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Butterfly Pre-Primary School

Bien plus qu’une école

26 avril 2025

Jessica Auguste s'est entourée d'une équipe solide et dévouée pour mener la Butterfly Pre-Primary School.

Jessica Auguste est la maman de Lucas, un enfant autiste de 12 ans, qui est sa plus grande inspiration. Parce qu’elle voulait offrir une éducation inclusive à son fils et à tous ceux qui, comme lui, vivent avec une condition différente, elle a créé la Butterfly Pre-Primary School, une école pas comme les autres.

Notre histoire

Elle commence avec Lucas. Il en est le cœur même. Jessica Auguste, une mère célibataire de 43 ans, a découvert l’autisme de son fils lorsque celui-ci avait 18 mois. «Comme beaucoup de parents ayant à faire face à cette réalité, j’ai été dans un premier temps dans le déni par rapport à la possibilité que mon enfant soit autiste, jusqu’au jour où ma maman m’a dit que c’était l’heure pour moi d’accepter la différence et de chercher à comprendre.» Après plusieurs examens, le diagnostic est confirmé. Jessica ne peut qu’accepter la réalité. Au cours des années qui suivent, elle est confrontée à bien des obstacles. Parce que son fils est autiste, les refus et les déceptions se multiplient, empêchant Lucas de bénéficier d’un encadrement et d’une éducation adaptés.Sa fille s’appelle Lya, elle a 6 ans et est neurotypique. «En fait, être neurodivergent, c’est être "normal" avec juste une différente façon d’opérer, une différente façon d’apprendre. Pour l’autisme, ils sont plus reconnus pour leur difficulté à communiquer et socialiser, mais cela ne veut pas dire qu’ils n'en sont pas capables.»

Décidée à ne pas se laisser abattre, Jessica ouvre sa propre école pour que Lucas et ceux comme lui puissent avoir un endroit où apprendre, s’épanouir et se développer. «Ma priorité, c’est Dieu, mes enfants et mon école. Je n’aime pas l’injustice. J’ai été marquée par des épisodes injustes concernant mon fils et je voudrais aujourd’hui me battre pour ceux qui n’ont pas une voix.» Aujourd’hui âgé de 12 ans, Lucas est la plus grande source d’inspiration de sa maman. «Il est doux, très sensible et extrêmement doué. Je pourrais passer des heures à parler fièrement de ses compétences. Il a la capacité de lire en vous et de se faire, dès la première rencontre, son opinion. Lucas marche beaucoup au feeling. Il est mon inspiration.»

Une école pas comme les autres

La Butterfly Pre-Primary School a vu le jour en juillet 2021, après la pandémie de Covid-19. Ouvrir sa propre école a été, pour Jessica, une décision mûrement réfléchie et dictée par le cœur. «Je voulais plus de temps avec mes enfants qui grandissaient vite et que je voyais à peine à cause du travail. Je voulais surtout protéger Lucas parce qu’il a un système immunitaire très bas et tombe facilement malade. Il a une alimentation spécifique due à certaines sensibilités sensorielles et ne prend aucun médicament. Qu’il contracte la Covid-19 n’était pas une option. Travailler pour moi me donnait plus de flexibilité et, surtout, plus de contrôle sur l’environnement dans lequel j’étais et sur comment je voulais gérer. Je voulais aussi faire du service communautaire en aidant ceux qui étaient dans le besoin mais dans la filière que moi, je maîtrise.»

La mission de l’école est simple : offrir un lieu bienveillant et adéquat à ceux qui ont besoin d’un espace pour grandir et s’épanouir malgré leur différence. «Nous souhaitons faire de notre île un endroit où il fait bon vivre. Être le role model et montrer aux autres qu’il n’y a aucun mal à être différent. La vie serait monotone sans couleurs, donc pour moi, nous avons tous notre place. Notre but est de promouvoir la tolérance, l’acceptation et l’amour. Donner une place, une chance d’appartenance à ceux qui sont actuellement rejetés.»

Depuis 2021, l’école a bien grandi et évolué. «Nous avons commencé la première année avec 11 enfants et terminé avec 25 enfants inscrits, qui était la capacité maximale, la même année. En 2022, nous avons inscrit notre premier élève autiste non-verbal, qui est maintenant élève du mainstream et premier de sa classe. En 2023, nous avions deux autistes et une fillette avec un handicap physique. En 2024, nous sommes passés à quatre autistes, et cette année, en 2025, nous avons huit autistes et un élève avec un handicap physique. Nous comptons un tiers de notre communauté scolaire diagnostiquée entre niveau 2 et 3 de l’autisme.» L’année dernière, souligne notre interlocutrice, la Butterfly Pre-Primary School a aussi franchi une nouvelle étape : «En 2021, l’école était à Rs 800. Nous avions chaque année revu les finances et augmenté jusqu’à Rs 1 300. En 2024, nous avons choisi de rejoindre le (GIA scheme) du gouvernement pour assurer un salaire aux employées de l’école, mais surtout pour avoir la possibilité d’offrir l’éducation gratuitement.»

Un océan d’amour

Leur approche est basée sur l’amour, et sur l’amour uniquement. Pour Jessica, considérer chaque enfant faisant partie de la Butterfly Pre-Primary School comme le sien est une condition sine qua non pour une meilleure prise en charge. «Se mettre à la place du parent, comprendre sa souffrance, ses difficultés et le besoin de soutien. Être porteur d’amour et d’espoir. C’est notre philosophie. Le regard des gens, à Maurice surtout, pèse lourd quand on est différent. Nous voulons, à Butterfly, que les enfants soient acceptés ainsi que leur famille, tout en leur donnant le soutien moral et émotionnel nécessaire afin qu’ils puissent accepter, eux en premier, la différence de leur enfant, devenir les premiers à faire la différence dans leur vie et, par la suite, sensibiliser ceux qui sont autour d’eux.»

C’est pourquoi, souligne la fondatrice, l'école met un point d’honneur à prôner l’inclusion dans le vrai sens du terme. «Nous voulons non seulement prendre des enfants avec des besoins spéciaux, mais leur offrir le service qu’ils méritent pour avoir la possibilité de grandir parmi les amis de leur âge, d’intégrer un cercle social en ayant la chance à l’éducation académique avec leurs challenges et leurs différences. Dans le cas de l’autisme, l’intervention précoce est impérative si nous voulons les aider à intégrer le monde autour d’eux. C’est pour cela que, dès la maternelle, nous les acceptons avec leurs différences et nous les aidons avec beaucoup d’amour afin qu’ils puissent acquérir un début d’indépendance. Nous avançons à leur rythme. Les autistes qui sont à l’école chez nous ont intégré notre école, certains à 3 ans et d’autres plus tard, mais tous en étant non-verbaux et en portant toujours la couche. Nous les acceptons, faisons preuve de patience et les accompagnons dans le développement de leurs compétences.»

Sensibiliser encore et toujours

Parce qu’il reste encore du chemin à faire, Jessica Auguste s’est aussi engagée à faire du plaidoyer pour faire reculer les préjugés. «Être autiste ou faire partie de la communauté neurodivergente est, jusqu’à ce jour, difficile à Maurice. Les services offerts pour soutenir ces enfants sont en général payants. Les diagnostics sont coûteux. Les parents doivent déjà faire face à d’énormes difficultés financières. Il y a aussi la fatigue physique, le stress, le chagrin d’avoir un enfant qui ne "fit" pas les normes de la société. Nous ne pouvons prétendre faire la différence en faisant la sourde oreille face à ceux qui sont dans le besoin. La sensibilisation est importante car nous amenons les autres à comprendre et accepter la différence.»

En sensibilisant les autres, confie Jessica, l'école offre la possibilité d’un avenir meilleur à ces enfants et à leurs parents. «Nous voulons créer une société où les Mauriciens pevent développer de l’empathie et apprendre à soutenir les autres sans distinction, que ce soit par un sourire, une attention ou un regard compréhensif. Nous voulons que la prochaine génération soit inclusive. Beaucoup pensent qu’il n’y a pas d’avenir pour les autistes à Maurice. Il est temps que les choses changent. Les autistes sont pour la plupart extrêmement doués. Ceux qui sont considérés hors norme pourraient être ceux qui aident à relever notre économie si nous investissons à long terme sur une qualité de vie meilleure pour eux, en commençant déjà par les laisser faire partie du système.»

Selon les statistiques, affirme Jessica, environ 13 000 personnes sont diagnostiquées autistes. «C’est une communauté considérable et elle n’a pas fini de grandir. Les Mauriciens sont souvent mondialement décrits comme des personnes généreuses ayant à cœur l’hospitalité, et cela est tout à fait vrai. Pourquoi ne pas rapprocher nos horizons et être bons, généreux et compréhensifs envers nos propres personnes, nos concitoyens ?» Jessica est plus que jamais déterminée à faire bouger les choses. «Kerry Magro, un célèbre auteur et award-winning professional speaker, qui est lui-même autiste et était non-verbal jusqu’à l’âge de 7 ans, a dit : "Autism doesn’t come with an instruction guide. It comes with a family who will never give up." Moi j’ai envie de dire : "Autism does not come with an instruction guide. It comes with a community who will never give up!"» Si nous n’avons pas l’amour, nous ne sommes rien. Parlons de l’autisme et faisons parler de l’autisme pour que les choses bougent enfin.

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