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Par Elodie Dalloo
17 janvier 2022 04:56
Six ans se sont écoulés depuis le drame mais le couple Persand, domicilié à Lallmatie, n’a jamais baissé les bras afin d’obtenir justice. Le jeudi 13 janvier, Me Najiyah Nuha Jeewa, Principal State Counsel et représentant l’État et le ministère de la Santé, a informé le juge Benjamin Marie Joseph qu’un accord à l’amiable avait été conclu dans cette affaire entre les deux partis. Si, au départ, Ganeshan et Doorgawtee Devi Persand, représentés par Me Vedakur Rampoortab et l’avoué Hunchun Gunesh, avaient intenté un procès et réclamé la somme de Rs 2 250 000 de dommages après le décès de leur nouveau-né en septembre 2015, ils ont finalement accepté la somme de Rs 1,5 million à titre de dommages afin de mettre fin au conflit et d'abandonner les poursuites. Ce compromis négocié entre les deux partis a ainsi été converti en jugement devant la Cour suprême.
Le couple Persand avait intenté un procès à l’État et au ministère de la Santé suite au décès de leur nouveau-né, le 9 septembre 2015, à l’hôpital de Flacq, devenu depuis l’hôpital Bruno Cheong. Ils se faisaient une joie d’accueillir leur deuxième enfant, un petit garçon, mais celui-ci est décédé suite à des problèmes respiratoires peu après sa naissance. Ganeshan Persand s’en souvient comme si c’était hier : «Mon épouse suivait un traitement à l’hôpital de Flacq mais voyait également un médecin du privé travaillant dans le même hôpital. Quand elle a commencé à ressentir des douleurs, à deux semaines de la date de l’accouchement, elle a été admise. Le lendemain de son admission, elle a perdu les eaux. Son médecin du privé, qui était sur place à ce moment-là, l’a conduite en salle pour procéder à l’accouchement. Elle a accouché par césarienne d’un petit garçon.» Au départ, dit-il, «bann dokter inn bizin okip li parski li ti aval delo sal me apre li ti korek, li ti nepli ena okenn problem la sante. Zot inn pran li zot inn amenn li dan nursery».
Cependant, plus tard le même jour, les choses ont commencé à se compliquer pour le nouveau-né. «Dans l’après-midi, j’ai reçu un appel téléphonique me signalant que mon fils éprouvait des difficultés à respirer. Je ne comprenais pas pourquoi», souligne Ganeshan. Des démarches ont alors été entreprises afin de transférer le bébé au département des soins intensifs de l’hôpital Victoria ou celui du Nord, faute de matériel approprié pour le soigner à Flacq. Mais ce n’est que dans la soirée qu’une ambulance est venue récupérer le bébé pour le conduire à Candos. Malheureusement, ses poumons et son cerveau ayant été affectés par le manque d’oxygène, il a fini par rendre l’âme le lendemain matin. «Je n’ai jamais compris comment un établissement hospitalier pouvait ne pas disposer d’un tel appareil. S’il avait reçu suffisamment d’oxygène au bon moment, rien de tel ne se serait produit», déplore le papa du bébé décédé.
Dans l’espoir d’obtenir des explications, il avait porté plainte pour négligence médicale. Assisté de l’avoué Hunchun Gunesh et de l’avocat Vedakur Rampoortab, il a aussi entamé des poursuites en cour afin de situer les responsabilités. Ces six dernières années n’ont pas été de tout repos pour le couple ; plus particulièrement pour la mère du nourrisson. «Lorsque nous avons perdu notre enfant, elle a fait une dépression. Durant la première année, elle a été suivie par un psychiatre. À chaque fois qu’elle reparlait de cette douloureuse perte, elle sombrait à nouveau. Elle a donc préféré arrêter de suivre son traitement pour ne plus remuer le couteau dans la plaie.» Elle a même dû quitter sa maison pendant un temps, poursuit Ganeshan : «Mon épouse est allée vivre chez sa mère à Quatre-Soeurs pendant deux ans. Elle avait besoin de changer d’air pour ne plus penser à ce qui s’était passé.»
Lorsqu’un accord à l’amiable a finalement été proposé par les représentants de l’État et du ministère de la Santé, dit-il, le couple ne s’y est pas opposé. «Si-zan pe ale vini avek sa, nounn prefere fini avec sa parski la sante mo madam pa tro korek. Linn tromatise par sekinn ariv li», explique Ganeshan. Selon lui, «si l’État a conclu cet accord, c’est parce qu’il a reconnu qu’il était fautif. Peu importe la somme d’argent qui nous aurait été proposée, nous aurions tout de même préféré que notre enfant soit à nos côtés. Nou pou bizin viv avec sa ziska nou la mor. Li bien difisil».
Il estime que cette bataille remportée est un signal fort. «Je lance un appel à d’autres familles traversant une épreuve similaire afin qu’elles n’hésitent pas à aller de l’avant en cas de négligence médicale. Si je n’avais pas fait entendre ma voix, l’hôpital de Flacq n’aurait jamais entamé des démarches pour avoir les appareils nécessaires. Même si cela ne me ramènera pas mon enfant, je suis soulagé que d’autres familles n’auront pas à traverser la même épreuve.» Il remercie, par ailleurs, l’avoué Hunchun Gunesh et l’avocat Vedakur Rampoortab de l’avoir assisté tout au long du procès.
Avec l’argent récolté au terme de cet accord, il prévoit, notamment, de terminer la construction de la tombe de l’enfant que sa femme et lui ont perdu.
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