Vous êtes nommé à la cérémonie des Molières dans la catégorie Molière du Comédien dans un second rôle pour votre participation à la pièce Passeport d’Alexis Michalik. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
Cette nomination représente un peu, pour moi, la rançon de tout ce que j’ai pu parcourir depuis plus de 10 ans dans ce milieu. Et puis, elle a une saveur particulière parce que c’est vrai que les humoristes ne sont pas forcément considérés par le milieu du théâtre qui est assez élitiste de base et là, c’est un beau message que je peux envoyer à tout le milieu pour dire : bon bah voilà, peut-être qu’on vient de l’humour, du stand-up, mais il y en a parmi nous qui savent jouer la comédie et qui savent véhiculer d’autres émotions, et je suis fier de me dire que ça a pu être souligné. Ça, c’est le truc qui me fait le plus plaisir et aussi par rapport à ma carrière. Ça reste une nomination et si jamais ça va au bout, ce sera une statuette de plus que je poserai sur mon piano. Mais au-delà de ça, c’est un peu comme le tampon du métier qui dit que cette personne-là, à ce moment-là, elle a fait le job. En soi, le plus important, c’est que le public aime ce que tu fais, qu’il soit dans ta salle et qu’il vienne te soutenir.
Ça, c’est sûr que c’est quelque chose en plus qui donne du crédit aux yeux de certaines personnes qui parfois, malheureusement, ne vont jurer que par les prix.
Qu’est-ce que le monde du théâtre vous apporte ?
Franchement, le théâtre est, pour moi, une aventure incroyable parce que l’humour j’en fais depuis toujours. J’ai 36 ans et quand j’ai commencé j’avais 19 ans. Autant dire que ça fait longtemps. Le théâtre me permet de m’ouvrir à un monde totalement différent où il y a une liberté, où on peut faire plein de choses. On ne s’en rend pas compte et certains qui n’ont pas l’habitude d’y aller ont peut-être une vision un peu à l’ancienne du théâtre, mais aujourd’hui, il y a des pièces de théâtre comme Passeport, par exemple. Moi, j’ai des amis qui ne sont jamais allés au théâtre et qui sont venus me voir dans Passeport. Ils ont eu l’impression de regarder une série Netflix et puis, ils ont lâché des larmes à la fin et tout. C’est cela aussi que j’adore dans le théâtre : c’est l’idée de faire véhiculer plein d’émotions et de voir les gens pleurer à la fin et applaudir. C’est une sensation que je n’avais jamais vécue. De véhiculer des émotions comme ça, c’est assez dingue et moi, j’adore la liberté qu’on a au théâtre et qu’on a un peu perdu dans l’humour. Je m’épanouis totalement au théâtre.
Pouvez-vous nous parler de la pièce Passeport d’Alexis Michalik ?
Passeport parle du parcours d’un jeune migrant qui s’appelle Issa, un Érythréen, qui, suite à un espèce de coma, se réveille au milieu d’un camp de réfugiés dans le nord de la France. Il a tout oublié, d’où il vient, etc., et il a juste son passeport avec lui. Il va rencontrer des amis, des compagnons d’infortune, avec qui il va essayer de s’établir en France. On suit ainsi son parcours et toutes les galères qu’on peut avoir quand on arrive dans un pays qu’on ne connaît pas et où on veut essayer de s’intégrer avec toutes les barrières qu’on va nous mettre et tous les préjugés, etc. C’est une pièce qui est importante, surtout qu’en France le contexte est particulier. On a beaucoup de politiques qui font des réflexions, qui font même voter des lois pour durcir l’immigration. C’est sûr que ça arrive dans un contexte qui est particulier mais qui sert au final, je pense. J’ose espérer que ça pourra changer les mentalités sur tout ce qui est lié aux discriminations de l’immigration, aux préjugés et aux mythes autour de ce sujet. J’espère que ça va permettre de faire bouger les mentalités et puis, surtout, c’est une pièce qui a un casting ultra-diversifié. C’est très rare dans le théâtre privé en France de voir autant de gens, de Noirs, d’Arabes dans un casting. Malheureusement, c’est encore trop rare pour le souligner. J’espère que cela aussi va changer et j’espère que je vais moi aussi pouvoir apporter autre chose.
Pour information : la production du spectacle s’appelle ACME et parmi l’équipe, il y a une Mauricienne qui s’appelle Kelly Gowry. C’est, entre autres, grâce à elle que je me suis retrouvé sur le projet.
Quels sont vos projets à venir ?
J’ai toujours mon podcast Chez Kevin Razy, que je tourne de chez moi et qui est sur YouTube et toutes les plateformes tous les mardis. J’ai une nouvelle émission qu’on va lancer sur YouTube aussi et qui va s’appeler La tête du client. C’est plutôt un jeu durant lequel j’ai des invités et durant lequel on va s’amuser. C’est un concept assez fou que j’ai repris des États-Unis et j’ai hâte de le montrer. Là, j’en ai pour un petit moment avec la pièce Passeport et je suis aussi en train d’écrire ma comédie musicale que j’ai trop hâte de faire. Ça fait six ans que je suis dessus et je pense que c’est le bon moment pour enfin concrétiser ce projet.