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9 mars 2020 01:44
Le combat a commencé il y a bien longtemps. Une lutte qui ne cesse de mobiliser et d’attirer l’attention sur un problème qui ronge de plus en plus notre société : la violence envers la femme. Le ministère qui œuvre pour la protection des femmes a toujours été une réalité dans notre île. Pourquoi est-ce que la violence domestique persiste malgré tout ce qui a été enclenché depuis des années ? Qu’est-ce que les anciennes ministres ont fait quand elles étaient à ce poste ? Pourquoi ce fléau gagne-t-il du terrain ? La parole à trois femmes qui ont occupé cette fonction.
«La lutte contre la violence domestique a été une de mes priorités en tant que ministre de l’Égalité du genre. Une mesure importante était la mise en place du Perpetrator’s Rehabilitation Programme. Nous avons eu la collaboration de l’United Nations Development Programme pour développer ce projet qui se focalise sur le comportement des agresseurs. Il est très important de prendre le problème à la source pour briser le cycle de violence en réhabilitant les agresseurs», confie Fazila Jeewa Daureeawoo, aujourd’hui ministre de l’Intégration sociale, de la sécurité sociale et de la solidarité nationale. Elle dit avoir aussi travaillé sur la mise sur pied de l’Integrated Support Centre, lancé en mars 2019, avec le Premier ministre Pravind Jugnauth : «Il s’agit d’un centre d’appels intégré pour les victimes de violence domestique et les enfants victimes de maltraitance. J’ai aussi beaucoup mis l’accent sur la collaboration avec la police. La sensibilisation est aussi un élément-clé car, pour lutter contre la violence, il faut changer les mentalités. Nous avons fait beaucoup de sensibilisation à travers des causeries et des journées portes ouvertes dans des centres communautaires et centres sociaux à travers le pays, ainsi qu’à travers les radios et la télévision.»
Consciente que ce fléau continue à faire la Une de l’actualité malgré tout ce qui est fait, Fazila Jeewa Daureeawoo estime que le défi principal demeure le changement des mentalités : «C’est un processus qui prend beaucoup de temps. Le high-level committee sur la violence domestique, présidé par le Premier ministre lui-même, est une bonne chose. Je suis membre de ce comité et je suis sûre que le Premier ministre prendra des mesures additionnelles dans une approche plus holistique. De plus, il est important de commencer avec l’éducation, dès l’enfance, pour éviter toute perception de différence entre les droits des garçons et des filles. Les deux doivent être élevés de la même façon, avec les mêmes opportunités.»
Sheila Bappoo, ancienne ministre de la Femme, se souvient aussi de ses années à ce ministère. «Je vais vous emmener dans les années 90. À l’époque, les Nations unies et la communauté internationale commençaient à tirer la sonnette d’alarme sur ce sujet en mobilisant tous les pays membres sur la question des discriminations envers les femmes. Et parmi ces discriminations, il y avait la violence à l’égard de la femme. C’est vraiment durant ces années, les années 90, qu’on a commencé à vraiment parler de ce problème. Et à Maurice, à ce moment-là, il n’y avait pas de loi concernant ce fléau. C’est alors qu’on a commencé à sensibiliser sur le sujet. La loi est venue par la suite sous un autre gouvernement. C’était vraiment inconnu à l’époque et je peux vous dire que des parlementaires avaient même des réserves sur le sujet», confie l’ex-ministre. Elle assure avoir néanmoins fait beaucoup de travail de terrain pour informer la population sur cette question : «La violence envers la femme est un problème de société et de mentalité. À l’époque, on parlait plus de femmes battues que de violences domestiques. Il nous a fallu mener toute une campagne pour que les gens connaissent leurs droits.»
Aurore Perraud aussi soutient avoir œuvré pour que ce mal recule. Elle raconte avoir fait le tour des shelters pour aller à la rencontre des victimes : «Comme ministre, je suis contente d’avoir pu amender le Protection from Domestic Violence Act. Durcir la loi pour mieux protéger les victimes de violence domestique mais aussi mieux équiper ceux qui protègent les victimes. La loi en elle-même ne peut pas éliminer la violence domestique ; il faut des mesures d’accompagnement. Je me faisais un devoir d’être présente et de m’adresser aux policiers et aux officiers du ministère lors des ateliers de formation et de sensibilisation qu’organisait mon ministère. Nous avons mis en place DOVIS, le protocole pour qu’une Woman Police Constable soit présente au poste de police, pour mieux aider les victimes lorsqu’elles font une plainte au poste de police. Pour mieux servir, aider et protéger les victimes, il faut comprendre leur vécu, leur souffrance, leur problème. Je sillonnais les ONG et shelters pour aller à la rencontre de ces dames en situation de détresse. Il y a eu aussi les différentes études et les rapports sur le Domestic Violence Act.»
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