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Il tue sa grand-mère Sita Devi : la descente aux enfers de Giovanni Lutchiah, toxicomane

8 décembre 2020

Kurcy, le petit-fils de la sexagénaire, ne tarit pas d'éloges sur la victime

Pendant des années, elle a subi ses provocations répétées, ses menaces, ses coups. Malgré tout, Sita Devi Lutchiah, affectueusement appelée Sheela, âgée de 67 ans, finissait toujours par pardonner à son petit-fils Giovanni, 22 ans, confient ses proches. Il s’agissait de sa chair et de son sang, répétait-elle. Mais le comportement violent de ce jeune toxicomane lui a coûté la vie.

 

Le mercredi 2 décembre, après une énième dispute, ce dernier, qui est revenu d’un séjour à Brown-Séquard il y a à peine un mois, lui a donné trois coups de couteau au cou. Grièvement blessée, Sita Devi a été conduite d’urgence à l’hôpital Jeetoo par des proches, où elle a rendu l’âme quelques heures plus tard. Une autopsie a attribué son décès à un stab wound to the neck.

 

Quant à son petit-fils Giovanni, il a été arrêté durant les heures qui ont suivi le drame. Il a comparu en cour de Port-Louis le jeudi 3 décembre, sous une accusation provisoire de meurtre. Interrogé, il est passé aux aveux. Il a déclaré aux enquêteurs qu’il s’est emporté parce que sa grand-mère aurait refusé de lui remettre Rs 200 qu’il comptait utiliser pour s’acheter sa dose de drogue synthétique.

 

Depuis le drame, les proches de la victime et du suspect sont plongés dans la tristesse et la colère. Ils reviennent sur la descente aux enfers de Giovanni, pris en charge par sa grand-mère lorsqu’il n’était encore qu’un enfant…

 

Aux dires de son entourage, le jeune homme n’aurait pas eu une enfance facile.

 

Il n’avait qu’un an lorsque ses parents se sont séparés. Sa mère a quitté le toit conjugal à Grande-Rivière-Nord-Ouest pour aller vivre à La Tour Koenig et l’aurait, dans un premier temps, emmené avec elle. Cependant, un mois plus tard, elle l’aurait ramené chez le père du jeune homme, en demandant à ce dernier et à son entourage de le prendre en charge. C’est alors que Sita Devi, sa grand-mère paternelle, qui habite la même maison, l’a pris sous son aile. «Elle s’est toujours occupée de lui comme de son propre enfant. Il n’a jamais manqué de quoique ce soit. Elle lui a tout donné», affirme Annick, la fille de la victime. La générosité, ajoute-t-elle, était en effet l’une des plus grandes qualités de Sita Devi.

 

Tout comme elle l’a fait pour ses propres enfants, cette dernière s’est démenée pour que son petit-fils grandisse dans les meilleures conditions possibles, malgré son enfance difficile. Elle lui a donné tout son amour, toute son attention, soutient sa famille. Malheureusement, à l’adolescence, Giovanni a basculé dans l’univers impitoyable de la drogue. Et c’est à ce moment-là que les choses ont commencé à se gâter. «Li ti vinn move akoz li ti pe drogue», explique Kurcy, l’autre petit-fils de la victime. «Touletan li ti pe agas mo granmer, touletan li ti pe rod kas. Li ti agresif ; sink televizion li finn kase pou li me li finn pass lor-la. Si cela ne tenait qu’à elle, elle en aurait acheté une nouvelle à chaque fois, même si pour cela, elle devait crouler sous les dettes tous les mois. Elle n’était qu’une pensionnaire mais elle voulait faire plaisir aux autres. Dimounn dir nou ena enn sel bondie, me li ti vinn zis apre bondie. Pena lot kouma li.»

 

«Ma, reponn mwa»

 

En effet, malgré le comportement violent de Giovanni, la sexagénaire n’a jamais jeté l’éponge. Contrairement aux autres membres de la famille qui, dépassés par ses accès de colère, avaient même entamé des procédures judiciaires pour qu’il ne puisse plus s’approcher de la maison. «Mais ma grand-mère nous avait demandé de revenir sur cette décision. Li ti pe dir nou li pena personn pou okip li, ki li finn get li depi li zanfan. Nous avions abandonné les charges uniquement parce que nous ne voulions pas la contrarier», confie Kurcy. C’est aussi pour elle que, contre son gré, Kurcy conduisait Giovanni chaque matin pour qu’il aille récupérer sa méthadone.

 

Le jour du drame, sa grand-mère s’était levée très tôt pour l’accompagner dans son snack où elle lui filait un coup de main. Ce n’est qu’aux alentours de 17 heures que Sita Devi a regagné son domicile. Comme l’indiquent les images des caméras de surveillance qui se trouvent au premier étage de sa maison, elle a ensuite passé quelques minutes à discuter avec sa fille Cynthia sur le balcon, avant de rentrer chez elle, au rez-de-chaussée, pour préparer le dîner, s’occuper de sa fille adoptive – une adolescente de 16 ans souffrant d’un handicap mental – et regarder son feuilleton. C’est aux environs de 20 heures que tout a basculé. Kurcy s’en souvient dans les moindres détails…

 

Il rentrait d’une réunion et était sur le point de dîner lorsqu’il a été alerté par des hurlements provenant du domicile de la sexagénaire. «Je suis immédiatement descendu et j’ai trouvé ma grand-mère à l’extérieur, qui avait les mains sur la gorge.» D’après Annick, la fille de la victime, «il l’a poignardée sous les yeux de sa fille adoptive. Elle nous a raconté que Giovanni avait rangé un couteau sous son matelas. Lorsque sa grand-mère l’a questionné à ce sujet, il s’en est emparé et l’a poignardée.»

 

Kurcy a tout juste eu le temps de prendre les clés de la voiture, de placer sa grand-mère dans le véhicule, avant de se diriger vers l’hôpital. «En chemin, je n’ai cessé de lui répéter : ‘‘Ma, reponn mwa.’’ Mais elle ne répondait pas. Les médecins nous avaient dit qu’elle ne survivrait pas plus de 48 heures mais elle nous a quittés après quelques heures seulement», relate-t-il, des sanglots dans la voix.

 

Les funérailles de Sita Devi Lutchiah ont eu lieu le jeudi 3 décembre. Quant à Giovanni, il a été reconduit en cellule, la police ayant objecté à sa remise en liberté.

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