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Par Yvonne Stephen
14 avril 2014 21:55
Une petite coquetterie. Faire attendre l’autre. Quelques secondes ou quelques minutes (voire quelques semaines pour le PMSD). Un moyen d’attiser le désir. Et parfois, de faire naître de faux espoirs. Certains rêvaient de déclarations fracassantes, de retournements de veste spectaculaires et de propositions «bluffantes» d’ingéniosité… Ils sont peut-être déçus (ou pas). Difficile de le savoir. Ce qui est sûr, c’est que le parti de Xavier-Luc Duval est sorti de son mutisme, cette semaine. Il s’est enfin exprimé, à travers la voix de son porte-parole, Jacques Panglose, sur le livre blanc sur la réforme électorale, présenté par le leader de son allié au gouvernement, le PTr. Dans la valse des réactions, on n’attendait que le chant du coq.
Si certains estimaient que c’était au leader des Bleus de se prononcer sur la question, ils devront attendre. Xavier-Luc Duval ne veut visiblement pas parler réforme. Ou alors juste pour dire qu’il s’agit surtout d’un document menant à un «échange d’informations». Alors, c’est l’avocat qui s’en est chargé. Et il n’a pas été tendre. Coquet, mais pas doux, l’homme du PMSD. «Le Best Loser System (BLS), tel qu’il est actuellement, est meilleur que toutes les propositions alternatives contenues dans le White Paper», a déclaré Me Panglose, le vendredi 11 avril, lors d’un point de presse.
L’homme de loi estime qu’il est nécessaire de baisser le seuil d’éligibilité à la représentation proportionnelle. Pour Navin Ramgoolam, un parti devrait obtenir au moins 10 % des votes lors des législatives afin qu’un ou des candidats sortant de ses rangs soient élus selon la proportionnelle. Une proposition qui n’enchante pas le PMSD. Car elle annonce probablement la disparition des petits partis de l’Assemblée nationale : «L’idéal serait que le seuil ne dépasse pas 5 %.»
Du côté du Labour Party, on n’a pas tardé à répliquer. Selon Patrick Assirvaden, président du PTr, il est «impossible de baisser le seuil» : «Tous les membres du parti soutiennent la proposition de Navin Ramgoolam. D’ailleurs, il s’est basé sur celles des experts pour avancer ce chiffre.»
Descendre en dessous de 10 % «représente un risque d’instabilité», a-t-il précisé, «avec le risque de la création de partis sectaires». Les doléances du PMSD, avec des arguments pareils, risquent fort d’être balayées d’un revers de main. Ce qui n’arrange pas les choses chez les Bleus, c’est que le Remake 2000 apprécie encore moins les alternatives présentées. Celles-ci «ne tiennent pas la route», selon le chef de file du MMM. C’est lors d’un point de presse, le samedi 12 avril, que Paul Bérenger a commenté les déclarations du PMSD sur la réforme électorale «en toute objectivité et sans être méchant», a-t-il précisé.
Le fait que le PMSD souhaite maintenir le BLS n’a pas vraiment plu au leader du MMM. Surtout que, pour rendre cela possible, Jacques Panglose a proposé que le BLS ne se base plus sur le recensement ethnique de 1972, mais sur celui de 2011. Des chiffres plus récents régleraient tout le problème, selon la formation politique bleue. Pas du tout, s’est insurgé Paul Bérenger : «C’est clair que le PMSD n’a pas réfléchi. Le recensement de 1972 était ethnique. On demandait à quel groupe appartenait chaque individu : hindou, musulman, sino-Mauricien ou population générale. Le recensement de 2011 était un recensement religieux. Ce n’est pas la même chose.» Surtout qu’«il n’y avait pas d’obligation de réponse et les gens pouvaient répondre ce qu’ils voulaient», explique le leader du MMM.
Qu’importe ! Jacques Panglose a annoncé que le PMSD présenterait ses propositions avant le 5 mai. Il y sera aussi question de redécoupage électoral (alors que Navin Ramgoolam a décidé de ne pas aborder ce point dans son livre blanc).
Il y a peu de chance que ces prises de position fassent sourire le chef du gouvernement : «Nous partons du principe qu’au gouvernement, tout le monde a le droit d’exprimer son opinion
Mais en privé. Le PMSD cherche des ennuis», explique un membre du Labour Party. Des «ennuis» dont Xavier-Luc Duval assumera ou n’assumera pas les conséquences. «Il provoque quelque chose, puis finit par rentrer dans les rangs. Nous y sommes habitués. Et puis, il faut être honnête : si Navin Ramgoolam veut que quelque chose se fasse, ça arrivera et cela, même si le PMSD est contre», poursuit notre interlocuteur.
L’affaire Sik Yuen, les koz koze avec le MMM, les amours oubliées de Navin Ramgoolam avec le clan Jugnauth… le chef de file des Bleus a tout vu, a tout entendu, a donné l’impression de vouloir claquer la porte plusieurs fois, mais est toujours là ! Néanmoins, avec l’approche des législatives, il se pourrait que son siège soit éjectable. «Si Navin Ramgoolam décide de s’allier à Paul Bérenger, c’est fini pour lui. Qu’il pousse le bouchon trop loin alors. Ça m’arrange», confie un député mauve, dont le cœur pencherait plus pour une alliance MMM-PTr pour les élections générales prévues en 2015.
Les propositions du PMSD pourraient donc être un nouveau sujet de discorde entre les deux partis au pouvoir. Néanmoins, Navin Ramgoolam peut décider, comme d’habitude (ou presque), que le coq chante et que la caravane passe.
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