, contre une estimation de 3,9 % par l’ancien régime. Le PM a aussi parlé des pensions de retraite, aussi en déficit de Rs 40 milliards, tout en soulignant que les investissements privés étaient en chute libre et que la dette publique était «colossale». Il a finalement insisté sur la nécessité «de réparer tous ces dommages sociaux et économiques causés par l’ancien régime».