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Cessation des activités de la MTCSL : des employés entre colère, tristesse et indignation

7 mars 2023

Avec la fin des activités de la MTCSL, ils sont quelque 200 employés à se retrouver dans la tourmente.

«Nos employés vont malheureusement subir des conséquences de ce qui va se passer. Je ne voudrais pas m’étendre dessus. Il y a des dispositions légales qui existent. Celles-ci seront appliquées. Je veux juste soutenir avec force qu’il y en a beaucoup qui ont été avec nous pendant des années et des années. Nous n’allons pas les laisser tomber», déclarait Gavin Glover, visiblement très ému à l’issue de l’Assemblée Générale Extraordinaire, vendredi, et qui a vu les membres du MTC sanctionner presqu'à l’unanimité l’arrêt des activités de la MTCSL. Pour celui qui est «né» au MTC, il ne voulait pas être celui qui «arrêterait les courses», mais ce choix difficile a dû être pris.

 

D’ores et déjà, il faut dire que la majorité des employés de la MTCSL pourrait pointer au chômage. A commencer par ceux qui étaient directement impliqués dans l’organisation d’une journée de courses. Ils deviennent, du coup, superflus et devraient se retrouver devant le Redundancy Board une fois que la décision sera entérinée par le board de la MTCSL en début de semaine. Pour la plupart d’entre eux, qui ont consacré toute leur carrière professionnelle au MTC, c’est une toute nouvelle vie qui commence, remplie d’incertitude pour la plupart.

 

«Pa finn kapav dormi mem», nous confie Jason*, qui compte une trentaine d’années de service au sein du MTC, quand nous lui avons parlé samedi matin. Le MTC, c’est toute sa vie professionnelle. «Depi laz 18 an mo travay MTC, mo rantre 4 her gramatin, mo fini 3 her tanto. Sa finn vinn enn routinn. Zis kan pena lekours ki nou pran konze. Sinon nou donn tou nou letan sa travay la.» Pense-t-il pouvoir conserver son poste? «Pena aukenn garanti», nous affirme-t-il.

 

Père de famille et avec des emprunts à sa charge, notre interlocuteur se dit particulièrement déçu de certaines décisions prises dans le passé et qui auraient contribué à plomber progressivement la santé financière de son employeur. «Depuis ces quinze dernières années, on nous dit que nous faisons face à des difficultés financières, mais nous avons employé malgré tout des étrangers avec de gros salaires alors que nous avions des gens tout aussi capables. Zot finn koul konpani la nett », peste-t-il. S’il dit avoir toujours été fier de travailler pour le MTC, il ne se voit pas refuser une offre du rival People’s Turf PLC (PTP) si d’aventure il se retrouve sur le carreau. «Mo ena 2 zenfan. Mo bizin mazinn zot l’avenir.»

 

Charles* a, lui, décidé de faire valoir ses droits à la retraite. Dans le giron depuis près d’une quarantaine d’années, ce palefrenier d’expérience se dit attristé par ce qui se passe, mais il ne garde pas moins une certaine amertume envers le management du club bicentenaire. «Zot finn tro fer. Finn ena enn laisser-aller. Tro boukou gaspillaz larzan», estime-t-il. A cet effet, notre interlocuteur n’a pas manqué de nous faire part de son indignation quant aux indemnités que lui et certains de ses collègues recevront.

 

Car même s’il est garanti de recevoir sa « full pension », il ne comprend pas comment cette somme peut être égale au salaire mensuel de certaines employés de MTC-MTCSL actuellement ! Très clairement, il est d’avis qu’il existe un manque de reconnaissance pour le travail que ces palefrenier ont abattu pendant plusieurs décennies. Selon Charles, les cotisations mensuelles qu’ils ont effectuées pour leur couverture d’assurance leur seront remboursées. Il espère toutefois que la direction tiendra sa parole à ce sujet.

 

Tam tam politique

 

La tristesse anime également Norbert*, qui a donné 18 années de sa vie professionnelle au MTC. S’il a tenu à remercier l’actuelle équipe dirigeante du MTC avec Gavin Glover à sa tête et celle de la MTCSL pour tout ce qu’ils ont fait pour tenter de redresser la barre, il déplore cependant tout le «tam tam» politique qu’il y a eu en avril 2022, avec notamment l’ancien président Jean-Michel Giraud qui avait refusé d’organiser les courses suite aux nouvelles conditions imposées pour la licence d’opération.

 

« Avec un peu plus de temps, je suis convaincu que la nouvelle équipe aurait pu nous sortir de cette impasse. Mais les anciens administrateurs ont, pour moi, une grande partie de responsabilité pour la situation dans laquelle nous nous retrouvons aujourd’hui. En emmenant leur combat sur le terrain politique, ils n’ont fait que pénaliser les travailleurs. Ils devront en répondre un jour. Personnellement, je me suis donné corps et âme pour le MTC. Tout comme plusieurs de mes collègues, nous voulions organiser les courses à ce moment-là, mais personne n’a voulu entendre notre voix. Zot finn desid pou nou. Zordi nou p pey sa byen ser…»

 

Le fait d’avoir basculé pratiquement tous les employés du MTC sur le payroll de la MTCSL (Ndlr; ils ne sont qu’une dizaine à être employé par le MTC), a également été une «très mauvaise décision», selon Norbert. Quid de l’avenir ? Peut-il se permettre d’attendre le retour éventuel de la MTCSL en 2024 ? «Je dois reconnaître que j’ai un grand attachement au MTC, mais aujourd’hui il ne nourrit plus ma famille. Je suis père de deux enfants. Je dois penser à leur avenir. La vie continue », nous confie Norbert, qui se voit difficilement refuser une quelconque offre, puisse-t-elle venir de PTP ou d’ailleurs. 

 

« Ce matin quand je me suis levé, j’ai pris conscience de la détresse qui animera aujourd’hui (NdlR : vendredi) tous les turfistes mauriciens. (…) c’est un drame d’avoir à prendre une décision qu’on a eu à prendre aujourd’hui. Les conséquences vont être évidemment importantes pour tout le monde. J’ai terminé mon allocution en disant que 2023 est un cauchemar et que nous espérons que quand nous nous réveillerons en 2024, l’année sera meilleure», disait Gavin Glover à la presse, vendredi. La MTCSL peut-elle rebondir l’année prochaine ? Seul le temps nous le dira.


Mais en attendant, le cauchemar ne fait que commencer pour les employés de la MTCSL.

 

*prénom modifié

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