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Good Governance and Integrity Reporting Bill : SAJ en campagne pour convaincre... ses troupes

9 novembre 2015

Le Premier ministre a une mission de taille : convaincre pour que son bill passe !

Refrain entraînant. Aux platines : sir Anerood Jugnauth. Le Premier ministre lance, en ce moment, le tube de l’été des parlementaires. L’incontournable Can you vote my bill ? (largement inspiré du hit des Destiny’s Child, Bills, Bills, Bills). Pour l’instant, c’est ambiance de négoce à fond les haut-parleurs des couloirs du pouvoir. La chorégraphie des députés de la majorité n’est, néanmoins, pas encore maîtrisée. Difficile de tous s’accorder sur le pas essentiel de cette dance routine : le moment de voter en faveur du projet de loi du ministre de la Bonne gouvernance, Roshi Badhain, qui a pour but de combattre l’enrichissement illicite. Pour que tout se passe sans accroc, SAJ multiplie les rencontres et les échanges privés. Une réunion parlementaire pour des explications venant du chef du gouvernement est prévue pour demain, lundi 9 novembre.

 

Néanmoins, il ne pourra pas faire sans des changements notables qui devraient être apportés à cette loi dans les jours qui viennent. Car ça danse sur le rythme du pour et sur celui du contre, même dans les rangs de la majorité (l’opposition a déjà lancé un enchaînement bien maîtrisé dans le registre du contre). Le Good Governance and Integrity Reporting Bill (qui a besoin, pour sa réalisation, de deux amendements : le Constitution (Amendment) Bill et l’Asset Recovery (Amendment) Bill) provoque des ratés dans la symphonie gouvernementale. Du coup, le DJ de l’Alliance Lepep doit trouver les bonnes notes afin de convaincre ses clubbers d’approuver ce projet de loi controversé afin qu’il obtienne la majorité nécessaire pour, entre autre choses, un changement de la Constitution (afin de permettre l’expropriation de ceux qui ne peuvent justifier la provenance de leurs biens).

 

Pour cela, SAJ mobilise ses troupes. Un petit lobby de rien du tout pour son fan préféré, Roshi Badhain. Selon un membre du MSM, le leader de l’Alliance Lepep ne comprend pas pourquoi ce bill passe de travers : «Ça lui échappe. Tout le monde voulait un message fort contre l’enrichissement illicite, la corruption, et voilà qu’il est là, ça ne passe pas. Il dit ki linn vinn la pou netway pei et qu’on l’en empêche.» Pour que ce projet soit bien avalé (comme des couleuvres ?), le Premier ministre fait donc un petit forcing. Si, au départ, il aurait pris la décision de ne rien changer à cette loi, les réticences du PMSD (le ML s’est prononcé unanimement en faveur du projet de loi, en conférence de presse, hier, même si le leader Ivan Colendavelloo estime qu’il y a des points à améliorer) et celles émanant de personnes évoluant au sein de son parti, l’ont fait réfléchir : «Il n’a pas vraiment le choix.»

 

C’est pour cela que le bureau politique (BP) et le comité central (CC) du MSM se sont réunis hier, samedi. Pour restaurer la good vibes au sein du parti du soleil. Car cette semaine, des députés de ce parti n’ont pas hésité à dire tout le mal qu’ils pensaient de ce projet de loi, désormais connu comme la loi Badhain. Danielle Selvon, Sudesh Rughooobur et Bashir Jahangeer ont ouvertement (contrairement à d’autres qui critiquent dans l’ombre) fait grincer le tourne-disque de SAJ.

 

Malaise

 

D’ailleurs, s’ils étaient invités à faire part de leur point de vue lors de ces réunions officielles, Danielle Selvon, elle, a refusé de s’y rendre. À Radio Plus, elle a déclaré, hier, qu’elle ne se sentait pas à l’aise au sein du MSM suite à la présentation de ce projet de loi. Et a ajouté, suite aux propos élogieux de Paul Bérenger à son égard lors de son point de presse du samedi 7 novembre (voir hors-texte), qu’elle aime bien le leader des Mauves (ce qui l’a enchanté). Un signe d’un départ prochain vers la terre du cœur ? Affaire à suivre.

 

Ses dirigeants politiques lui ont-ils reproché ses déclarations fracassantes, cette semaine ? Peut-être. Peut-être pas. Ce qui est sûr, c’est que les propos de la députée de Port-Louis-Ouest/Grande-Rivière-Nord-Ouest (circonscription n° 1) ont eu l’effet d’une coupure de courant au milieu d’une soirée festive. Une douche froide. Il a été question de vengeance politique et de probables manipulations : «Il faut réexaminer ces lois afin qu’il n’y ait pas de possibilités d’abus. On ne peut pas enlever un pouvoir qui revient au judiciaire pour le confier à l’exécutif.» Ce qui gêne profondément la députée, c’est la nomination des personnes qui seront responsables des institutions qui devront gérer la nouvelle législation. Une Integrity Reporting Services Agency (IRSA) sera mise en place. Elle pourra enregistrer des dépositions (appelées «dénonciations» par les détracteurs de cette loi) et demander des explications sur la provenance des biens à un citoyen mauricien. Un Integrity Reporting Board (IRB) sera aussi institué afin d’enquêter sur les rapports remis par l’IRSA et décider de la marche à suivre. Le directeur de l’IRSA sera nommé par le ministre de la Bonne gouvernance, en consultation avec le Premier ministre. Le président de l’IRB : un ancien juge d’une cour mauricienne ou du Commonwealth nommé par le Premier ministre.

 

Sudesh Rughoobur, député du MSM, déplore la confiscation des biens et que cette action soit menée par la Financial Intelligence Unit qui est sous contrôle gouvernemental (pour l’instant, c’est le bureau du directeur des poursuites publiques qui s’en occupe). Bashir Jahangeer s’est exprimé contre la saisie des biens au début d’une enquête et sur le délai de 21 jours, jugé trop court, pour que la personne concernée puisse indiquer la provenance de ses biens. Tous ces points, et bien d’autres, ont été discuté lors du BP et du CC, hier. L’objectif : écouter… mais surtout convaincre. Pravind Jugnauth a, néanmoins, précisé que les députés du MSM auraient à suivre la ligne du parti concernant le vote de ce projet de loi. Au sein du PMSD, on attend un mot d’ordre, celui de Xavier-Luc Duval. Pour convaincre ses troupes, le leader des Bleus attend lui aussi une consigne : celle de sir Anerood Jugnauth.

 

Une rencontre en ce sens serait prévue dans les jours qui viennent. Au programme : un échange de bons procédés. Aucun député ne passera à côté du tube de SAJ, Can you vote my bill ?.

 


 

Du côté de l’opposition 

 

Au MMM. Le leader des Mauves a fait une sortie peu habituelle lors de sa conférence de presse, hier, samedi 7 novembre. Il a salué certains députés du MSM. Mais est-ce si étonnant ? Pas tout à fait ! Ceux qui reçoivent les gentils mots de Paul Bérenger sont ceux qui ont exprimé leurs réserves par rapport au projet de loi contre l’enrichissement illégal. Par ailleurs, le leader de l’opposition a déclaré qu’il est nécessaire de mettre en place une Financial Crime Commission, comme annoncé par l’Alliance Lepep pendant la campagne électorale de 2014.

 

Au PTr. Lors d’un congrès, tenu le jeudi 6 novembre à Bois-Chéri, Navin Ramgoolam a déclaré que ce projet de loi ne s’attaquerait pas uniquement aux criminels, mais aussi aux Mauriciens, victimes de dénonciations arbitraires. Plus tôt, cette semaine, le PTr a présenté une position paper sur ce bill qui comporte une série de propositions de changements.

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