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Vincent Degert : «J’ai vu quatre crimes de femmes en une semaine»

Le rendez-vous est donné pour le 23 novembre. La délégation de l’Union européenne à Maurice organise une «Marche silencieuse» et pacifique, commémorant la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, et demande à tous, militants, organisations, bénévoles, victimes et tous ceux qui s’opposent à la violence, de se rassembler devant la municipalité de Port-Louis, de 9h45 à 11 heures, pour montrer une contribution active à la cause. Vincent Degert, l’ambassadeur de l’Union européenne auprès de la République de Maurice, nous en dit plus sur cette initiative.

La Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes sera célébrée, le lundi 25 novembre. Quelle est l’importance et le symbolisme d’une telle journée ?

 

En tant que l’Union européenne, très investis sur toute la question des valeurs et de défense des droits humains en général du fait de notre histoire ancienne, et des événements que nous avons connus sur notre continent, nous avons créé une communauté économique européenne et aussi une communauté de valeurs. Dans notre politique interne comme dans notre politique externe, l’Union européenne est active forcément sur toutes les questions ayant trait au respect des droits humains en général. 50 % des humains sont des femmes sur notre planète et nous savons qu’une femme sur trois se dit être victime ou dit avoir été, à un moment donné de sa vie, victime de violence. C’est quelque chose qui interpelle très fortement l’humanité entière, tout particulièrement l’Union européenne dans ce contexte-là.

 

C’est-à-dire ?

 

Il y a presque un an déjà, l’Union européenne a lancé une initiative qui s’appelle Spotlight. Quand je dis «lancé», c’est qu’on a accompagné cette initiative avec une enveloppe financière d’un demi-milliard d’euros, c’est dire qu’on est très investis dans cette défense des droits des femmes, de la lutte contre la violence faite aux femmes. Ce programme se veut mondial parce que malheureusement, ce fléau n’est pas un fléau européen, ni mauricien. On le retrouve dans beaucoup de nos sociétés et on a voulu s’engager profondément par rapport à cette problématique. évidemment, il y a différents types d’actions dans différents types de pays.

 

Pouvez-vous nous en dire plus ?

 

Si on regarde une sorte de classement des pays par rapport aux violences faites aux femmes, réalisé par un institut qui est basé à Genève, et si on considère que les chiffres en la matière sont toujours sujets à caution parce que toutes les femmes ne rapportent pas forcément les agressions dont elles sont victimes, tous les services n’enregistrent pas toujours les féminicides. Mais globalement si je peux dire, quand on se réfère à une population de 100 000 personnes, on retrouve 128 femmes tuées en Syrie l’an dernier, c’est le pays qui est tout en haut de la liste. Ensuite, on passe à 99 femmes tuées au Salvador, ce qui est quand même assez choquant pour un pays d’Amérique central et qui a quand même une certaine forme de développement aujourd’hui. Il y a ensuite le Venezuela avec 83 femmes tuées l’an dernier. On descend dans l’échelle, puis on retrouve d’autres pays européens aussi bien que Maurice, qui fort heureusement est plus bas dans le classement, mais quand même. Si on parle de la France, par exemple, où il y a eu un autre cas le week-end dernier, ça fait 131 femmes depuis le début de l’année qui ont été tuées. C’est énorme. C’est un phénomène qui est d’ampleur mondiale et Maurice est aussi concernée. Il nous semblait important de prendre une initiative par rapport à cette problématique. Comme il y a la journée de célébration internationale, c’est l’occasion de tirer une sorte de sonnette d’alarme par rapport à cette situation dramatique et de sensibiliser le grand public mais aussi des acteurs : la société civile, les ONG mais aussi les politiques et ceux qui peuvent et qui doivent agir par rapport à ce type de problématique.

 

Des campagnes, il y en a plusieurs. L’Inion Fam, une nouvelle association, vient d’organiser une marche. Des initiatives comme la vôtre, il y en a eu beaucoup ces derniers temps. Les lois ont été renforcées… Pourtant, les cas de féminicide continuent à alimenter l’actualité. Qu’est-ce qui cloche selon vous ?

 

Il faut se réjouir qu’il y ait une mobilisation de différents acteurs. Pourquoi ils se mobilisent ? Je suis arrivé début septembre à Maurice et la deuxième semaine de mon arrivée, j’ai vu quatre crimes de femmes en une semaine. Je salue donc ces initiatives qui ont été prises et les mobilisations qui ont suivi. Il y a cette journée internationale qui arrive et il nous a semblé que c’était le bon moment pour regrouper un peu tout le monde, toutes ces bonnes volontés, toutes ces énergies, afin de faire une action de force, pour dénoncer cette situation et interpeller par rapport à ce problème. Mais hélas, ça ne suffit pas. Après la mobilisation, il faut voir quelle est la réflexion qu’on peut faire. C’est pour cela que le jour même de la journée, soit le lundi 25 novembre, on va faire une conférence débat à la mairie de Port-Louis et on va réunir autour d’une table : les experts qui ont déjà traité de ces questions. Il y a le temps de la mobilisation, celui de la réflexion et des analyses, et un temps pour passer à l’action. On peut parler de la prévention mais ce n’est pas uniquement le rôle de l’État. C’est aussi le rôle de la famille, le rôle des amis, du voisinage. C’est le rôle de tout le monde. C’est une sensibilisation à plusieurs niveaux pour voir comment on peut anticiper ces problèmes et avoir une réaction de la société et de l’État aussi.