• Premier diplômé du «Chagossian Scholarship» - Noah Labutte : Roche-Bois, les Chagos, la souveraineté et l’avenir…
  • Rezistans ek Alternativ et PTr-MMM-ND : un accord «historique» pour l’Alliance du Changement
  • Nouveaux règlements de la National Land and Transport Authority : les automobilistes soulagés mais…
  • Tour de l’île en planche à voile - Laurent D’Unienville : mon nouveau challenge pour une bonne cause
  • Mari et femme frôlent la mort après une agression au sabre et au marteau à Triolet - Le couple Jhingoor : «Zame nou ti atann nou pou viv enn martir koumsa»
  • Tottenham vs Arsenal : un savoureux derby londonien pour la reprise
  • 20e journée : Goethe fait respecter la hiérarchie
  • Retour triomphal du médaillé paralympique- Yovanni Philippe : «Je reste le même et continue à prendre le bus»
  • Jean Bruneau et son invitation au Ward IV
  • Bien nourrir son chat : Conseils pour une alimentation saine et équilibrée

Relativité salariale : confusion, colère et impatience

Depuis l’annonce du gouvernement sur l’ajustement de la relativité salariale, de nombreux employés sont dans l’attente de recevoir leur augmentation. Face aux tentatives de subterfuges, les syndicats montent au créneau. 

Paiera, paiera pas ? La question est sur toutes les lèvres. Après le grand coup d’éclat qui a suivi l’annonce d’un ajustement de la relativité salarial, faite le 9 août par les ministres du Travail et des Finances, soit Soodesh Callichurn et Renganaden Padayachy, les changements dans les salaires tardent à devenir réalité au grand dam des travailleurs. En effet, si certains ont déjà reçu leur augmentation sur leur salaire du mois d’août, la majorité des salariés du secteur privé attendent toujours. Une situation décriée par les employés et les syndicalistes qui ne cachent pas leur agacement face à la réticence des compagnies à appliquer ce changement. Du côté du patronat, on préfère s’aligner derrière Business Mauritius qui dit attendre que ces annonces soient rendues officielles dans la Government Gazette, ce qui donnera ainsi force de loi à ces mesures. En l’absence de règlements officiels, les entreprises disent être dans le flou en ce qu’il s’agit de l’implémentation de ces mesures, principalement sur la déclaration fiscale relative à la Contribution sociale généralisée.

 

Du coup, au milieu de ce statu quo, un mois après l’annonce du gouvernement, le flou persiste encore sur les conditions entourant le paiement du réajustement salarial, effectif à partir du 1er juillet 2024 avec paiement rétroactif. Pour Reeaz Chuttoo de la Confédération des travailleurs des secteurs privé et public (CTSP), cette mesure était attendue depuis l’introduction du salaire minimum en janvier. Le gouvernement, lance le syndicaliste, avait l’obligation morale et légale de venir corriger les injustices salariales engendrées. «Quand le gouvernement est venu de l’avant avec la somme de Rs 16 500 comme salaire minimum, indépendamment du métier exercé et du temps de service, ça a créé un débalancement terrible. Ensuite, il est venu annoncer, en mars, la catégorisation par corps de métier, mais Business Mauritius a dit qu’il n’était pas d’accord et qu’il n’y avait pas eu consultation. Le 9 août, le gouvernement est venu de l’avant avec une démarche de hiérarchie entre les métiers, mais sans prendre en compte le temps de service. Malgré toutes les déclarations faites par le gouvernement, aujourd’hui, beaucoup de choses sont stagnantes.»

 

Dénonçant le «lobby de Business Mauritius», le syndicaliste estime qu’il y a encore de nombreuses interrogations entourant l’ajustement de la relativité salariale. «Il faut savoir que la corelativité des salaires ne s’applique pas là où il y a un accord collectif et pour les personnes dont le salaire va au-delà des Remuneration Orders (RO). C’est choquant car certains RO n’ont pas été révisés depuis plus de 38 ans. Aujourd’hui, la secrétaire d’un notaire qui signe un acte notarié touche uniquement Rs 17 000 comme salaire de base et là aussi, Business Mauritius vient vous dire que si jamais elle a un peu plus, elle ne doit pas avoir de réajustement de salaire. C’est un scandale énorme», lance Reeaz Chuttoo qui ne cache pas son exaspération. D’ailleurs, pour faire avancer les choses, la CTSP a récemment eu une rencontre avec le ministre du Travail et le Premier ministre afin de lancer un appel pour que l’ajustement de la relativité salariale telle qu’annoncée ne change pas. «Nous avons des informations selon lesquelles c’est un ancien du Mouvement militant mauricien, qui est ministre aujourd’hui, qui est en train d’agir comme porte-parole pour le patronat pour ne pas payer. C’est la même personne qui, en 2014, était venue à la CTSP pour expliquer pourquoi il ne fallait pas accorder le salaire minimum. Nous lui lançons une mise en garde.»

 

De l’autre côté, soit celui des petites et moyennes entreprises (PME), le moral est toujours en berne. Chez elles aussi, la confusion règne par rapport au paiement de la relativité salariale. À cette situation plus que jamais urgente, estime Maya Sewnath, vice-présidente de SME Chambers, le gouvernement doit sans tarder trouver une solution efficace. «Aujourd’hui, on se retrouve dans le même panier que les grandes entreprises. C’est inconcevable. Nous pensons que le gouvernement doit réviser sa législation pour les PME. Il ne peut pas venir faire des déclarations générales et tout mélanger. Il faut revoir tout le système. Déjà que de nombreux entrepreneurs ne pouvaient pas payer le minimum wage ; maintenant, avec la relativité salariale, ce sera pire. Nous anticipons déjà le bonus qui sera une autre bombe sur notre tête.»

 

Concernant le soutien financier qui sera accordé par le gouvernement aux entreprises ne pouvant pas payer le réajustement, notre interlocutrice dit saluer cette initiative, mais souligne que les contours de cette proposition restent toujours flous. «Il a dit qu’il allait aider, oui. Mais de quelle façon, pour combien de temps, sous quelle condition ? Ce sont les questions qu’on se pose. Nous avons déjà beaucoup de difficultés avec la situation qui dégénère depuis un certain temps. Est-ce que l’entrepreneur va devoir débourser et ensuite se faire rembourser par la Mauritius Revenue Authority ? Nous savons à quel point l’administration est complexe et à quel point le remboursement tarde.» Pour Maya Sewnath, c’est un vrai bouleversement pour le secteur qui est fortement impacté par toutes ces hausses. «Nous avons le sentiment qu’on fait tout pour rendre notre vie difficile. Les intérêts ont augmenté. Nous devons payer l’État, payer le travailleur, et à la fin du jour, l’entrepreneur se retrouve avec rien. Est-ce qu’il peut continuer dans ces conditions ? Nous prévoyons un grand bouleversement dans le milieu dans les mois à venir. Beaucoup vont finir par mettre la clé sous le paillasson d’ici la fin de l’année.»

 

Face à l’attente grandissante, le ministre des Finances a affirmé cette semaine que les règlements seront très bientôt «gazetted» et qu’une fois cela fait, les entreprises n’auront d’autre choix que de s’y conformer. «C’est une question de jours. Le ministre Callichurn va très bientôt venir et proposer son cadre légal pour que ces mesures deviennent applicables et que tous les travailleurs retrouvent une satisfaction. À partir de là, les compagnies devront appliquer ces règlements. Nous l’avons dit avant : nous ne laisserons aucune entreprise tomber. Si elle ne peut pas payer, nous serons là pour la soutenir comme un buffer.»

 

Si le régime est différent dans le secteur public, les fonctionnaires, qui vont bénéficier des recommandations du rapport du Pay Research Bureau (PRB) dès janvier 2025, en plus de l’augmentation de 5 % sur le salaire de base pour ceux touchant moins de Rs 50 000, ont aussi des points à éclaircir. Rajshree Thylamay, la présidente de la Confederation of Independent Trade Unions trouve que certaines choses clochent. «Déjà, 5 % ce n’est pas suffisant. Nous devons attendre septembre pour savoir si nous aurons cette augmentation ou pas. Nous voulons savoir comment ces 5 % seront payés. Est-ce que cette somme s’ajoutera à notre base ? Sera-t-elle sous forme d’allocation ?
Est-ce que ce sera déduit du prochain PRB ? Les informations ne sont pas claires. Nous avons fait des demandes pour rencontrer les officiers du PRB, mais nous n’avons eu aucune réponse.»

 

Pour le président de l’Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE), Arvind Bhojun, il est plus que jamais nécessaire de venir corriger les injustices. «Il y a un débalancement dans les salaires entre ceux qui débutent avec un salaire de Rs 20 000 par mois, et souvent sans qualifications, et ceux qui travaillent depuis des années et qui gagnent la même paie. Nous avons aujourd’hui les qualifications et de grandes responsabilités, mais c’est désolant de voir à quel point la distorsion dans les salaires est frustrante et décourageante.»

 

Il ne faut pas mélanger, dit-il, le réajustement salarial et le rapport du PRB. «Le PRB doit venir réglementer les choses. Le calcul doit être distinct. On n’est pas contre le salaire minimum, mais il faut qu’il y ait de la justice, et le gouvernement doit s’adresser à la question de la distorsion. À quel pourcentage va-t-on nous rémunérer ? Ça doit être clair. On attend depuis 2018.» Samedi prochain, souligne Arvind Bhojun, l’UPSEE tiendra une rencontre des délégués pour discuter des craintes et des requêtes par rapport au réajustement salarial.